Le patriarche maronite, Béchara Raï, a affirmé dimanche que la seule solution pour sortir de la vacance présidentielle au Liban est "la tenue d'un congrès international" consacré à cette question, sous l'égide des Nations unies. Lors de son homélie dominicale à Bkerké, le cardinal s'est également dit "en principe" ouvert à l'idée d'un "président consensuel", alors que le pays est depuis le 1er novembre entré dans une vacance politique totale du pouvoir exécutif : sans président et avec un gouvernement chargé de l'expédition des affaires courantes depuis le 22 mai.
Le chef de l'Eglise maronite a dénoncé, en outre, "les trouvailles et les pirouettes" des députés lors des séances parlementaires consacrées à ce scrutin, les parlementaires ayant échoué, pour la cinquième fois jeudi dernier, à élire un successeur à Michel Aoun. Plusieurs élus ont en effet contesté la constitutionnalité de la décision du président de la Chambre, Nabih Berry, de reprendre les règles d'un vote au premier tour à chaque session électorale présidentielle après la session initiale.
Appel aux Nations unies
"Face à l'échec du Parlement à élire un nouveau président (...), nous ne voyons pas de solution à part la tenue d'un congrès international consacré au Liban", a lancé le prélat. Un tel congrès devrait viser, selon lui, à "renouveler la présence d'un Liban indépendant et de son entité, son système démocratique et le seul contrôle de l'Etat sur son territoire", a-t-il poursuivi, appelant à se baser sur la Constitution ainsi que sur les décisions internationales relatives au Liban.
"Les Nations unies, ainsi que tout pays qui se considère comme ami du Liban, sont concernés par la tenue d'un tel congrès", a insisté le dignitaire maronite. La communauté internationale appelle régulièrement les dirigeants libanais à élire un président rapidement, et le faisait déjà bien avant le départ de Michel Aoun, qui a quitté ses fonctions le 31 octobre. Mais en dépit des appels successifs à élire un président le plus rapidement possible, aucune initiative diplomatique n’est à attendre dans un avenir proche.
"Ceux qui font l'Histoire ce sont les groupes parlementaires et aucune autre entité", a soutenu pour sa part le mufti jaafarite Ahmad Kabalan, proche du Hezbollah, dimanche. "Le congrès international dilue la souveraineté libanaise (...) c'est pourquoi la solution (...) passe uniquement par le Parlement, et non par un congrès international", a-t-il rétorqué en répondant directement aux propos du patriarche.
"Trouvailles et pirouettes"
Mgr Raï a également critiqué le comportement des députés lors des séances électorales : "A chaque élection présidentielle, on invente des trouvailles et des pirouettes pour faire dévier l'opération électorale et ses résultats, aux dépens du processus démocratique", a-t-il dénoncé, rappelant que "la Constitution est claire dans son texte concernant la date de l'élection, le quorum des séances, le premier et le second tour", dans ce qui semble être une critique de M. Berry, qui avait affirmé à L'Orient-Le Jour avoir recours à sa propre jurisprudence en la matière.
Lors de la dernière séance électorale, les députés Sami Gemayel et Melhem Khalaf avaient invoqué les articles 49 et 74 de la Constitution libanaise, arguant qu'ils ne précisent pas que le quorum doit être de deux tiers à l'issue du premier tour de scrutin. M. Berry maintient, quant à lui, le principe de respect de ce quorum (86 députés sur 128) à chaque séance et le fait de reprendre, à chaque fois, les règles d'un premier tour.
Le chef de l'Eglise maronite est enfin revenu sur l'idée d'un "président consensuel", défendue par le Hezbollah et ses alliés face à une opposition qui prône un candidat plus offensif face au parti chiite pro-iranien. "C'est une bonne idée sur le principe, à condition qu'elle ne soit pas un prétexte à fausser le jeu, et à condition d'élire un président libre et respectueux de la Constitution", a souligné le patriarche. Un président de consensus "ne cède ni aux forceurs ni aux faibles, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur" du Liban et doit être élu "à travers des votes quotidiens successifs et des négociations entre tous les groupes électoraux", a-t-il dit.
"Nous savons qui nous voulons élire"
Quant au chef du groupe parlementaire du Hezbollah, Mohammad Raad, il a affirmé dimanche que le parti chiite "sait qui il souhaite" élire à la présidence de la République. Au cours d'un événement organisé à Majdal Zoun, au Liban-Sud, Mohammad Raad a affirmé : "Face à l'échéance présidentielle, nous savons qui nous voulons élire et nous agissons pour que cette personne accède à la présidence". Pourtant, après cinq séances parlementaires consacrées au scrutin, aucun président n'a été élu, et le Hezbollah a voté blanc à toutes ces séances tout comme ses alliés, le mouvement Amal et le Courant patriotique libre (CPL, aouniste) ainsi que les Marada. Les chefs du CPL et des Marada, respectivement Gebran Bassil et Sleiman Frangié, sont tous deux alliés au Hezbollah, rivaux entre eux, et considérés comme de potentiels candidats à la présidence. Toutefois, le Hezbollah n'a toujours pas affiché son soutien officiel à l'un des deux, et préfère pour le moment voter blanc.
Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a affirmé vendredi que son parti veut un président "qui ne trahira pas la Résistance, ne complotera pas contre elle et ne la poignardera pas dans le dos", le terme de Résistance faisant référence au parti lui-même.
"Un manque de sérieux" pour Audi
Le métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth Elias Audi a estimé, de son côté, qu'"une séance parlementaire qui se tient une fois par semaine indique un manque de sérieux", donnant le sentiment que les députés "prennent notre intelligence à la légère, tout comme leurs responsabilités". "Qu'est-ce qui les empêche de tenir une séance ouverte où les tours de vote se succèdent jusqu'à élire un président ?", a-t-il demandé.
"N'est-ce pas ce qu'il faudrait faire ? Sauf si l'obstruction est volontairement imposée pour atteindre un but inconnu, ce qui est un manquement à leur réputation et à leur rang", a-t-il poursuivi.
commentaires (7)
PATRIARCHE, SI LES LIBANAIS ACCEPTENT OU LEUR SONT IMPOSES BASSIL OU SLEIMANE... BONJOUR WILEYET EL FAKIH. NE VOUS BERNEZ PAS QUE L,UN DES DEUX VOUS PROMETTE D,ETRE PRESIDENT POUR TOUS. DEJA LE HEZBOLLAH L,A CARACTERISE. SLOGAN : LA LIBERTE OU LA MORT ! VAUT MIEUX MOURIR QU,AVOIR A SUBIR UN AUTRE MANDAT A LA AOUN/BASSIL.
LA LIBRE EXPRESSION
12 h 31, le 14 novembre 2022