Quelques semaines avant le début du délai constitutionnel pour l’élection d’un successeur à Michel Aoun, à partir du 31 août prochain (soit deux mois avant la fin du sexennat), les appels à la tenue de la présidentielle se multiplient sur le double plan local et international.
C’est sous ce prisme qu’il conviendrait d’analyser la position exprimée samedi par le président américain, Joe Biden, et les dirigeants des pays du Golfe à l’issue du « Sommet de Djeddah pour le développement et la sécurité ». Dans un communiqué, ils ont exhorté « tous les protagonistes libanais à respecter la Constitution et les échéances constitutionnelles ».
Parallèlement, le patriarche maronite, Béchara Raï, poursuit lui aussi son forcing pour l’élection du nouveau chef de l’État avant la fin du mandat Aoun. Dans son homélie hier, le prélat maronite est revenu à la charge sur ce plan. « Nous espérons que tous les protagonistes politiques travailleront dans une coopération patriotique et créeront un climat positif pour former un gouvernement et élire un président », a souligné le chef de l’Église maronite, avant de brosser le portrait du président idéal selon lui. Pour Mgr Raï, le futur chef de l’État « doit s’occuper de la cause libanaise, des enjeux nationaux, de la souveraineté et de l’indépendance du Liban, et défendre le principe de neutralité », une notion pour laquelle Bkerké plaide sans relâche depuis plus de deux ans. « On ne peut pas appeler à la neutralité du Liban et choisir un président partial envers certains axes (régionaux), qui sera ainsi incapable d’appliquer cette neutralité », a-t-il estimé.
Second clin d’œil de Geagea à Joseph Aoun
Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a, pour sa part, réitéré son appel à une unification des opposants au Hezbollah dans la perspective de la présidentielle. « Les voies de communication (entre opposants sont ouvertes). Mais le problème, c’est qu’outre les FL, les Kataëb et le Parti socialiste progressiste, il y a 35 autres camps avec lesquels il faut s’entendre », a souligné M. Geagea dans un entretien accordé samedi à l’agence al-Markaziya. Une flèche décochée en direction du reste des composantes de l’opposition, ainsi que des treize députés de la contestation qui, à plusieurs reprises, ont refusé de tendre la main aux partis politiques jugés traditionnels. « Si l’autre camp parvient à faire élire un président, nous nous dirigerons vers six nouvelles années en enfer », a averti le leader des FL, appelant « les parlementaires de l’opposition à prendre conscience de leurs responsabilités ».
Samir Geagea a, dans ce contexte, fait un nouveau clin d’œil au commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, dont le nom est évoqué comme candidat sérieux à la présidence de la République. Selon lui, le général Aoun a « bien géré l’institution militaire et s’y est comporté comme un homme d’État. Il n’a pas cédé aux pressions ». « J’espère qu’il aura des chances d’accéder à la présidence et, s’il s’avère que tel est le cas, nous allons sûrement l’appuyer », a encore dit Samir Geagea, un peu plus d’un mois après avoir appuyé implicitement l’option Joseph Aoun. Une éventualité à laquelle les Kataëb semblent hostiles. « À mon avis, le général Aoun, qui a pu protéger la troupe en dépit de toutes les crises, devrait être maintenu à la tête de l’armée, et non (être élu) à la présidence », a estimé à ce sujet Élias Hankache, député du Metn, dans une interview accordée hier à la chaîne MTV.
Le gouvernement en suspens
Entre-temps, le processus de formation du nouveau gouvernement demeure suspendu. Sa relance attend le prochain entretien entre le chef de l’État, Michel Aoun, et le Premier ministre désigné, Nagib Mikati. Ce dernier, en déplacement à Londres depuis la fête de l’Adha, devrait rentrer à Beyrouth « en début de semaine », indique à L’Orient-Le Jour Ali Darwiche, ex-parlementaire de Tripoli proche du chef du gouvernement sortant. « M. Mikati devrait en principe se rendre à Baabda », ajoute-t-il sans donner de date précise. Il s’agira de la toute première rencontre entre les deux hommes après la guerre de communiqués à laquelle ils s’étaient livrés la semaine dernière avec, en toile de fond, les prérogatives de chacun d’eux en matière de formation du gouvernement. Alors que Baabda renvoie la balle dans le camp de M. Mikati, Ali Darwiche met les points sur les i : « Le Premier ministre est ouvert à des négociations logiques conformes aux constantes qu’il avait définies », dit-il. Comprendre : Nagib Mikati demeure attaché à la mouture qu’il avait remise au président Aoun le 29 juin. Une combinaison rejetée par le chef de l’État pour plusieurs motifs, dont le remplacement de Walid Fayad (grec-orthodoxe, proche de Baabda) par l’homme d’affaires sunnite Walid Sinno au ministère de l’Énergie, aux mains des aounistes depuis 2008. Le prochain cabinet semble donc loin de voir le jour…
Mafieux, mafieux et encore mafieux
16 h 36, le 18 juillet 2022