Cette facilité avec laquelle dans ce pays on passe d’une tuile à l’autre, en zappant à chaque fois la précédente ! Oubliée déjà, la démission du Croupier au million, dont la bave télévisée a provoqué une hyperthermie chez les Saoudiens. Expédiée aux calendes grecques, la négociation avec les Hébreux sur les hydrocarbures encore virtuels, autour de laquelle les Libanais ont voulu finasser pour finalement l’avoir dans le baba. Délaissée pour l’heure, l’empoignade homérique sur le sort réservé au juge Biton du Port, qui se la coule douce en attendant que les vieux débris de la politique s’accordent sur une entourloupe pour le mettre au placard.
Aujourd’hui, la mode est aux élections législatives, une pantalonnade régulière qui chaque fois s’accompagne des prétextes les plus farfelus pour les faire sauter. Déjà aux temps glorieux d’avant la dèche, on faisait gober à la piétaille qu’il n’était pas question de voter en raison de la situation régionale délicate, ou parce qu’on n’avait pas la tête à ça au vu de la douleur profonde causée par l’occupation de la Palestine, ou encore pour des raisons de sécurité parce que les Israéliens avaient fait main basse sur les analyses d’urine du président de la République… Autant de motifs bidon pour fabriquer des Parlements à prolonge et rallonge bidonnants.
Le train électoral ne s’est pas encore ébranlé que déjà les rigolos du landerneau politique se bousculent au portillon. Si la distribution des candidats relève encore du secret d’État, on sait en gros que la nouvelle cuisine comprendra des barbus, des imberbes, un ou deux bidasses à la retraite et quelques moustachus. Voilà pour les idées. Pour le reste, en attendant que le Mollasson du Futur se décide, il n’y aura de l’animation que chez les chrétiens, mais faudra suivre ! Entre le Basileus qui se cherche, le Tondu qui s’est retrouvé et les neuneus du 17 Octobre qui se savonnent mutuellement la planche, l’électeur aura le choix entre chouiner et ricaner.
Au Liban-Sud, la recette est pliée d’avance sous le haut patronage du Sayed barbu et de l’Istiz imberbe, deux spécialistes de la concertation dans le monologue. C’est ce qu’on appelle le mariage du gazon jugal et de l’épithélium glabre. Avis aux commerçants qui s’aventureraient encore à vendre de la crème à raser : le règne du poil se confirme… même s’il est éminemment rasoir. Quant aux listes électorales, elles promettent une masculinité très testostéronée. Il est vrai que dans ces contrées viriles, la seule parité autorisée s’articule autour d’un suspense insoutenable : barbe noire ou barbe blanche ? Une angoisse toutefois atténuée par l’existence de candidats poivre et sel mal rasés, laissant présager des programmes électoraux plus modérés.
Bref, liberté, démocratie et alternance politique sont priées en 2022 de faire demi-tour aux frontières du Liban décrépit.
gabynasr@lorientlejour.com
commentaires (8)
"l’électeur aura le choix entre chouiner et ricaner."... inégalable...mina'al massaibou ma youdhikou...wa yaktoulou...
Wlek Sanferlou
14 h 06, le 03 décembre 2021