
Le président Michel Aoun lors de son discours télévisé hier. Photo Dalati et Nohra
Le discours, attendu, du chef de l’État, Michel Aoun, a créé la surprise hier, moins par le ton employé – calme et pondéré –, que par les dossiers évoqués comme la stratégie de défense qu’il a appelé à remettre sur la table d’un dialogue national, une promesse faite par Michel Aoun au début de son mandat mais plus jamais évoquée depuis. L’importance du discours tient donc surtout au timing. Car remettre aujourd’hui la stratégie de défense nationale sur le tapis n’est certainement pas anodin, à l’heure où l’accord de Mar Mikhaël semble sérieusement s’effriter. « Il est vrai que la défense de la patrie nécessite une coopération entre l’armée, le peuple et la résistance, mais la responsabilité première en revient à l’État. Seul l’État fixe la stratégie de défense et veille à sa mise en œuvre », a lancé le président dans ce qui est apparu comme un revirement notable.
Alors que son mandat approche de son terme et bute contre une paralysie quasi totale des institutions du pays, le président a effectué une sorte de bilan des responsabilités. Il a ainsi défendu son sexennat et dénoncé les blocages notamment des réunions du Conseil des ministres et du travail de la justice, des manœuvres attribuées à son partenaire chiite, le Hezbollah, qu’il a toutefois évité de nommer tout au long de son discours. Le président n’a donc pas ménagé son allié chiite comme annoncé la veille dans ses milieux. Mais il n’a pas été trop loin non plus, évitant la confrontation, une tâche qu’il réserve vraisemblablement à son beau-fils, le chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil, dont un discours est annoncé pour le 2 janvier prochain. « Je ne veux de conflit avec personne – ni individus ni partis politiques – et je ne veux démanteler l’unité d’aucune communauté. Cependant, je le dis clairement : tourner en rond est fatal pour le pays et je n’accepterai pas d’être témoin de la chute de l’État et de l’étouffement du peuple », a martelé Michel Aoun, appelant à « un dialogue national urgent ».
Convenu en amont entre le président et son gendre, ce jeu de rôle n’aurait vraisemblablement d’autres objectifs que de tenter de faire plier d’une manière ou d’une autre leur partenaire chiite, avec lequel les relations se sont récemment détériorées comme jamais auparavant, à quelques mois de deux échéances cruciales : les législatives en mai 2022 et la présidentielle quelques mois plus tard. Alors que l’on croyait l’accord d’entente conclu entre le CPL et le Hezbollah en 2006 sacré et leur alliance indéfectible, notamment du fait des avantages qu’elle apportait aux deux formations, la situation a nettement changé ces dernières semaines. Ce sont surtout l’enquête sur la double explosion au port de Beyrouth que le Hezbollah et son allié, le mouvement Amal, cherchent à torpiller depuis que de hauts responsables chiites sont mis en cause, puis la non-décision du Conseil constitutionnel dans l’affaire du recours présenté par le CPL pour invalider des amendements introduits à la loi électorale sous l’impulsion du chef du Parlement, Nabih Berry, qui ont constitué la goutte de trop. « Ces deux derniers coups assénés par le Hezbollah au CPL ont fini par mettre Gebran Bassil hors de lui », confie une source aouniste. Michel Aoun n’a d’ailleurs pas caché son mécontentement à ce sujet, dénonçant « l’obstruction qui a frappé le Conseil constitutionnel ». « Il est devenu de notoriété publique qui est à l’origine de cette obstruction », a-t-il lancé, en référence à Amal et au Hezbollah. Dans les milieux du Hezbollah, on se défend d’avoir contribué à ce résultat que le CPL considère comme une manœuvre destinée à l’affaiblir encore plus.
Un fardeau
Depuis que la base chrétienne aouniste, révoltée par la tragédie du 4 août, a haussé le ton pour dénoncer une alliance devenue trop lourde à porter, le Hezbollah est devenu pour le CPL un fardeau, tout en restant cependant un allié indispensable pour la bataille des législatives qui s’annonce difficile. Le parti chiite tient Gebran Bassil, dont la popularité est en baisse vertigineuse, à la gorge. Le CPL, qui ne peut espérer obtenir plus d’une douzaine de députés au Parlement aux prochaines élections, a besoin d’un appoint ponctuel du Hezbollah pour augmenter les membres de son bloc de 4 à 5 députés de plus selon les estimations, notamment dans la Békaa-Ouest, la Békaa-Nord ou à Beyrouth II.
« Gebran Bassil est en train de peser le pour et le contre pour voir si en définitive la poursuite du partenariat en vaut le coup », avance un proche du chef du CPL. Depuis une dizaine de jours, les rumeurs sur l’annonce prochaine d’un divorce avec le Hezbollah se sont intensifiées. Des figures de proue du CPL estiment que c’en est fini de l’accord d’entente de 2006 et que M. Bassil ne cesse de répéter devant ses proches qu’il est déterminé à couper le cordon ombilical qui relie les deux formations. Des informations non officielles à ce jour que des analystes apparentent à du chantage. En brandissant cette menace, le chef du CPL – qui garantissait jusque-là une couverture chrétienne à un parti mis à l’index par l’Occident – espère pouvoir améliorer sa position dans les négociations avec le Hezbollah et lui arracher des compromis.
C’est ainsi que l’on peut interpréter les pourparlers en coulisses qui, selon plusieurs informations de presse, auraient récemment eu lieu entre M. Bassil et Wafic Safa, responsable du comité de coordination du parti chiite, dans le cadre d’un tête-à-tête au cours duquel ont été évoquées les questions litigieuses. Une réunion qui aurait cependant eu lieu avant un meeting du chef du CPL qui a tancé, sans le nommer, le Hezbollah. « Le jour où on aura besoin de tirer notre force des autres, mieux vaut que l’on existe plus. Nous sommes forts par nous-mêmes », avait déclaré M. Bassil devant une audience qui lui est acquise. Le discours que l’un des participants a filmé aurait volontairement filtré il y a cinq jours dans l’intention d’envoyer un message de mécontentement au parti chiite.
Dans les milieux du Hezbollah, le mot d’ordre hier était au mutisme total. Personne ne devait s’exprimer sur ce sujet, en tous les cas pas avant que le président Michel Aoun n’ait dévoilé ses cartes. « Il y a une compréhension des raisons du mécontentement des aounistes », se contente de souligner Fayçal Abdel Sater, analyste politique proche de la ligne du parti, comme pour dire que le Hezbollah serait disposé à lâcher du lest. Pour Kassem Kassir, un autre analyste issu du même milieu, le ton du président n’était pas à la provocation. « Il n’a coupé les ponts avec personne, mais s’est contenté de dresser un bilan de la situation », a-t-il commenté.
Dans les milieux du CPL, on affirme toutefois que le discours du président a pour objectif de paver la voie à celui que tiendra Gebran Bassil le 2 janvier. En attendant, le Hezbollah aura eu amplement le temps de faire un pas, s’il le désire, en direction du camp aouniste. À défaut, le CPL optera pour l’escalade qui pourrait aller jusqu’à l’annonce d’un divorce, fait-on valoir.
commentaires (28)
LE PRESIDENT A RATE LE SEUL DISCOUR QUI AVAIT FAIT FREMIR DE JOIE LE PEUPLE CAR IL ALLAIT DIRE SES 4 VERITES A NASRALLAH MALHEUREUSEMENT UNE VISITE D'UN DELEGUE DE HEZBOLLAH AU GENDRE DANS LA NUIT A FAIT CHANGE LE DISCOUR EN UNE EXPLICATION DE LA SITUATION OU TOUT LE MONDE EST RESPONSABLE SAUF LUI, PAUVRE PRESIDENT SANS AUCUN POUVOIR ( MEME DE TELEPHONER AU CHEF DE L'ARMEE POUR QU'IL AILLE VOIR CE DEPOT 12, 15 JOURS AVANT L'EXPLOSION ) LA VERITE: JE COMMENCE A AVOIR PITIE DE LUI PLUS QUE DE LUI REPROCHER SA DESASTREUSE PRESIDENCE QUI A AMENE LE PAYS EN ENFER ( ALORS QU'IL L'AVAIT BIEN PREDIT IL Y A UN AN MAIS N'A RIEN FAIT POUR ARRETER CETTE CHUTE) L'AGE PROBABLEMENT ET UN GENDRE DES PLUS NULS EN SONT PEUT ETRE LA CAUSE POUR NE PAS DIRE PLUS ET RISQUER D'ETRE CENSURE
LA VERITE
16 h 16, le 30 décembre 2021