Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a appelé les dirigeants à tenir les élections législatives et la présidentielle dans les délais, dans une homélie prononcée mercredi à l'occasion de la Saint-Maron devant le président Michel Aoun, le président du Parlement, Nabih Berry, et le Premier ministre, Nagib Mikati. Des craintes quant à un report du scrutin du 15 mai de la part des partis au pouvoir sont exprimées dans divers milieux alors que le Liban poursuit son effondrement socio-économique.
"En cette occasion religieuse et nationale, nous renouvelons notre foi dans le Liban malgré les défis (...). En votre présence, nous (affirmons que nous) attendons avec impatience (la réalisation de) ces cinq priorités", a déclaré Mgr Raï avant d'énumérer : "la tenue d'élections législatives et de la présidentielle dans leurs délais constitutionnels, la vérité sur les explosions du port de Beyrouth, l'accélération du processus de réforme et de l'entente avec le Fonds monétaire international, la mise en œuvre de l'accord de Taëf, et l'adoption du système de la neutralité positive comme base dans nos relations extérieures".
Les législatives prochaines sont perçues par nombre de Libanais comme une opportunité de changement au sein de la classe au pouvoir, accusée d'être responsable de l'effondrement socio-économique inédit dans le pays. Mais plusieurs voix expriment des craintes quant à un report du scrutin, alors que les partis politiques traditionnels voient leur popularité en perte de vitesse après plus de deux ans d'une crise qui a poussé les trois-quarts de la population dans la pauvreté.
Le patriarche maronite a aussi appelé à "combler les lacunes qui résultent de Taëf et à solliciter l'assistance des Nations Unies pour convoquer une conférence internationale". "Les maronites du Liban ont fait de la liberté leur projet spirituel, social et politique, et ils ont suivi Saint Maron pour ses valeurs. Ainsi, le maronitisme apparaît en nous lorsque nous adoptons les valeurs de vigueur et de dignité, et il se termine lorsque nous sommes possédés par la haine", a-t-il conclu.
Dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux, l'on peut voir que l'arrivée du président Aoun à l'église Saint-Maron à Gemmayzé, a été saluée par ses partisans qui ont crié : "Dieu, Liban, et Aoun uniquement".
De son côté, l'archevêque maronite de Beyrouth, Mgr Boulos Abdel Sater, a rendu hommage à Beyrouth "qui résiste à l'injustice en se tenant du côté des faibles, des opprimés, des marginalisés et en recherchant la vérité, en particulier la réalité des explosions du 4 août 2020".
La déflagration au port a été provoquée par un incendie dans un hangar contenant des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockés depuis 2014, au vu et au su de nombreux dirigeants et responsables administratifs. Ces responsables réclament le dessaisissement du juge Tarek Bitar en charge de l'enquête. Dernièrement, le départ à la retraite d’un membre de l’assemblée plénière de la Cour de cassation a fait perdre à cette instance le quorum requis pour la tenue de ses réunions, alors même que c'est elle qui est compétente pour statuer sur les actions en responsabilité de l’État contre "les fautes lourdes" des magistrats. L'assemblée plénière ne peut donc plus désormais se pencher sur de tels recours, dont le dernier en date a été présenté le 3 décembre par l’ancien ministre des Travaux publics, Youssef Fenianos, objet d’un mandat d’arrêt par contumace à l'instar d'autres actuels et anciens responsables politiques.
Tous des hérétiques !
12 h 28, le 10 février 2022