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Société - Affaire Ghosn

Une coopération judiciaire difficile entre France et Liban

Le parquet de Nanterre estime que Carlos Ghosn n'a pas entrepris de "démarche positive" pour obtenir une levée de son interdiction de quitter le Liban, afin de comparaître en France.

Une coopération judiciaire difficile entre France et Liban

L'ex-PDG de l'alliance Renault Nissan Carlos Ghosn à Beyrouth, le 8 janvier 2020. Photo d'archives JOSEPH EID / AFP

Le mandat d'arrêt international émis la semaine dernière par un magistrat de Nanterre à l'encontre de Carlos Ghosn dans une enquête pour abus de biens sociaux, blanchiment en bande organisée et corruption est l'aboutissement d'une coopération judiciaire difficile entre la France et le Liban.

"Il est évident qu'à partir du moment où la justice française demande à me parler, je me présenterai à la justice française, je n'ai rien à me reprocher", avait assuré Carlos Ghosn depuis Beyrouth en janvier 2020 après sa fuite du Japon, où il devait être jugé pour malversations financières aggravées. Rapidement après son arrivée, le patron déchu s'est vu retirer son passeport avec l'interdiction de quitter le Liban, en raison de l'enquête japonaise le visant.

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"On a l'air de considérer que je suis libre (...) Je dépends de la justice libanaise, c'est elle qui m'interdit de quitter le territoire", a affirmé sur BFMTV le 22 avril l'ancien grand patron âgé de 68 ans. Ces difficultés procédurales étaient prévisibles puisqu'il n'existe pas de convention judiciaire entre le Liban et la France. "Malgré ses déclarations, tout semble suggérer que Carlos Ghosn organise soigneusement, méticuleusement, son inaccessibilité" en choisissant, fin décembre 2019, de se réfugier au Liban, tacle une source proche du dossier.

Pas de "démarche positive"

Quand l'ancien patron de Renault fuit le Japon, caché dans un caisson audio, trois solutions de repli s'offrent au Franco-Libano-Brésilien. La France, qui n'extrade pas ses ressortissants, apparaît comme un lieu sûr. Mais deux enquêtes financières sont ouvertes depuis 2019 à Nanterre et Paris, rendant très probable une convocation devant la justice à son arrivée. Le Brésil, où il est né, a signé une convention de coopération judiciaire avec la France, donc il risque d'être renvoyé vers l'Hexagone.

Reste donc le Liban, qui n'extrade pas ses ressortissants, et où il est vénéré comme un géant des affaires. L'ancien capitaine d'industrie, qui a hissé le groupe automobile Renault-Nissan-Mitsubishi au premier rang mondial, soutient avoir choisi Beyrouth pour rejoindre sa femme. À l'issue de négociations avec ses avocats et le parquet libanais, des magistrats de Nanterre et Paris ont pu se rendre à Beyrouth, en juin 2021, pour entendre Carlos Ghosn dans le cadre d'une entraide pénale internationale.

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Avant et après l'audition libre, sa défense a assuré souhaiter sa mise en examen afin que leur client puisse formuler, notamment, des requêtes en nullité. Sauf que M. Ghosn n'a pas entrepris de "démarche positive" pour obtenir une levée de son interdiction de quitter le territoire pour comparaître devant le juge d'instruction, estime le parquet de Nanterre, contacté par l'AFP. Pour Jean Tamalet, un de ses avocats, il s'agit plutôt d'un échec à "se mettre d'accord sur une solution procédurale" entre le juge d'instruction de Nanterre et le parquet libanais.

"Tacitement le livrer"

Après l'audition de M. Ghosn, la justice libanaise a refusé d'accorder à l'ancien PDG une autorisation temporaire pour se rendre à une convocation du juge d'instruction en décembre dernier - alors que ses avocats la réclamaient, assure Me Tamalet. "Le parquet général de la Cour de cassation (libanaise) a refusé, car la décision de l'empêcher de voyager dans le cadre du dossier japonais est toujours en vigueur", explique à l'AFP un membre du parquet libanais. "S'il lui avait été permis de quitter le Liban, cela signifie que nous aurions tacitement accepté de le livrer", a-t-il estimé.

Le parquet libanais a ensuite refusé de procéder à une notification de ses charges, comme le souhaitaient les magistrats de Nanterre lors de leur second déplacement à Beyrouth. "C'est contraire à la loi libanaise", a justifié la source au parquet libanais : "un corps judiciaire étranger ne peut pas juger un citoyen libanais sur le territoire libanais".

Le juge d'instruction français a donc émis un mandat d'arrêt pour acter les charges qui pèsent contre Carlos Ghosn et demandé son interpellation. Si cette dernière avait lieu, l'étape suivante serait la demande d'extradition - sauf que le Liban n'extrade pas ses ressortissants. Si l'enquête aboutissait à un renvoi devant le tribunal correctionnel, M. Ghosn pourrait être jugé par défaut en France, représenté par ses avocats, ou être jugé au Liban, mais il faudrait que la justice française transmette son dossier.

Le mandat d'arrêt international émis la semaine dernière par un magistrat de Nanterre à l'encontre de Carlos Ghosn dans une enquête pour abus de biens sociaux, blanchiment en bande organisée et corruption est l'aboutissement d'une coopération judiciaire difficile entre la France et le Liban."Il est évident qu'à partir du moment où la justice française demande à me parler, je me...

commentaires (2)

La justice occidentale en particulier, cherche et fignole souvent des bavures de hauts responsables ou de gens des médias pour en faire une affaire grandiose. Jacques Chirac, Sarkozy, le premier ministre britannique actuel, un premier ministre français qui s'est suicidé, etc... De sorte qu'il devient rare de ne pas accuser un haut responsable de quoique ce soit. Un vrai fardeau. Pourquoi faire ?

Esber

17 h 27, le 29 avril 2022

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Commentaires (2)

  • La justice occidentale en particulier, cherche et fignole souvent des bavures de hauts responsables ou de gens des médias pour en faire une affaire grandiose. Jacques Chirac, Sarkozy, le premier ministre britannique actuel, un premier ministre français qui s'est suicidé, etc... De sorte qu'il devient rare de ne pas accuser un haut responsable de quoique ce soit. Un vrai fardeau. Pourquoi faire ?

    Esber

    17 h 27, le 29 avril 2022

  • Evidement que la cooperation judiciaire est difficile entre la France et le Liban. La France est un "etat de droit", alors que le Liban est un refuge pour les repris de justice de tous poils (et barbes aussi d'ailleurs).

    Michel Trad

    17 h 23, le 29 avril 2022

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