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Économie - Rapport

L’Administration de la statistique publie le PIB de 2020 et rattrape presque son retard

L’activité dans le secteur agricole a augmenté de 40 % en 2020, année pendant laquelle la crise s’est accélérée.

L’Administration de la statistique publie le PIB de 2020 et rattrape presque son retard

L’Administration centrale de la statistique (ACS), rattachée à la présidence du Conseil des ministres et qui est supposée publier tous les indicateurs socio-économiques du pays (inflation, pauvreté, etc.), a récemment divulgué les chiffres officiels du PIB réel pour 2020, en baisse de 25,9 % sur cet exercice en glissement annuel.

Si cette mise à jour confirme le décrochage de l’économie libanaise au cours d’une année marquée par l’accélération de la crise, les premiers confinements liés à la pandémie de Covid-19 ou encore la tragédie du 4 août, elle permet aussi à l’ACS de rattraper quelque peu son retard chronique dans la publication des comptes nationaux. « Nous n’avons plus qu’un trimestre de retard environ sur ce qui devrait être notre calendrier normal de publication », s’est réjoui un fonctionnaire au sein de cet organisme. « Normalement, nous aurions dû publier les chiffres du premier trimestre 2021 vers la fin du mois de mars dernier », ajoute-t-il. Un délai qui correspond peu ou prou à ceux de l’Insee en France pour la publication des comptes nationaux définitifs. Des estimations provisoires sont toutefois publiées dans les mois qui suivent l’année concernée.

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Au niveau de la méthodologie, l’ACS affirme avoir utilisé un taux de change moyen pondéré de 3 878 livres libanaises pour un dollar, afin de retranscrire la dépréciation de la livre qui s’est accélérée cette année, le taux passant de 2 000 livres pour un dollar au début de l’exercice à près de 9 000 livres à sa fin, avec d’importantes fluctuations. Les auteurs préviennent également que les chiffres qui ont servi de base à leurs calculs sont « incertains » et « imprécis », compte tenu de la précarité de la situation du pays en 2020, ainsi que du manque de données concernant les coûts de production, les dépenses des consommateurs ou encore le volume de transactions avec l’étranger. Ils assurent enfin que les chiffres pourront être ajustés plus tard si de nouvelles données deviennent accessibles. Parmi les éléments plus habituels de méthodologie, l’ACS calcule le PIB libanais en utilisant les données fournies par la TVA, provenant de 40 000 entreprises, et l’indice des prix qu’elle publie chaque mois. L’administration suppose que le secteur informel, estimé selon les auteurs du rapport à 30 % du PIB, suit la même tendance que l’économie formelle.

Les secteurs

Pour revenir aux comptes nationaux de 2020, l’ACS a calculé que le PIB nominal (qui inclut l’effet de l’inflation) a atteint 95 700 milliards de livres (24,7 milliards de dollars sur base du taux de 3 878 livres le dollar), contre 80 200 milliards en 2019 (53,2 milliards de dollars au taux de change officiel de 1 507,5 livres).

Les chiffres de 2019 ont été révisés par rapport à ceux publiés il y a quelques mois. L’inflation a, elle, atteint 61,1 % en 2020, contre 4,1 % en 2019. Le PIB réel (sans inclure l’effet de l’inflation) s’est contracté de 25,9 %, contre -6,9 % en 2019 (un chiffre en légère hausse par rapport aux -7,2 % calculés en mars 2021).

Parmi les autres chiffres, le revenu national disponible (le PIB plus les transferts depuis et vers l’étranger) a atteint 111 000 milliards de livres en 2020, contre 82 600 milliards de livres en 2019. Les remises des expatriés représentent la plus grande partie de ces totaux et les transferts nets depuis l’étranger sont passés de 4 500 milliards de livres en 2019 pour atteindre 19 700 milliards de livres en 2020, soit 20,5 % du PIB de cette année.

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L’estimation de l’ACS est d’ailleurs pire que celle de la Banque mondiale (-21,4 % en 2020, publiée en octobre 2021) et celle du Fonds monétaire international (-25 %, publiée en octobre 2020).

Dans le détail, la consommation des ménages, qui contribue le plus au PIB d’un pays, s’est contractée de 27 %, alors que les dépenses de l’État ont augmenté de 5 %. L’investissement, qui contribue à une croissance future, a lui plongé de 63 %. Les exportations de biens et de services ont tous les deux connu une baisse, respectivement de 18 et de 46 %. Idem pour les importations de biens et de services, de l’ordre de 27 % et 51 %, respectivement.

Au niveau des secteurs, comme en 2018 et en 2019, c’est l’immobilier qui a représenté la plus grande part du PIB en 2020 (15 %), à égalité avec celui du commerce (15 %), suivi par l’industrie et l’administration publique (13 % chacun). Alors que le secteur financier, en particulier les banques libanaises qui étaient considérées comme la colonne vertébrale de l’économie libanaise, a contribué en 2020 à 9 % du PIB, soit autant que le secteur agricole, de l’élevage et de la pêche. L’éducation suit ensuite (7 %), l’aide domestique (6 %), les services aux entreprises (4 %), la construction (3 %), le transport (3 %), les hôtels et restaurants, la santé, l’information et la communication, les services administratifs (2 % chacun) et, enfin, les garages, l’électricité et l’eau (1 % chacun).

Additionnés, ces secteurs ont contribué à 108 % du PIB. L’ACS a ajouté à ce total une contribution de 17 % du secteur du fisc (les taxes et impôts) et a ensuite retiré l’effet négatif des subventions sur le PIB national, estimé à -25 %. En effet, depuis octobre 2019, la Banque du Liban subventionnait au taux officiel les importations de biens essentiels (blé, carburant et médicaments), tandis que le gouvernement avait décidé d’élargir ce programme à partir de mai 2020 aux denrées alimentaires et aux matières premières destinées à l’industrie et à l’agriculture.

Des programmes progressivement arrêtés en 2021, en raison de la baisse des réserves de devises de la Banque du Liban.

Les rues étaient vides lors du premier confinement au printemps 2020. Photo M.A.

Le secteur agricole est l’un des rares à avoir connu une croissance durant l’année 2020. Cela s’explique par un retour à la terre pour de nombreux Libanais, en particulier suite aux licenciements (un taux de chômage estimé à 40 % à fin 2020 par la Banque mondiale) liés à la fermeture de nombreuses entreprises en raison de la crise et de la pandémie. Le secteur de l’éducation a connu une croissance faible de 1 % et celui de l’immobilier est resté constant (0 %). Par contre, tous les autres ont subi une contraction, la plus forte étant celle des hôtels et restaurants (-76 %), suivis notamment par le secteur commercial (-54 %), de la construction (-50 %), de l’aide domestique (-49 %), de l’industrie agroalimentaire (-48 %), du transport (-26 %) ou encore de la santé (-14 %).

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Tous ces chiffres trahissent ainsi le ralentissement dû à la crise économique et financière qui a éclaté en 2019 (bien qu’elle date de 2018, selon l’ACS), aux confinements décrétés en 2020 pour lutter contre la pandémie, à l’explosion au port de Beyrouth qui a ravagé la moitié de la capitale, à la démission du gouvernement de Hassane Diab qui a ouvert une période de vacance, ou encore à l’échec des négociations avec le FMI, à qui le Liban avait adressé une demande d’assistance financière.

L’Administration centrale de la statistique (ACS), rattachée à la présidence du Conseil des ministres et qui est supposée publier tous les indicateurs socio-économiques du pays (inflation, pauvreté, etc.), a récemment divulgué les chiffres officiels du PIB réel pour 2020, en baisse de 25,9 % sur cet exercice en glissement annuel.Si cette mise à jour confirme le décrochage de...

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