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Lifestyle - Page Blanche

Cachés derrière leurs écrans

Cachés derrière leurs écrans

Capture d’écran. M.A.

Je me demande souvent ce que serait notre société si on interagissait les uns avec les autres, comme on le fait derrière nos écrans. Si chacun disait à l’autre et de vive voix, ce qu’il se permet d’écrire sur les réseaux sociaux. Tout d’abord, on ne fréquenterait plus grand monde, ensuite, on sombrerait inévitablement dans des bagarres sans nom. Mais cela ne risque pas d’arriver de sitôt, vu que la plupart des gens qui vous allument virtuellement sont plutôt lâches.

La haine, l’aigreur et la méchanceté sont aujourd’hui légion. Qu’on soit une figure publique ou une personne lambda, on essuie quotidiennement et sans cesse, critiques et insultes sur Instagram, Facebook et bien évidemment Twitter. Personnellement, je suis habituée à ce genre de commentaires négatifs. Quand on est dans les médias, on s’en prend parfois plein la tronche. Et ce sont rarement des critiques constructives. Tout y passe. Le professionnel, le personnel, la famille. Unfollow et commentaires homophobes et incendiaires si on appuie la communauté LGBTQ+ ; menaces si on s’en est pris à un parti politique ; injures parce qu’un podcast n’a pas plu ; et j’en passe. Cela va du « conasse » au « je souhaite que ton fils se fasse agresser par un gay », en passant par « quelle idiote », « tu ne sais pas écrire », « tu es pathétique », etc. Mais même si on est coutumiers de ce genre d’interjections, on est parfois blessés. Blessés par la gratuité des attaques. Blessés, même si le reste des messages n’est que soutien ou compliments. Blessés parce qu’aujourd’hui, on n’a pas besoin de négativité. Les détracteurs ont tendance à oublier que derrière une plume, un micro, un écran télé, se trouvent des êtres humains. La violence de certains propos est souvent incompréhensible. Comment peut-on encore, au XXIe siècle, traiter les homosexuels de malades ? Comment peut-on agresser quelqu’un sur son surpoids, sa couleur de peau, les troubles mentaux de sa fille ou son orientation sexuelle ? Chaque photo, chaque post, chaque phrase sont passés au scalpel et rien ni personne n’est épargné. Et ça tire dans tous les sens. Il est tellement aisé de déverser son animosité quand on se cache derrière son téléphone ou l’écran de son ordinateur. Tellement facile de critiquer et de se lancer dans des commentaires d’une amertume sans bornes. Plus rien ne plaît à personne. Si on se morfond sur les réseaux sociaux, on s’en prend plein la poire, si on publie ses vacances dans un hôtel de luxe, aussi. Si on s’exprime sur un événement, c’est le déchaînement, si on ne le fait pas, idem. Si ce groupe de jeunes filles, ayant eu le Golden Buzzer lors du America’s Got Talent, clame que c’est important pour la femme arabe de danser, elles se font trucider par des vieux crétins aigris. Si on vante l’arak, boisson traditionnelle et nationale, on se fait accuser de promouvoir l’excès et l’alcoolisme, si on montre une man’ouché, on se fait descendre parce qu’on ne pense pas à ceux qui n’ont pas de quoi manger. Si on fait la fête, on est traité d’indécent, si on fait la tête, de boumé. Quoi qu’on fasse, on sera sujet au ressentiment de l’autre. Cet autre, qui ne pensait pas à la misère dans laquelle vivait la moitié de la population avant la révolution, et qui soudain, ayant un éveil de conscience, crache sa culpabilité sur son semblable. Cet autre, qui, de l’étranger, le postérieur bien enfoncé dans son canapé, se permet de donner son avis sur n’importe quels fait et geste de ses concitoyens, embourbés dans leur malheur. Finalement, ce que font les autres (même publiquement) ne nous regarde pas. Si un « ami » a envie d’écrire sur Facebook un poème à sa mère décédée; si une connaissance a envie de montrer son chien ou son chagrin ; si, sur Instagram, une jeune femme se plaint qu’il y ait du retard dans les travaux de son appartement; si un oncle lointain fulmine parce qu’il a raté son avion ; les descendre ne changera ni leur volonté d’exhibitionnisme ni la situation dans laquelle nous nous trouvons. Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin d’amour, de compliments, de gentillesse. YouTube a récemment désactivé le bouton dislike. J’espère que les commentaires haineux le seront aussi.

Chroniqueuse, Médéa Azouri anime avec Mouin Jaber « Sarde After Dinner », un podcast où ils discutent librement et sans censure d’un large éventail de sujets avec des invités de tous horizons. Tous les dimanches à 21h, heure de Beyrouth.

Épisode du 3 juillet : Chaker Bou Abdalla

https://youtu.be/l3Xblwj0NEc

Je me demande souvent ce que serait notre société si on interagissait les uns avec les autres, comme on le fait derrière nos écrans. Si chacun disait à l’autre et de vive voix, ce qu’il se permet d’écrire sur les réseaux sociaux. Tout d’abord, on ne fréquenterait plus grand monde, ensuite, on sombrerait inévitablement dans des bagarres sans nom. Mais cela ne risque pas...

commentaires (1)

Il y a des cons partout. C’est juste qu’on les voit plus clairement sur les réseaux "sociaux". C’est comme ça. Tout simplement. No panic.

Gros Gnon

07 h 26, le 07 juillet 2022

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Commentaires (1)

  • Il y a des cons partout. C’est juste qu’on les voit plus clairement sur les réseaux "sociaux". C’est comme ça. Tout simplement. No panic.

    Gros Gnon

    07 h 26, le 07 juillet 2022

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