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Politique - Décryptage

Mobilisation confessionnelle sur fond de scénarios de vacance présidentielle

Sur fond de scénarios plus ou moins farfelus pour l’après-31 octobre, le ton ne cesse de monter entre le camp présidentiel d’un côté et celui du Premier ministre sortant et désigné de l’autre. Ce qui, il y a quelques jours encore, semblait un moyen de remplir le temps mort, en attendant que le paysage régional se clarifie, et une façon de détourner l’attention populaire de l’incapacité à trouver des solutions aux problèmes de la vie quotidienne est en train de prendre désormais une tournure confessionnelle. La guerre des communiqués entre Baabda et le Sérail, puis les fuites sur les rencontres jusque-là improductives entre Michel Aoun et Nagib Mikati sont en train de créer un climat de tension entre deux grandes communautés qui ont joué un rôle déterminant dans la naissance du Liban moderne et qui semblaient avoir dépassé ce genre de considérations. Pour ne pas arranger les choses, les médias multiplient les scénarios qui ravivent indirectement les craintes communautaires. Certains parlent ainsi d’une volonté du chef de l’État de nommer, avant l’expiration de son mandat, le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil comme Premier ministre, dans une réédition du scénario réalisé par le président Amine Gemayel en 1988, lorsqu’il avait désigné le commandant en chef de l’armée à l’époque Michel Aoun comme président du cabinet transitoire avant de quitter le palais de Baabda, le 23 septembre. Évidemment, un tel scénario est complètement improbable depuis l’accord de Taëf, car, désormais, ce sont les députés qui désignent le Premier ministre et non le président de la République. Mais la reprise d’un tel scénario est destinée à raviver les souvenirs concernant un passé que beaucoup voudraient oublier, puisqu’il marque le début d’une période de turbulences qui s’était terminée par le délogement de Michel Aoun de Baabda le 13 octobre 1990 et la mise du Liban sous tutelle syrienne.

Un autre scénario qui circule porte sur une volonté présidentielle de retirer le mandat accordé au président du Conseil pour former un nouveau gouvernement. Mais là aussi, le scénario bute sur le même obstacle, qui est de taille : ce n’est pas le chef de l’État qui a donné ce mandat au président du Conseil désigné, mais bien le Parlement. Le chef de l’État se contente, lui, de publier le décret de désignation en se basant sur le choix du plus grand nombre de députés. C’est donc le Parlement qui pourrait retirer ce mandat. Mais dans les circonstances actuelles, il est difficile, voire impossible, d’imaginer qu’une majorité de députés puisse s’entendre sur le fait de retirer le mandat accordé à Mikati pour former un nouveau gouvernement et de s’entendre avec le chef de l’État sur de nouvelles consultations parlementaires destinées à choisir un remplaçant. De l’avis d’un spécialiste constitutionnel, il serait encore plus facile pour les députés de s’entendre sur un nouveau président de la République...

Enfin, il est aussi question d’une démission collective de plusieurs ministres pour discréditer totalement l’actuel gouvernement et couper la voie à toute possibilité de lui accorder les prérogatives présidentielles en cas de vacance à la tête de l’État. Ce scénario paraît aussi improbable, car il faudrait la démission de 8 ministres pour que le cabinet déjà démissionnaire soit paralysé. Mais même si ce scénario se produisait, qui pourrait alors remplacer le gouvernement ?

Crédibles ou non, ces scénarios augmentent la confusion sur le sort de l’échéance présidentielle. Toujours selon le spécialiste constitutionnel précité, l’approche politique aujourd’hui semble de moins en moins rationnelle et de plus en plus émotionnelle.

Le camp du président du Conseil évoque désormais la nécessité de respecter les prérogatives du Premier ministre telles que prévues par l’accord de Taëf. Les proches de Nagib Mikati tentent ainsi de rallier autour de lui les instances sunnites politiques et religieuses du pays pour couper court à toute possibilité pour le chef de l’État de chercher à l’affaiblir. Certes, les possibilités de le remplacer restent limitées, mais, malgré tout, la mobilisation confessionnelle peut renforcer sa position, notamment dans le processus de formation du gouvernement. Le camp adverse mène aussi ses manœuvres. Les milieux proches de Baabda alimentent le flou et cherchent en même temps à mobiliser les instances maronites pour réclamer le respect des prérogatives du chef de l’État et la nécessité d’avoir un gouvernement en pleine fonction en cas de vacance présidentielle. Certains brandissent même la possibilité pour le chef de l’État de ne pas quitter le palais présidentiel à la fin de son mandat le 31 octobre. Bkerké a été sollicité à ce niveau. Le conseiller du patriarche, l’ancien ministre Sejaan Azzi, a fait une déclaration en ce sens, poussant ouvertement le chef de l’État à ne pas quitter le palais de Baabda si un nouveau président n’était pas élu. De son côté, le président de la Ligue maronite Khalil Karam, qui s’est rendu à Baabda jeudi, a rapporté des propos du président affirmant qu’un gouvernement d’expédition des affaires courantes ne peut pas prendre les prérogatives du chef de l’État en cas de vacance présidentielle.

À mesure donc que l’échéance se rapproche, les positions se radicalisent. En principe, il s’agit de pousser vers l’élection d’un nouveau président dans les délais constitutionnels, mais ce climat de mobilisation et de tension confessionnelle rend encore plus difficile toute possibilité de rapprochement entre les différents acteurs politiques.

Sur fond de scénarios plus ou moins farfelus pour l’après-31 octobre, le ton ne cesse de monter entre le camp présidentiel d’un côté et celui du Premier ministre sortant et désigné de l’autre. Ce qui, il y a quelques jours encore, semblait un moyen de remplir le temps mort, en attendant que le paysage régional se clarifie, et une façon de détourner l’attention populaire de...
commentaires (2)

Quelle salade de Poutine….

Eleni Caridopoulou

12 h 31, le 27 août 2022

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Commentaires (2)

  • Quelle salade de Poutine….

    Eleni Caridopoulou

    12 h 31, le 27 août 2022

  • Il s’agit surtout de trouver une nouvelle ambassade prête à accueillir d’éventuels fuyards. On parlera des autres scénarios farfelus par la suite. Chef de l’Etat ou chef du gouvernement, ce sont des mots sans signification puisque l’Etat libanais n’existe plus. Tous les élus et tous les fonctionnaires ont des emplois fictifs et sont grassement payés à ne rien faire sauf à publier des communiqués bien entendu. Un État qui n’honore pas ses dettes est INEXISTANT et doit être dissous dans sa totalité pour être remplacé par une nouvelle équation. Chypre a été exemplaire à ce sujet

    Lecteur excédé par la censure

    07 h 58, le 27 août 2022

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