Cinquante jours après la dernière réunion de son gouvernement, paralysé depuis le 12 octobre par une profonde crise politique dans un pays déjà en lambeaux économiquement, le Premier ministre Nagib Mikati a indiqué mercredi qu’il « hésitait encore à convoquer le Conseil des ministres », les désaccords avec le tandem chiite Hezbollah-Amal n’ayant toujours pas été réglés. Lors d’une allocution durant la cérémonie de lancement de la plateforme d’inscription pour la carte d’approvisionnement destinée aux familles les plus pauvres, M. Mikati a exprimé l’espoir que « tout le monde sera convaincu de la nécessité de garder le gouvernement à l’écart de tout ce qui ne le regarde pas ». Une claire allusion à l’enquête sur la double explosion meurtrière au port de Beyrouth, le 4 août 2020, dossier principal en raison duquel les ministres chiites boycottent le cabinet tant que celui-ci n’aura pas pris une décision de mettre à l’écart le juge chargé de l’instruction, Tarek Bitar.
Selon des propos rapportés par l’Agence nationale d’information (Ani, officielle), le chef du gouvernement a rappelé que « nous nous étions mis d’accord pour une justice indépendante, et que tout différend se règle en justice, en vertu de la Constitution, sans aucune ingérence politique ». Une pique adressée au Hezbollah et ses alliés qui réclament le dessaisissement du juge Bitar qui a lancé des poursuites contre des responsables politiques de tous bords, notamment certains qui sont affiliés au tandem chiite.
« Course contre la montre »
Nagib Mikati a affirmé qu’il « œuvre pour aboutir à une solution » et qu’il « soutient toute action qui mène à un rapprochement des points de vue ». Il a ajouté qu’il « mise sur la sagesse et la vigilance de tous, au vu de la situation délicate et la nécessité d’intensifier les efforts pour traiter les dossiers essentiels relatifs à la crise économique, sociale et financière ». « Le travail gouvernemental se poursuit à une cadence soutenue et intense, alors que nous sommes dans une course contre la montre sur les plans économique, financier et social, a-t-il poursuivi. Sur ces plans, nous avons enregistré des avancées, notamment en ce qui concerne les négociations avec le Fonds monétaire international, la crise du secteur de l’électricité et d’autres dossiers administratifs. » « Lorsque les réunions du cabinet reprendront, bientôt si Dieu le veut, tous ces dossiers seront évoqués et approuvés », a promis le Premier ministre. « Lors de toutes les réunions que j’ai tenues à l’étranger, et tous les meetings diplomatiques auxquels j’ai pris part, on nous répétait qu’il fallait que nous nous aidions nous-mêmes afin qu’on nous aide », a rappelé M. Mikati, reprenant une formule que le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, avait adressée aux dirigeants libanais à plusieurs reprises. « Ces propos montrent le niveau de responsabilité qui incombe à tous les dirigeants au Liban pour qu’ils coopèrent en vue du redressement du pays », a estimé le Premier ministre.
Entretien avec Aoun
L’équipe ministérielle de Nagib Mikati est placée dans un coma artificiel, alors qu’elle est censée lancer une série de réformes afin de freiner l’effondrement socio-économique et financier dans le pays. Outre la crise politique liée à l’affaire de l’enquête du port, la crise diplomatique aiguë avec les pays du Golfe est venue compliquer la situation encore plus. De nombreux responsables, dont le chef du gouvernement et le chef de l’État, souhaitent la démission du ministre de l’Information Georges Cordahi, dont des propos hostiles à la guerre au Yémen ont déclenché la brouille diplomatique. Mais le ministre, soutenu par le Hezbollah, refuse jusque-là d’obtempérer.
Avant la cérémonie au Grand Sérail, Nagib Mikati s’était rendu au palais présidentiel de Baabda où il a été reçu par Michel Aoun, rentré la veille à Beyrouth après une visite officielle de deux jours au Qatar. Il a évoqué avec lui « les contacts en cours pour résoudre la crise actuelle et permettre au Conseil des ministres de se réunir à nouveau », a précisé la présidence. « Le gouvernement fonctionne, mais le Conseil des ministres ne se réunit pas », s’était contenté d’indiquer le Premier ministre à la presse à sa sortie de réunion. L’émir qatari cheikh Tamim ben Hamad al-Thani avait affirmé mardi dernier au président Aoun sa disposition à « aider Beyrouth, dans tous les domaines liés au redressement du Liban ». Doha, dont le chef de la diplomatie sera dans les jours qui viennent (la date n’a pas été précisée) en visite officielle à Beyrouth, aurait proposé ses bons offices pour une médiation entre le Liban et les monarchies du Golfe.
commentaires (12)
Mais bon sang il n’y a plus que des mollassons chez les Sunnites pour ne pas trouver quelqu’un de la trempe de Riad El Solh ?
Lecteur excédé par la censure
13 h 14, le 02 décembre 2021