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Politique - Liban

Le Parlement approuve la prolongation du "dollar étudiant" et du mandat des municipalités

Berry refuse de tenir une séance de vote de confiance au gouvernement réclamée par Mikati ; le texte controversé du contrôle des capitaux retiré de l'ordre du jour.

Le Parlement approuve la prolongation du

Le président du Parlement libanais, Nabih Berry, le 29 mars 2022 au palais de l'Unesco, lors d'une séance plénière de la Chambre. Photo Hassan Ibrahim/Flickr/Parlement libanais

Le Parlement, réuni mardi au palais de l'Unesco à Beyrouth pour une séance plénière et un ordre du jour de 30 points, a voté en faveur de l'extension du mandat des conseils municipaux jusqu'en mai 2023, alors que des élections municipales auraient dû se tenir en parallèle aux législatives du 15 mai. Les députés ont également approuvé la prolongation d'une loi sur le "dollar étudiant", un texte réclamé par les familles des jeunes qui poursuivent leurs études à l'étranger dans un contexte de grave crise au Liban. En outre, un projet de loi controversé instaurant un contrôle formel des capitaux pour légaliser et uniformiser les restrictions bancaires en place depuis fin 2019 avec le début de la crise financière, et qui faisait craindre une séance explosive ce mardi, a finalement été retiré de l'ordre du jour après avoir été rejeté la veille par les commissions parlementaires.

Vote de confiance
Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), le Premier ministre, Nagib Mikati, a demandé en début de réunion que la séance devienne un "débat général, à l'ombre des derniers développements dans le pays, afin qu'un vote de confiance au gouvernement ait lieu". Mais le président de la Chambre, Nabih Berry, l'a refusé : "Il s'agit d'une séance législative. Vous êtes le seul à formuler cette demande, et celle-ci ne m'a pas été transmise", a-t-il dit. M. Mikati a répondu en faisant valoir que "quelqu'un d'autre a également formulé cette demande", sans préciser à qui il faisait référence. Le Premier ministre n'a pas, non plus, expliqué ce qu'il entendait par "derniers développements dans le pays".


Toutefois, selon des propos tenus par M. Mikati durant la séance et rapportés par des médias locaux, le Premier ministre a affirmé "avoir entendu la veille des déclarations concernant un vote de la confiance au gouvernement (...) C'est pour cela que j'ai soulevé cette question aujourd'hui". "La solution ne peut pas être populiste de la sorte", a déploré le chef du gouvernement, à la fin de la réunion. "Je ne me laisserai pas entraîner vers une démission afin que cela ne constitue pas un obstacle à la tenue des élections parlementaires. C'est une bonne raison pour ne pas démissionner", a affirmé M. Mikati.

Municipales et "dollar étudiant"
La séance s'est alors poursuivie, et le Parlement a voté en faveur d'un projet de loi prévoyant de prolonger le mandat des conseils municipaux (et ceux des moukhtars) jusqu'au 31 mai 2023. Ce vote est intervenu après que le gouvernement a décidé de reporter cette élection qui devait se tenir parallèlement aux législatives du 15 mai. En septembre 2021, le Premier ministre avait affirmé que les élections municipales seraient "reportées", sans donner de raisons claires justifiant ce report, alors que des observateurs estiment possible l'organisation de ce scrutin parallèlement aux législatives.

Les députés ont, dans ce contexte, voté en faveur de l'ouverture d'une ligne de crédit supplémentaire "exceptionnelle" dans le budget de 2022, toujours pas adopté, pour couvrir les dépenses des législatives. Ces sommes devront être allouées aux budgets des ministères de l'Intérieur (260 milliards de livres libanaises) et des Affaires étrangères (60 milliards de livres).
Le ministre de l’Intérieur Bassam Maoulaoui avait demandé un crédit de 300 milliards de livres pour les législatives, et le gouvernement lui avait déjà accordé 40 milliards.

Les députés ont approuvé, d'autre part, en deuxième lecture et -en principe - avec des modifications, la loi prolongeant la durée d’application du "dollar étudiant". Institué pour la première fois en 2020 (loi n° 193/2020), ce dispositif légal permet aux parents d’étudiants libanais inscrits dans des universités à l’étranger de retirer des banques annuellement, et en principe depuis leurs comptes en devises, la somme de 10.000 dollars sur la base du taux de change "officiel" de 1.515 livres pour un dollar. Les comptes en devises concernés sont ceux en "dollars bancaires" dont l’accès a été limité par les restrictions unilatéralement mises en place par les banques depuis le début de la crise. Le Parlement avait décidé de prolonger ce dispositif en décembre 2021, pour englober les étudiants inscrits pour l'année universitaire 2021-2022. Mais la présidence avait refusé de signer la loi en mettant en avant des "failles légales et constitutionnelles". En janvier, Baabda a finalement renvoyé le texte au Parlement avec ses remarques pour une seconde lecture –comme le lui permet l’article 64 de la Constitution.

Selon certains médias, la mise en place d’un délai de 24h imposé au juge des référés pour émettre une décision de justice contre les banques ayant refusé d’appliquer cette loi figure parmi les amendements effectués, tout comme le fait que les étudiants qui répondent aux critères généraux d’éligibilité pourront en bénéficier pendant "toutes leurs années de spécialisation". Cette dernière modification reviendrait à ouvrir le dispositif permettant de contourner les restrictions bancaires aux étudiants éligibles pour une période allant au-delà de l’année universitaire 2021-2022.

Des familles de ces étudiants ont manifesté, mardi matin, près du Palais de l'Unesco avant le début de la séance, afin de faire pression sur les autorités. D'autres protestataires qui s'opposaient à la prolongation du mandat des conseils municipaux ont également manifesté près du siège de l'Unesco.

La Chambre a également approuvé une proposition de loi pour le soutien des médicaments localement produits. Elle a aussi voté en faveur d'une proposition de loi qui prévoit des indemnités aux proches des victimes de l'explosion d'une cuve d'essence à Tleil, dans le Akkar, le 15 août dernier. Ce texte prévoit aussi aux blessés souffrant d'handicap suite au drame de bénéficier de la Caisse nationale de sécurité sociale.

Le Parlement a par ailleurs amendé la loi 194 d'octobre 2020 relative à la protection des régions endommagées et sinistrées et à leur reconstruction suite à l'explosion au port de Beyrouth. Elle consiste à geler les transactions immobilières pour deux ans, afin d'empêcher la vente des biens immobiliers dans ces régions, dans l’attente de la mise en place d’un plan spécifique par le ministère de la Culture pour la reconstruction et la protection durable des bâtiments et quartiers historiques. La loi exemptait, entre autres, les ventes entre ascendants et descendants jusqu'au 4ème degré. Amendée par les députés, elle exempte dorénavant aussi les ventes entre époux. 

Contrôle des capitaux

La séance parlementaire s'est finalement  déroulée sans accroches, alors que le projet de loi sur le contrôle des capitaux faisait craindre des tensions. À la veille de la séance de la Chambre, ce texte – dont plusieurs versions intermédiaires ont fuité dans la presse ces derniers jours –  a été vivement critiqué par plusieurs acteurs institutionnels et de la société civile. Les commissions parlementaires – celle des Finances et du Budget, présidée par le député Ibrahim Kanaan (Courant patriotique libre, aouniste), et celle de l’Administration et de la Justice, présidée par le député Georges Adwan (Forces libanaises) – ont toutes deux rejeté lundi la dernière version du texte pour des "vices" aussi bien relatifs à sa forme qu’à son fond. Le projet de loi a donc finalement été retiré de l'ordre du jour. Néanmoins, le Conseil des ministres devrait se pencher sur ce texte demain mercredi lors d'une séance prévue au palais présidentiel de Baabda.

Les commissions parlementaires ont notamment dénoncé le fait que le document n’émanait pas du gouvernement – il a été rédigé par l’équipe de négociateurs chargée de discuter avec le Fonds monétaire international (FMI), composée du vice-Premier ministre, Saadé Chami, du ministre des Finances, Youssef Khalil, celui de l’Économie et du Commerce, Amine Salam, ou encore du gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé. Cette équipe a officiellement relancé en octobre 2021 les contacts entamés par le Liban avec l’organisation internationale en vue d’obtenir une assistance financière devant l’aider à sortir de la crise qu’il traverse depuis plus de deux ans. De plus, les commissions se sont aussi opposées à plusieurs éléments de fond, dont l’article instaurant une commission ad hoc chargée de fixer, librement et pendant trois ans, la voilure des différentes restrictions bancaires, sans que celles-ci ne puissent être contestées d’une manière ou d’une autre. Du côté de la société civile, des représentants des professions libérales dénoncent notamment l’article instituant la commission ad hoc, à qui le projet de loi attribue trop de prérogatives à leurs yeux. Ils critiquent également le fait que ce projet de loi soit envoyé au Parlement sans que cela ne s’inscrive dans un plan de redressement économique global.

"Il n'y a pas eu d'accord sur (le projet de loi sur) le contrôle des capitaux en raison d'une absence de décision politique", a estimé mardi le député Nicolas Nahas. "La version proposée a obtenu l'aval du Fonds monétaire international", a-t-il affirmé.

Le président Berry a levé la séance peu avant 13h30, après le défaut de quorum, avant que tout l'ordre du jour ne soit examiné. Selon l'Ani, 13 projets et propositions de loi qui y figuraient ont finalement été approuvés.

Le Parlement, réuni mardi au palais de l'Unesco à Beyrouth pour une séance plénière et un ordre du jour de 30 points, a voté en faveur de l'extension du mandat des conseils municipaux jusqu'en mai 2023, alors que des élections municipales auraient dû se tenir en parallèle aux législatives du 15 mai. Les députés ont également approuvé la prolongation d'une loi sur le "dollar...

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