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Moyen-Orient - Éclairage

Assassinat en Iran d’un officier de haut rang des pasdaran : enjeux, contexte et conséquences

L’élimination, dimanche à Téhéran, de Hassan Sayyad Khodayari marque un tournant depuis celle, en novembre 2020, d’un physicien nucléaire imputée à Israël. 

Assassinat en Iran d’un officier de haut rang des pasdaran : enjeux, contexte et conséquences

Une photo publiée le 22 mai 2022 montre un portrait du colonel au sein des Pasdaran Hassan Sayyad Khodayari, abattu dimanche à Téhéran, dans une attaque imputée par les autorités aux États-Unis et à leurs alliés. Photo IRNA/AFP

Ce que l’on sait

Hassan Sayyad Khodayari était un officier iranien de haut rang au sein de la puissante unité d’élite al-Qods, la branche des gardiens de la révolution chargée de superviser la politique étrangère du pays. Il a été éliminé dimanche à Téhéran vers 16h (heure locale) par deux hommes à moto non identifiés, alors qu’il était en voiture. Pour l’heure, l’Iran impute l’assassinat à des « éléments liés à l’arrogance mondiale » – une dénomination qui vise Washington et ses alliés, dont Israël.

L’homme avait combattu en Syrie, où Téhéran est intervenu sur le terrain dès le début de la guerre en 2011 pour soutenir le régime de Damas. De ce fait, il est considéré par la République islamique comme un « défenseur du sanctuaire », une expression utilisée par les autorités pour désigner les soldats qui ont combattu l’État islamique en Syrie ou en Irak, ces deux pays abritant des lieux de culte chiites importants. Israël – qui compte avec Washington au rang d’ennemi juré de Téhéran – soupçonne Hassan Sayyad Khodayari d’être derrière une série d’opérations visant des hommes d’affaires et des diplomates israéliens dans différents pays, que ce soit en Amérique du Sud, en Afrique, en Turquie ou encore à Chypre. Ce n’est pas la première fois que Téhéran est visé à domicile, mais cette fois-ci, le principal intéressé n’est pas directement lié au dossier du nucléaire. Au moins six scientifiques iraniens ont été tués dans le pays depuis 2010. Ces assassinats ont la plupart du temps été imputés à Israël et aux États-Unis par la République islamique. Le mode opératoire n’est pas nouveau : le physicien nucléaire Darioush Rezaeinejad avait par exemple été abattu devant son domicile, en juillet 2011, par des hommes armés à moto. L’attaque avait été imputée par l’Iran au Mossad.

Contexte

L’assassinat de Khodayari intervient dans un contexte marqué par l’engagement de Téhéran dans deux processus diplomatiques clés : les négociations indirectes sur le nucléaire iranien avec Washington, et les pourparlers en vue d’une normalisation avec Riyad. Depuis l’arrivée de Joe Biden à la Maison-Blanche, Israël et plusieurs États arabes du Golfe s’opposent à la réactivation du deal sur le nucléaire (JCPOA) conclu sous Barack Obama en 2015. Le JCPOA prévoyait des restrictions drastiques au programme nucléaire iranien en échange d’une levée des sanctions internationales. Mais Donald Trump s’en était retiré en 2018, réimposant avant de les renforcer les mesures punitives contre Téhéran. Depuis le mois de mars, les pourparlers sur le nucléaire sont au point mort, alors qu’un accord semblait à portée de main. Washington et Téhéran butent sur un point : le second exige du premier le retrait des gardiens de la révolution de la liste noire américaine des « organisations terroristes », une sanction imposée par Donald Trump.

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Étouffé par les sanctions internationales, l’Iran fait face à de graves difficultés économiques. L’annonce, ce mois-ci en Iran, de la fin des subventions sur les prix de la farine et de l’huile a mis le feu aux poudres, cette mesure d’austérité ayant conduit à une hausse démesurée des prix des denrées alimentaires de première nécessité. Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs régions du pays et, comme c’est le cas depuis quelques années, une partie des contestataires n’hésitent plus à prendre directement à partie les symboles sacrés de la République islamique, à commencer par le guide suprême Ali Khamenei.

L’assassinat de Khodayari s’est produit la veille de la visite d’Ebrahim Raïssi à Oman pour notamment discuter avec les officiels omanais du nucléaire iranien. Une entrevue qui intervient après les visites successives d’Enrique Mora – coordinateur de l’Union européenne sur le nucléaire iranien – et de l’émir du Qatar à Téhéran, pour essayer de faire avancer ce dossier.

Ce que cela implique

Si la responsabilité d’Israël – qui n’a pas nié son implication – est confirmée, l’assassinat de Khodayari pourrait être un moyen de faire pression sur Washington et de le dissuader de retirer les pasdaran de leur liste noire. Il s’agirait également de rappeler à Téhéran la force de frappe et de déstabilisation israélienne au sein même de la République islamique, et ce quel que soit l’aboutissement des négociations sur le nucléaire. Cet assassinat semble également s’inscrire dans le cadre de la « guerre de l’ombre » que se livrent l’Iran et Israël depuis deux décennies et qui compte l’explosion nucléaire sur le site de Natanz en Irak, en juillet 2020 ou encore le ciblage d’une dizaine de navires iraniens par Israël depuis 2020, que ce soit dans le Golfe, en Méditerranée, ou en mer Rouge. L’assassinat de Khodayari souligne la vulnérabilité de Téhéran aux assauts sur son propre sol dans un contexte régional et local difficile. En Irak, ses plus proches alliés ont essuyé un camouflet lors des législatives d’octobre 2021. Au Liban, le recul est moins marqué mais l’alliance menée par le Hezbollah a perdu la majorité absolue à l’Assemblée après les élections du 15 mai.

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Si le président iranien Ebrahim Raïssi a promis lundi de venger l’assassinat de Khodayari, Téhéran n’a, a priori, pas les moyens de mener des attaques du même niveau contre Washington ou Tel Aviv. Mais il peut, comme il l’a fait par le passé, répliquer par le biais des pays qu’ils considèrent comme faisant partie de son giron ou par celui de ses « proxies ». Téhéran avait, par exemple, revendiqué en janvier 2020 une attaque via 22 missiles sol-sol contre deux bases américaines après l’assassinat de Kassem Soleimani à Bagdad. Plus récemment, l’Iran avait répliqué au sabotage, imputé à Israël en février, d’une usine de drones à Tabriz en lançant une douzaine de missiles balistiques contre Erbil, estimant que la capitale du Kurdistan irakien abrite des centres « stratégiques » israéliens. Une partie des analyses à l’époque avait toutefois analysé cette attaque iranienne comme une réponse à l’élimination par Israël, en Syrie, de deux hauts responsables des Pasdaran.

Ce que l’on sait
Hassan Sayyad Khodayari était un officier iranien de haut rang au sein de la puissante unité d’élite al-Qods, la branche des gardiens de la révolution chargée de superviser la politique étrangère du pays. Il a été éliminé dimanche à Téhéran vers 16h (heure locale) par deux hommes à moto non identifiés, alors qu’il était en voiture. Pour l’heure, l’Iran...

commentaires (4)

Il est mort comme il a vécu, par la violence des Armes. Au suivant, et les suivants des suivants… Inchallah !

Le Point du Jour.

13 h 13, le 24 mai 2022

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Il est mort comme il a vécu, par la violence des Armes. Au suivant, et les suivants des suivants… Inchallah !

    Le Point du Jour.

    13 h 13, le 24 mai 2022

  • Bon ben on va avoir droit à une nouvelle statue sur la route de l’aéroport. Génial.

    Gros Gnon

    09 h 49, le 24 mai 2022

  • Peut être a t il été éliminé pour des raisons extra conjugales ... Qu'attendent donc nos autorités pour mettre les drapeaux en berne et décréter trois jours de deuil...

    C…

    21 h 53, le 23 mai 2022

  • L'auteur de l'article a vu sa plume deraper. Il parle des responsables Pasdarans partis en Syrie combattre l'etat Islamique ? Quelle blague ! Ils sont partis en Syrie combattre le peuple Syrien et personne d'autre.

    Michel Trad

    21 h 36, le 23 mai 2022

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