Le président libanais Michel Aoun a annoncé jeudi que les consultations parlementaires contraignantes, devant mener à la nomination d'un Premier ministre chargé de former le nouveau cabinet, auront lieu "dans les prochains jours", sans toutefois préciser la date à laquelle il convoquera les groupes parlementaires. Selon une source au palais présidentiel, interrogée par notre publication anglophone L'Orient Today, ces consultations auront lieu la semaine prochaine.
"Le chemin démocratique se poursuivra dans les prochains jours avec les consultations parlementaires et la nomination d'une personnalité qui formera le nouveau gouvernement", a affirmé M. Aoun devant les ambassadrices du Danemark, Merete Juhl, de Finlande, Unnur Orradotir Ramette et de Suède, Ann Dimorr, ainsi que l'ambassadeur de Norvège, Martin Yttervik. Il a souligné qu'après obtention de la confiance du législatif, le nouveau gouvernement devra se pencher sur "les dossiers urgents, et notamment la crise économique, le plan de redressement et les négociations avec le Fonds monétaire international". En début de semaine, Baabda avait précisé que la convocation des députés pour les consultations serait lancée après la formation des commissions parlementaires, un processus qui devrait s'achever lors d'une réunion de la Chambre, la seconde consacrée à cette question, vendredi.
Un nouveau cabinet doit être formé à la suite des élections législatives du mois de mai. Depuis le scrutin, le cabinet de Nagib Mikati est chargé de l'expédition des affaires courantes. Et il semble que le Premier ministre sortant soit le favori à sa propre succession, même si le parti des Forces libanaises (ayant le plus grand nombre d'élus chrétiens à la Chambre) et les députés issus de la contestation s'y opposent. Le milliardaire de Tripoli pense depuis plusieurs mois à sa désignation, et c’est la raison pour laquelle il ne s’est pas présenté aux législatives, rapportait récemment notre chroniqueur politique Mounir Rabih. Il peut en outre compter sur l’appui des Occidentaux, la France en tête. Sur la scène locale, sa capacité à arrondir les angles lui permet d’entretenir des relations cordiales avec une bonne partie de l’échiquier politique.
Commentant également la question du gouvernement, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, rival chrétien du président Aoun et de son camp, a estimé que le futur chef du cabinet devrait être capable de rendre à l’État le pouvoir de décision stratégique, face au Hezbollah. "Ce qui nous importe le plus, ce sont les critères auxquels le Premier ministre désigné devrait répondre: il devrait être intègre, loin de toute corruption", a déclaré M. Geagea dans une interview à l'agence locale al-Markaziya.
Après avoir plaidé pour la formation d'un gouvernement de majorité en se targuant d'avoir remporté haut la main le scrutin de mai dernier, Samir Geagea, dont le parti a raflé le plus grand nombre de sièges chrétiens, a semblé tempérer cette victoire : "Personne de notre camp, plus précisément les FL, n'a affirmé avoir obtenu la majorité parlementaire. Tout ce que nous avons dit, c'est que le Hezbollah et ses alliés l'ont perdue".
La frontière maritime
Par ailleurs, le président Aoun a évoqué le différend maritime avec Israël, revenu sur le devant de la scène politique libanaise depuis dimanche avec l'arrivée d'une plateforme gazière au large d'Israël. Michel Aoun a affirmé qu'il allait "poursuivre ses efforts pour parvenir à des résultats positifs, notamment avec l'arrivée en début de semaine prochaine du médiateur américain Amos Hochstein". "Nous allons demander à M. Hochstein de reprendre ses efforts pour redynamiser les négociations indirectes", a-t-il ajouté, toujours selon le compte Twitter de la présidence. Beyrouth attend la fin de ces pourparlers "pour pouvoir investir dans ses ressources pétrolières et gazières dans les eaux libanaises et pour assurer la stabilité et la sécurité dans la zone frontalière", selon lui.
"Le dossier de la démarcation de la frontière sud, qui entre dans le cadre de négociations internationales, fait partie des responsabilités du président de la République", a-t-il déclaré, estimant que la résolution du différend doit permettre de "préserver les intérêts du Liban et ses droits sur ses eaux et son territoire".
Karish contre Qana
Plus tôt dans la journée, le chef du Courant patriotique libre (CPL, aouniste) Gebran Bassil avait appelé jeudi à résoudre le dossier de la frontière maritime avec Israël, en prévision de futures exploitations de gaz offshore, suggérant que le champ gazier de Karish ne puisse être octroyé à Israël que si le Liban bénéficie du champ de Qana.
Ces deux champs gaziers se trouvent au niveau de la frontière entre les deux zones économiques exclusives libanaise et israélienne et devront être partagés entre Beyrouth et Tel Aviv en fonction du tracé qui sera éventuellement décidé à l'issue des négociations indirectes entre les deux pays. Ces pourparlers avaient commencé sur la base des revendications libanaises officielles enregistrées en 2011 auprès des Nations unies en référence au décret 6433/2011 portant sur une zone de 860 km2 délimitée par la Ligne 23, qui donnerait à Tel Aviv les pleins droits sur Karish tandis que le Liban aurait la majorité du champ de Qana. Elles avaient ensuite été interrompues lorsque la délégation libanaise de négociateurs avait annoncé sa volonté de réclamer un droit supplémentaire sur 1.430 km2 limités par la Ligne 29. Cette ligne coupe en deux le champ de Karish. Une revendication qui, pour être officialisée, nécessitait l’amendement du décret 6433. Ce qui n’a jamais été fait par les autorités libanaises.
"Cela ne suffit pas que la plateforme soit installée au sud de la Ligne 29, tant qu'elle est au-dessus du champ de Karish, et cela ne suffit pas qu'Israël dise qu'elle extraira du gaz d'une zone non-controversée tant que le champ gazier n'est pas divisé", a écrit M. Bassil sur Twitter. Il a appelé à résoudre cette question "avant que l'on ne dise adieu officiellement à la Ligne 29". "Il faut imposer maintenant l'équation : pas de gaz de Karish (pour Israël, ndlr) sans gaz de Qana (pour le Liban)", a-t-il conclu.
Dans une proposition présentée en février dernier, Amos Hochstein avait suggéré le tracé d'une frontière sinueuse sur la base de la Ligne 23, qui accorde au Liban une importante partie du champ d’hydrocarbures de Qana et l’autre partie de ce même champ à Israël tout en accordant à Israël la totalité du champ de Karish, de même qu’une partie du bloc 8 de la Zone économique exclusive libanaise.
Mercredi, les autorités israéliennes avaient affirmé que la plateforme Energean power "n'extraira pas de gaz de la zone contestée", tout en affirmant que Tel-Aviv est "prêt à défendre ses atouts stratégiques".
commentaires (7)
message code pour message code- scarlett H dixit- m aoun en envoie un aux poltrons qui croient en sa sagesse et en son intelligence : soyez patients ce n 'est pas encore demain que je convoquerai les elus pour choisir leur 1er ministre...
Gaby SIOUFI
08 h 48, le 10 juin 2022