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Société - Éducation

Prolongement des vacances de Noël, une décision justifiée mais coûteuse

Les autorités craignent fortement une propagation rapide du Covid-19 ; interrogations sur le rattrapage du retard éducatif des élèves après deux années de confinement.

Prolongement des vacances de Noël, une décision justifiée mais coûteuse

Le marathon de samedi dernier a permis à plus de 5 100 personnes de se faire administrer le vaccin. Photo Michel Hallak

Des vacances scolaires de Noël de 24 jours ! L’annonce du ministre de l’Éducation Abbas Halabi en milieu de semaine dernière est pour le moins surprenante. Après deux années de confinement pour cause de Covid-19 durant lesquelles l’enseignement en ligne a montré ses limites, et une rentrée scolaire retardée par la grève des enseignants du public, les élèves venaient à peine de reprendre leur rythme de croisière. Une semaine supplémentaire de cours leur aurait indéniablement permis de combler quelques lacunes. Mais la décision est tombée, irrévocable : « Les vacances de Noël et du Nouvel An débuteront jeudi 16 décembre au soir (au lieu du 23 décembre) et se prolongeront jusqu’au lundi 10 janvier 2022 au matin », a souligné le ministre.

Taux de vaccination : moins de 40 %
Cette décision d’avancer la date des vacances scolaires d’une semaine a été prise au terme d’une réunion de la commission nationale chargée du suivi de la pandémie de coronavirus. Avec, pour raison, l’augmentation du nombre de cas de Covid-19, 1 452 nouvelles contaminations le 2 décembre, et 10 décès pour la seule journée de vendredi. Une réalité qui a poussé nombre d’établissements scolaires à fermer des classes, voire des bâtiments entiers pour une bonne semaine, après la détection de nouveaux cas parmi les élèves et le personnel enseignant. C’est dire l’inquiétude des autorités de voir la pandémie reprendre du terrain au début de l’hiver, les hôpitaux venir à saturation et le nombre de morts, 8 755 au total depuis mars 2020, atteindre de nouveaux records.

En ces temps de crise multiple particulièrement aiguë, le système de santé est au plus bas, particulièrement fragilisé par l’effondrement de la livre libanaise et l’explosion du 4 août 2020 au port de Beyrouth. Il souffre aussi de l’exode massif du corps médical et infirmier. Se profile de plus l’arrivée au Liban du variant Omicron, détecté pour la première fois en novembre dernier en Afrique du Sud. Un variant qui inquiète, car il se propagerait encore plus rapidement que le variant Delta, pour l’instant majoritaire. « Nous pensons que le variant Omicron se propage deux fois plus que le variant Delta, déjà connu pour sa propagation rapide », explique à L’Orient-Le Jour le ministre de la santé, Firas Abiad. Pour l’Organisation mondiale de la santé contactée par le journal, « les informations ne sont pas encore claires quant à la transmissibilité, la dangerosité du variant Omicron, ou l’efficacité des vaccins actuels contre ce variant. » Elle mène les études nécessaires dans ce sens.

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À cette crainte, s’ajoute le très faible taux de vaccination. « Moins de 40 % de la population a reçu les deux doses de vaccin », regrette le Dr Abiad. C’est dans ce cadre qu’une nouvelle campagne de vaccination a démarré, après un don de la France de 500 000 doses de Pfizer et « l’achat par les autorités d’un million de doses » environ. La seule journée de samedi a permis de vacciner plus de 5 100 personnes à travers le pays, lors d’un marathon de vaccination. L’objectif étant d’encourager « les personnes vaccinées depuis plus de cinq mois à recevoir la troisième dose », et « les personnes non vaccinées » à recevoir leur première dose afin d’empêcher la propagation du virus. « Il est important de rappeler que 80 % des décès dus au Covid-19 concernent des personnes non vaccinées », insiste le ministre.

Profiter des vacances
Pour son collègue à l’Éducation, la décision d’avancer les vacances de Noël découle d’une grande peur face aux risques de propagation du coronavirus. « Non seulement les contaminations sont en augmentation importante, mais selon les informations dont nous disposons, le Liban pourrait être touché d’ici à une semaine par le nouveau variant », révèle-t-il. « D’où la nécessité de placer l’éducation en état d’alerte. » Abbas Halabi fait partie de ces défenseurs de la thèse selon laquelle l’école en présentiel n’est pas responsable de la propagation du Covid-19. Il aurait même voulu, dit-il, « n’accorder qu’une semaine de vacances à Noël ». Car l’école publique a accumulé du retard après un démarrage entaché par une grève d’enseignants. « Nous n’avons eu d’autre choix que de nous soumettre à la recommandation des instances sanitaires, parmi lesquelles le ministre de la Santé », regrette-t-il. En même temps, « ce congé prolongé doit être l’occasion pour les enseignants, les élèves à partir de l’âge de 12 ans, les professeurs universitaires et les étudiants de se faire vacciner ». « Nous œuvrons dans ce sens », promet-il, faisant état d’une campagne de sensibilisation au sein des établissements éducatifs pour inciter parents d’élèves et enseignants à faire preuve de responsabilité. « Nous en avons les capacités », assure M. Halabi.

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À l’approche des fêtes, la décision se veut rassurante. Elle s’accompagne de nouvelles restrictions annoncées le 1er décembre courant, afin d’éviter une réédition du scénario catastrophe de janvier 2021, lorsque les contaminations avaient flambé. Au menu de ces restrictions notamment, l’imposition d’un pass sanitaire dans les lieux publics et l’interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes. En début d’année, les autorités promettent davantage de durcissement, comme l’interdiction d’entrer dans une administration publique sans pass sanitaire. Quant à l’option d’un nouveau confinement, elle est écartée pour l’instant. Pour le président de l’ordre des médecins, Charaf Abou Charaf, la fermeture momentanée des écoles était un must. « Il ne fait aucun doute que le nouveau variant arrivera bientôt au Liban », estime-t-il. « Et ce qui se déroule à l’étranger en ce début d’hiver touchera forcément le pays », ajoute-t-il, évoquant la flambée des cas en Europe. D’où « la nécessité impérative » de mettre les élèves en congé préventif le plus rapidement possible, les hôpitaux privés et publics n’ayant plus la possibilité de soigner les patients du Covid-19. « À l’étranger, le système de santé est solide. Au Liban, il est en grande souffrance depuis la crise. Et en cas d’afflux de patients contaminés, l’effondrement guette ce système », met-il en garde. C’est dire l’inquiétude ambiante, liée non seulement « aux ressources financières en chute libre des hôpitaux, mais aussi au manque de médicaments et d’oxygène, au départ de quelque 2 500 médecins et d’autant d’infirmières et infirmiers ». « Nous craignons que le nouveau variant ne fasse des ravages », avoue le président de l’ordre.

Les réunions familiales

Il faut aussi reconnaître que le Covid-19 prenait de l’ampleur en milieu scolaire. « Certains établissements ont connu une flambée des cas », constate le Dr Assem Araji, président de la commission parlementaire de la Santé. « Ils ont totalement ignoré les recommandations sanitaires, l’obligation de porter des masques, le respect des gestes barrières, la désinfection des mains, des surfaces et des locaux… », se désole-t-il, reconnaissant le manque de moyens, particulièrement en milieu rural. « Indéniablement, les écoles sont un lieu de circulation du virus au Liban, comme à l’étranger », note le praticien, appelant les directions scolaires et les parents d’élèves à davantage de responsabilité, insistant aussi sur la nécessité « d’améliorer les taux de vaccination ».

Petit bémol à la mesure officielle, son timing. « Cette décision est nécessaire, mais prématurée. Il aurait été préférable de prolonger le congé scolaire après les fêtes », commente Hyam Fawaz, directrice de l’école officielle de Tebnine. Car, rappelle-t-elle, « c’est durant la période festive que les familles se réunissent et que le virus circule le plus ». « C’est donc en janvier que les conséquences seront visibles », craint-elle. Malgré les restrictions liées au Covid-19, « un véritable casse-tête parfois », l’établissement aurait bien tiré profit de cette semaine avant les fêtes pour combler certaines lacunes. « Nous nous battons contre le temps pour donner le meilleur à nos élèves », résume-t-elle.

Sans commenter la mesure officielle, l’Organisation mondiale de la santé au Liban contactée par L’OLJ rappelle que sa position sur le confinement reste inchangée. « Ces mesures peuvent être efficaces, mais elles sont très coûteuses. Elles ne devraient être utilisées qu’en dernier recours. Et si un gouvernement décide de les mettre en œuvre, elles devraient être aussi ciblées que possible », souligne l’organisation, invitant les gouvernements à renforcer les capacités de santé publique. Quant aux recommandations concernant les enfants et adolescents, l’OMS souligne qu’ils peuvent attraper et transmettre le virus, avec une incidence moindre chez les plus jeunes. « D’où la nécessité de protéger par les gestes barrières et de vacciner les populations présentant des facteurs de risque, adolescents compris. » Et si la vaccination est désormais ouverte aux enfants dans nombre de pays pour réduire la transmission du virus, l’OMS recommande plutôt « la distribution équitable du vaccin aux populations à haut risque ».

Des vacances scolaires de Noël de 24 jours ! L’annonce du ministre de l’Éducation Abbas Halabi en milieu de semaine dernière est pour le moins surprenante. Après deux années de confinement pour cause de Covid-19 durant lesquelles l’enseignement en ligne a montré ses limites, et une rentrée scolaire retardée par la grève des enseignants du public, les élèves venaient à peine de...

commentaires (2)

Il y a tellement de mesures de restriction des libertés au Liban que RENDRE LA VACCINATION OBLIGATOIRE sera une mesure de salut public

Lecteur excédé par la censure

08 h 48, le 06 décembre 2021

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Commentaires (2)

  • Il y a tellement de mesures de restriction des libertés au Liban que RENDRE LA VACCINATION OBLIGATOIRE sera une mesure de salut public

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 48, le 06 décembre 2021

  • Lebanon needs to start vaccinating children aged 5-11, in addition to children and adolescents 12 years and older, to keep schools open. When schools don't follow infection control measures, such as masking, distancing, hand-washing, environmental cleaning, and good ventilation, then schools can have outbreaks and children propagate the virus to their families and communities. Only if infection control measures are followed are schools considered a minor driver of viral spread.

    Mireille Kang

    03 h 36, le 06 décembre 2021

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