On aurait tort de s’en moquer, de ne pas le prendre au sérieux, de ne voir dans son succès provisoire qu’une simple bulle médiatique qui serait, une fois l’effet passé, aussi vite oubliée. Quel que soit le résultat du scrutin, la candidature d’Éric Zemmour restera l’un des principaux évènements de l’élection présidentielle française. Son envolée dans les sondages, qui s’est récemment essoufflée, sa capacité à cristalliser les débats et à imposer ses thèmes de prédilection au cœur de la campagne en disent beaucoup sur l’état de la France. Non pas que le pays tout entier soit obsédé par « le péril musulman » et par le retour d’un passé mythifié, non pas non plus que les Français, dans leur majorité, soient séduits par un discours rance et caricatural, mais plutôt que le polémiste a réussi mieux que quiconque à mettre le doigt sur un nerf extrêmement sensible, malmené et manipulable à souhait : l’identité.
L’époque est au malaise identitaire, et la France ne fait pas exception. La dynamique est globale et perceptible aussi bien dans la Turquie d’Erdogan que dans la Russie de Poutine, dans l’Amérique de Trump, dans la Chine de Xi ou dans le Brésil de Bolsonaro. Le cas français a toutefois quelque chose de particulier. Ici, il ne s’agit pas de revanche sur l’histoire ou d’exaltation d’un nationalisme outrancier, mais plutôt d’une perte de repère en réaction au déclin d’un modèle républicain qui se pensait à la fois universel et intemporel, et qui se révèle dépassé par les enjeux que pose une société multiculturelle dans un espace mondialisé. Le rapport à l’autre est d’autant plus délicat que cette spécificité française est surplombée par une histoire coloniale qui continue de peser sur les relations avec les personnes issues de l’immigration.
C’est parce que ce qui constitue le socle commun de l’identité française ne paraît plus évident pour de larges pans de la population qu’Éric Zemmour a pu devenir en quelques semaines un candidat potentiellement capable de se hisser au second tour de la présidentielle. L’ancien journaliste est un redoutable prédicateur, un populiste d’extrême droite qui offre une vision simple et étriquée, mais aussi – dans son sens le plus étroit – cohérente, de l’identité française à une population en mal de repères. Il le fait en désignant les musulmans, ce corps qu’il considère être étranger à la France, comme l’ennemi absolu, celui qui fait peser une menace existentielle sur la nation et qui constitue la cause de tous les maux. Tout est ainsi mélangé au service d’une idéologie essentialisant aussi bien le « bon Français » que le musulman, perçu comme un individu en tant que tel seulement s’il s’éloigne de sa foi.
Les idées du candidat Zemmour se propagent sur un terrain fertile. La montée de l’islamisme dans toutes ses formes, les attentats jihadistes, les questions que pose une certaine pratique de l’islam, à l’instar du port du voile, au modèle assimilationniste français, le sentiment de rupture d’une partie de la jeunesse issue de l’immigration française et les faits de délinquance auxquels elle est parfois associée sont des phénomènes complexes et distincts, discutables d’un point de vue scientifique, mais qui sont devenus ces dernières années des perceptions profondément ancrées dans l’imaginaire collectif. En mélangeant tous ces sujets et en alimentant un climat de guerre civile, Éric Zemmour verse un bidon d’essence sur le feu. S’il répond à un malaise réel, qu’une partie de ses adversaires se complaît à ignorer, il le fait de la pire des manières, celle qui prône les valeurs de la République tout en opposant les citoyens les uns aux autres, qui évoque en permanence la grandeur de la France tout en la réduisant à une image d’Épinal, qui idéalise le monde d’hier tout en ignorant volontairement les enjeux d’aujourd’hui et de demain.
« La France ne doit pas devenir le Liban », se plaît à répéter Éric Zemmour, qui en fait l’antimodèle par excellence. Cela ne l’empêche pas de jouir d’une petite popularité au pays du Cèdre, en particulier dans certains milieux chrétiens trop contents de voir un candidat libéral sur le plan économique faire de l’immigration et du combat contre l’islam l’essence de son engagement politique. Les Libanais devraient pourtant être vaccinés contre les ravages des passions identitaires. Ils devraient être lucides, plus que n’importe quel autre peuple, sur les dangers d’une instrumentalisation de celle-ci au service d’un projet politique. Ils devraient savoir, enfin, que la pluralité est une matière vivante, en constante évolution, dont on peut tirer le pire comme le meilleur.
P.-S. : L’Orient-Le Jour vous propose au cours de ces prochains jours une série de trois articles pour comprendre les tenants et les aboutissants du « phénomène Zemmour ».
C'est un article écrit avec beaucoup de mauvaise foi et de parti pris contre le seul candidat honnête et sincère de la campagne Présidentielle en France. Déjà, Z n'est pas d’extrême droite mais Républicain de droite comme le Général de Gaule. Il est encore moins populiste que tous les autres, y compris Macron, car ce qu'il dit est vrai, prouve et argumente. Le populiste dit des bêtises et se sert de mensonges pour étayer ses dire. Pour finir il n'est aucunement anti musulmans et ne jette pas d'opprobre sur ceux qui se sont très bien assimiles et respectent les lois Françaises. Il a été très clair la dessus d'ou le soutient de beaucoup de musulmans français qui sont totalement d'accord avec lui. Il a tout a fait raison de faire le parallèle entre le Liban et la France car notre pays, que cela vous plaise ou pas, est passé par cette période de transition depuis bien avant la France et nous en voyons le résultat aujourd'hui. Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Il me semble que Z connait notre histoire mieux que vous. C'est accablant car si les biens pensants de notre pays sont aussi ignorants en la matière que ceux de la France nous sommes dans de beaux draps ! Pour finir, je vous rappelle la fameuse phrase de feu le Président Bachir Gemayel: " Il faut toujours dire la vérité aussi dure soit elle ...". J’espère que son sacrifice VOUS a appris que la vérité est une vertu.
10 h 36, le 19 janvier 2022