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Société - Focus

Faut-il abolir le ministère de l’Information ?

La crise diplomatique avec les pays du Golfe, suscitée par les propos polémiques de Georges Cordahi sur la guerre au Yémen, ranime le débat.

Faut-il abolir le ministère de l’Information ?

Le ministre libanais de l’Information, Georges Cordahi, le 30 octobre 2021 à Bkerké. Photo REUTERS/Mohamed Azakir

« Dans les pays qui se respectent, il n’y a pas de ministère de l’Information ». Telle est la réponse que donne Elsie Moufarrej, coordinatrice au sein du Rassemblement du syndicat alternatif de la presse, à la question de savoir si ce ministère a lieu d’être. Car si le ministre de l’Information est le porte-parole du gouvernement, et que son ministère gère l’organisation des médias publics et privés au Liban, il est souvent perçu d’un mauvais œil. Et la récente crise diplomatique opposant le Liban d’une part, à l’Arabie saoudite et ses alliés dans le Golfe d’autre part, suite aux déclarations polémiques du ministre de l’Information, Georges Cordahi, ont ranimé le débat.

Elsie Moufarrej n’est pas la seule à militer pour l’abrogation de ce ministère. Alors qu’il détenait lui-même le portefeuille entre 2017 et 2019, Melhem Riachi avait proposé un texte de loi visant à remplacer le ministère de l’Information par celui de la « Communication et du Dialogue ». « Le Liban doit se transformer en plateforme pour le dialogue et la résolution des conflits. Que ce soit le conflit syrien, le dialogue interreligieux, ou n’importe quelle autre occasion de construire des ponts. C’est ce que nous pouvons offrir au monde et c’est que le nouveau ministère de la Communication doit pouvoir faire », explique l’ancien ministre à L’Orient-Le Jour.

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L’idée d’abolir le ministère avait été reprise par son successeur au sein du troisième gouvernement de Saad Hariri, Jamal Jarrah, puis par le leader sunnite lui-même quand il était Premier ministre. M. Hariri avait alors présenté plusieurs idées visant à calmer la rue quelques jours après le déclenchement du mouvement de contestation du 17 octobre 2019, dont celle d’abolir le ministère de l’Information.

« À l’époque, Saad Hariri présentait la chose sous un angle purement budgétaire. L’idée était de réduire les dépenses publiques en supprimant certaines départements publics », suppute Elsie Moufarrej. En 2020, le ministère avait coûté au Trésor quelque 43 milliards de livres libanaises.

Une tutelle

Mais le principal argument de ceux qui souhaitent rayer le ministère de l’Information de la carte n’est pas budgétaire. L’institution est plutôt perçue comme un organe liberticide exerçant une tutelle sur les médias d’information. Le ministère est en effet responsable de l’Agence nationale de l’information (ANI), mais aussi de Télé Liban et Radio Liban. « Les journalistes dans ces établissements sont sujets à des pressions de la part du ministre, qui les oriente comme bon lui semble. Par exemple, nos déclarations ne sont jamais reprises par l’ANI », témoigne Elsie Moufarrej. Pour les partisans de l’abolition du ministère, il faut créer un organe indépendant de la presse, et octroyer la gestion des médias publics au secteur privé à travers des accords de partenariat.

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Sur les médias privés aussi, le ministre de l’Information possède une influence considérable. « Aujourd’hui, le ministre de l’Information peut demander au Conseil des ministres de retirer la licence octroyée à un média en invoquant des prétextes comme le financement illicite », affirme Melhem Riachi. C’est le Conseil national de l’audiovisuel (CNA) qui soumet ses suggestions ou remarques au ministre de l’Information, lequel choisit de les porter au Conseil des ministres. « Aux mains de la mauvaise personne, cette arme peut être tournée contre les journalistes, d’où la nécessité d’abolir aussi le CNA », avance M. Riachi. Le Liban figure à la 107ème place dans le classement sur la liberté de la presse de Reporters Sans Frontières, qui qualifie la situation du pays au niveau des libertés médiatiques de « problématique ».

L’État « déteste le journalisme »
Toutefois, Ayman Mhanna, directeur du centre SKeyes pour les médias et la liberté culturelle (rattaché à la Fondation Samir Kassir), se veut plus nuancé. « Le problème ne repose pas dans une seule institution ou un seul ministère. Si on abolit le ministère de l’Information, mais que l’approche de la classe politique ne change pas, tout restera comme tel. Prenez la Tunisie par exemple, où le ministère de l’Information a été remplacé par un comité indépendant. Depuis le coup de force du président Kaïs Saïed, la fragilité du comité a été révélée au grand jour », explique-t-il. Outre son caractère liberticide, le ministère de l’Information est accusé d’être une institution anachronique et incompatible avec les médias contemporains. « L’information se répand désormais de façon plus horizontale sur les réseaux sociaux et les sites web, qui peuvent difficilement être encadrés par un ministère », explique Ayman Mhanna.

Pourtant, au Liban, le ministre de l’Information tient toujours, plusieurs années après la proposition de Melhem Riachi. Pour ce dernier, c’est parce que l’État profond au Liban « déteste le journalisme ». « La classe politique veut que les journalistes soient leurs porte-paroles et c’est tout. Pour cela, il est important de maintenir la mainmise sur la presse, tout en lui donnant un air pluraliste », s’insurge l’ancien ministre.

Le ministère de l’Information s’inscrit également dans le cadre de la politique de partage confessionnel des quotes-parts au Liban, un pays où le système transforme le gouvernement en véritable miroir du Parlement. Cette logique impose en effet souvent la création de « portefeuille à la carte », sans véritable importance, pour assurer une représentativité à tous les blocs politiques. ­

« Dans les pays qui se respectent, il n’y a pas de ministère de l’Information ». Telle est la réponse que donne Elsie Moufarrej, coordinatrice au sein du Rassemblement du syndicat alternatif de la presse, à la question de savoir si ce ministère a lieu d’être. Car si le ministre de l’Information est le porte-parole du gouvernement, et que son ministère gère l’organisation...

commentaires (16)

Bien sûr que OUI il faut supprimer 2 ou 3 ministères qui ne servent à rien et les autres qui sont occupés par des nuls qui font comme si ces ministères n’existaient pas. En fin de compte il faut dissoudre le gouvernement mais aussi et surtout le parlement puisqu’ils ne servent à strictement rien à part rassembler des incompétents qui ne sont là que pour bloquer le pays. Au moins sans gouvernement on sait que des initiatives peuvent être prises par les opposants ou même former un gouvernement parallèle pour sauver le pays. Ils nous menacent de vide politique? Si on comble le vide par le néant on n’ira pas très loin.

Sissi zayyat

20 h 28, le 09 novembre 2021

Tous les commentaires

Commentaires (16)

  • Bien sûr que OUI il faut supprimer 2 ou 3 ministères qui ne servent à rien et les autres qui sont occupés par des nuls qui font comme si ces ministères n’existaient pas. En fin de compte il faut dissoudre le gouvernement mais aussi et surtout le parlement puisqu’ils ne servent à strictement rien à part rassembler des incompétents qui ne sont là que pour bloquer le pays. Au moins sans gouvernement on sait que des initiatives peuvent être prises par les opposants ou même former un gouvernement parallèle pour sauver le pays. Ils nous menacent de vide politique? Si on comble le vide par le néant on n’ira pas très loin.

    Sissi zayyat

    20 h 28, le 09 novembre 2021

  • Une preuve de plus que ce pays n’est toujours pas sorti du Moyen Âge

    JB El catalán

    14 h 23, le 09 novembre 2021

  • Il faut surtout abolir ce genre croissant de crétins .

    Wow

    12 h 28, le 09 novembre 2021

  • MON COMMENTAIRE EST GENERAL. IL DOIT ETRE PUBLIE SVP.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 25, le 09 novembre 2021

  • LES IDIOTS RIENT QUAND ILS FONT DES CONNERIES ET DU MAL AUX AUTRES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 05, le 09 novembre 2021

  • Une demission immediate. C est tout

    Robert Moumdjian

    00 h 55, le 09 novembre 2021

  • Avec 24 ministres dont la principale raison d’être est de bloquer toute initiative du "camp adverse", alors oui, 24 fois oui!

    Gros Gnon

    21 h 52, le 08 novembre 2021

  • Abolir bien-entendu!! Quelle mascarade et quelle honte..

    Sabri

    19 h 46, le 08 novembre 2021

  • Oui oui oui surtout avec des Einsteins comme celui ci!

    Sabri

    19 h 13, le 08 novembre 2021

  • OUiiiiiiiii un porte parole est amplement suffisant.

    Desperados

    18 h 08, le 08 novembre 2021

  • "le ministre de l’Information est le porte-parole du gouvernement" ... ah bon?? Les composantes de ce gouvernement ne s'entendent pas entre eux alors quelle parole porte ce ministère? De plus la parole du ministre lui-même n'a pas l'approbation de son boss... On se paie de la tête du monde... Bon le peuple libanais est sous la.menace des armes illégales et n'ose point exprimer ses opinions à ce propos, mais les pays du monde savent bien que ce ministère est polyglotte mais ne comprend même pas les mots qui sortent de sa bouche...

    Wlek Sanferlou

    15 h 22, le 08 novembre 2021

  • Le Liban a beaucoup d’argent et il est autosuffisant, alors il refuse tout commentaire venu de gens sensés, d’où la multiplication des ministères et le nombres de ministres qui servent de parasites au service des vendus à toucher un salaire sans rien produire. Voilà tout. On était parti pour un gouvernement de 18 ministres et on se retrouve avec 24 bras cassés pour servir leurs leaders vendus et tout le monde applaudit la formation de ce gouvernement ridiculement concocté à leur image pour pallier au vide. Pourquoi payer ces sinistres qui ne servent à rien alors que tout salaire doit être justifié par un rendement. Chose incongrue pour les politiciens libanais qui postulent en connaissance de cause et se servent du peu d’argent dans les caisses pour leurs salaires mirobolants tout en ne fournissant aucun effort pour servir le pays. Ils sont là pour bloquer et paralyser toute la nation sur commande et sont rétribués en conséquence avec l’argent du peuple qu’ils massacrent. Tout simplement UBUESQUE.

    Sissi zayyat

    14 h 39, le 08 novembre 2021

  • Bien sûr qu'il faut le supprimer. En démocratie un tel ministère n'a pas de raison d'être. La question est: Veux-t-on enfin faire du Liban une démocratie ?

    Yves Prevost

    14 h 30, le 08 novembre 2021

  • Oui, bien évidemment, la censure aussi !

    TrucMuche

    14 h 24, le 08 novembre 2021

  • Excellente idée réduction des frais inutiles en temps de disettes

    Cyril Assouad

    13 h 44, le 08 novembre 2021

  • A ce stade de corruption et de dégénérescence il faut abolir tous les ministères, le jour où l'on n'engraissera plus cette caste de pourris on pourra refaire un pays digne de ce nom.

    Christine KHALIL

    13 h 02, le 08 novembre 2021

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