Toutes les informations disponibles font état d’une mise en place prochaine du nouveau gouvernement présidé par Nagib Mikati. Mais de toutes les sources interrogées, aucune n’était hier en mesure d’affirmer catégoriquement que le rendez-vous est pour cette semaine, tant il y a eu de changements ces derniers temps et tant chaque jour est porteur d’un nouvel obstacle.
Aux dernières nouvelles, le conflit lié au ministère de l’Économie aurait été réglé par l’attribution de ce portefeuille à une personnalité sunnite choisie par le Premier ministre désigné, avec l’accord du chef de l’État (on parle de Mohammad Baassiri). Selon des sources qui suivent le dossier gouvernemental, après avoir accepté que le portefeuille de l’Économie soit attribué au président de la République, le Premier ministre désigné a subitement réclamé qu’il lui revienne. La soudaine importance du ministère de l’Économie est due au fait que la personnalité qui en aura la charge devra participer aux négociations avec le Fonds monétaire international, aux côtés des ministres des Finances et des Affaires sociales. Autrement dit, dans un pays basé sur le partage confessionnel du pouvoir, il est nécessaire que les principales communautés soient représentées dans toutes les démarches importantes qui touchent le pays. Pour les Libanais ordinaires, cela pourrait paraître simple, mais dans le délicat équilibre confessionnel sur lequel repose la composition du gouvernement, le moindre changement en entraîne d’autres... Les ultimes discussions menées notamment par le directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, ont donc permis de régler cet obstacle, et si aucun autre ne surgit, le gouvernement pourrait bien être annoncé avant la fin de la semaine.
Mais au-delà des considérations internes, qui ont forcément leur importance, des sources diplomatiques libanaises affirment que les circonstances externes sont aussi déterminantes. Or des changements sont intervenus récemment à ce niveau-là et ils pourraient favoriser la formation du gouvernement.
En effet, selon ces mêmes sources, depuis l’annonce par le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah, au dixième jour de la Achoura, de l’appareillage du navire iranien chargé de mazout à destination du Liban, les événements se sont précipités. D’abord, l’ambassadrice des États-Unis est entrée en contact avec le président de la République pour lui affirmer que l’administration de son pays a décidé d’accorder au Liban une exception pour importer du gaz d’Égypte via la Syrie et du courant électrique de Jordanie via la Syrie aussi. Or ces projets existent depuis au moins 5 ans et ils se sont toujours heurtés à la loi américaine « Caesar Act », qui place toute partie concluant une transaction avec l’État syrien sous le coup de sanctions américaines. Toutefois, l’importation de gaz égyptien et de courant électrique jordanien vers le Liban exige l’aval des autorités syriennes avec lesquelles le Liban communique très timidement depuis des années, par crainte là aussi des sanctions américaines. Brusquement, et parce qu’il n’y a pas d’autre moyen d’amener le gaz et l’électricité au Liban, une délégation ministérielle officielle s’est rendue à Damas pour discuter de ces questions.
Malgré la polémique sur l’absence du drapeau libanais aux côtés du drapeau syrien lors de la lecture du communiqué officiel en clôture de la visite de la délégation libanaise à Damas, celle-ci s’est déroulée dans un climat relativement calme. Le Liban étant divisé sur le dossier syrien, certains y ont vu un « retour au giron syrien » et d’autres une exception rendue indispensable en raison des besoins du pays.
Mais ce qui est sûr, c’est que cette démarche indique un changement dans la position américaine. Jusqu’à l’annonce de Hassan Nasrallah au sujet du bateau iranien, les Américains n’acceptaient en effet aucune exception pour le Liban, convaincus que cette politique de pression maximale pousserait les Libanais, toutes tendances confondues, à se soulever contre le Hezbollah, sans lequel les sanctions américaines sur leur pays n’auraient pas été aussi sévères. Même dans un sujet aussi délicat pour le Liban que celui du retour des déplacés syriens vers leur pays, dans les zones considérées sûres, il n’a pas été possible de convaincre les Américains de le faciliter au point que les déplacés sont depuis trois ans revenus au compte-gouttes...
L’annonce du secrétaire général du Hezbollah au sujet du bateau a donc changé la donne. En constatant qu’il ne s’agissait plus d’une simple menace, ou même d’une promesse, mais bien d’une action concrète, qui en plus est plutôt bien accueillie par les Libanais qui ne sont pas nécessairement favorables au parti chiite, l’administration américaine a décidé de modifier sa politique. L’objectif était d’empêcher le Hezbollah de marquer un point et par conséquent, il fallait alléger les sanctions, juste pour que le Liban puisse éviter l’effondrement total. Selon les sources diplomatiques précitées, l’administration américaine a donc encouragé les responsables libanais à renouer un dialogue officiel avec les autorités syriennes. Ce qui constitue en soi un changement d’attitude américain à l’égard du Liban et de la Syrie, limité certes, mais suffisant pour susciter des commentaires en tous genres.
De plus, dans ce même contexte, le contact téléphonique entre les présidents français et iranien, dont le Liban a constitué un des principaux sujets, a eu lieu. Pour les sources précitées, il s’agit d’une reconnaissance implicite d’un rôle iranien au Liban. Cette démarche française a-t-elle été faite en concertation avec les Américains ? Il est encore trop tôt pour répondre à cette question, mais si c’est le cas, cela pourrait faciliter la formation du nouveau gouvernement au Liban, car il s’agirait des prémices d’un compromis plus vaste entre les États-Unis et leurs alliés d’un côté, l’Iran et ses alliés de l’autre. Sinon, cela signifierait que les tiraillements internationaux et régionaux se poursuivent... au Liban et ailleurs, et que le changement dans l’attitude américaine ne vise qu’à empêcher l’effondrement total du Liban.
Toutes les informations disponibles font état d’une mise en place prochaine du nouveau gouvernement présidé par Nagib Mikati. Mais de toutes les sources interrogées, aucune n’était hier en mesure d’affirmer catégoriquement que le rendez-vous est pour cette semaine, tant il y a eu de changements ces derniers temps et tant chaque jour est porteur d’un nouvel obstacle. Aux dernières...
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The designate to the ministry of the economy should understand economics. What are the qualifications of Mr. Baarini to serve as a minister and be qualified to negotiate with the FMI? We need to recruit the best and brightest minds for the next government instead of recycling the same old tired inept politicians. Mr. Mikati does not appear up to the task of salvaging the country. He needs to appoint credible individuals with a reputation of honesty and integrity. Otherwise, we might as well keep the Diab government in charge.
Mireille Kang
23 h 25, le 08 septembre 2021