Au moment où le patriarche maronite, Béchara Raï, lançait ses accusations, dimanche, contre le pouvoir politique, allant jusqu’à lui reprocher implicitement de chercher à vider le Liban de ses forces vives et annonçant que l’Église maronite allait réagir pour contrecarrer ce plan, des députés, des élus locaux, des notables, des responsables d’entreprises et des associations économiques tentent de s’organiser dans certaines régions de sorte à assurer à la population l’essentiel de ses besoins alimentaires, médicaux, énergétiques et de communication, « en attendant l’apparition d’un nouvel appareil d’État digne de ce nom », comme l’avait souligné le patriarche. C’est notamment le cas dans la région de Kesrouan-Jbeil, où deux réunions se sont déjà tenues au siège de la fédération des municipalités du Kesrouan, à Jounieh, en vue d’organiser la vie civile. Les réunions ont regroupé cinq députés de la circonscription de Kesrouan-Jbeil, notamment Chamel Roukoz, Neemat Frem et Farid el-Khazen, les évêques Paul Rouhana et Nabil Andari, ainsi que de nombreux édiles et agents économiques de la région comme des propriétaires d’usines de fabrication de médicaments et des importateurs de carburants. Objectif : sortir du chaos qui se généralise en raison des pénuries qui se multiplient, et dont les files interminables devant les stations d’essence, qui donnent lieu parfois à des scènes de violence, sont le meilleur exemple.
Sous la supervision des municipalités et des forces de l’ordre présentes, il a été décidé en particulier de réglementer la distribution de l’essence. Il est question, selon M. Roukoz, de mettre en place un système rationnel de distribution par numéro, de sorte que les automobilistes sachent dans quel intervalle de temps ils peuvent se présenter, et n’aient pas à attendre, parfois en vain, leur tour de faire le plein.Un accord sur la réglementation de la distribution de l’essence, sous supervision municipale, a été par ailleurs conclu dans la région de Batroun et Chekka, selon une information publiée par l’Agence nationale d’information (ANI).
Le drame de Tleil
Le drame de Tleil (Akkar), où l’explosion d’une citerne de carburant, le 15 août, a fait plus de trente morts et des dizaines de grands brûlés, a été l’un des éléments déclencheurs de cette prise de conscience, s’il faut en croire le député Chamel Roukoz. L’incendie et l’explosion de la cuve auraient été évités si le réservoir d’essence illégal découvert par l’armée avait été placé sous bonne garde, plutôt que livré à un pillage anarchique, estime en substance le parlementaire. « Mais l’essence est loin d’être le seul besoin de la population, ajoute-t-il. La collecte des déchets ménagers, le courant électrique, les médicaments, le gaz butane, les communications sont autant de besoins indispensables que la population souffre de ne pouvoir obtenir sinon au prix de grands sacrifices… L’organisation n’a jamais porté atteinte à l’unité du pays et, tant que la formation du gouvernement reste une perspective lointaine, compte tenu des cupidités internes et du bras de fer régional, c’est bien ce que nous devons faire, nous organiser », poursuit le général Roukoz.
Quand on lui demande si cette démarche ne pourrait pas valoir à ses organisateurs d’être suspectés de velléités isolationnistes ou de partition, le gendre du président Michel Aoun, qui s’est retiré du groupe parlementaire du Liban fort dirigé par l’autre gendre, Gebran Bassil, répond : « Nous n’avons que faire de ces surenchères. Ce que nous faisons est un acte de salut public, pas une partition. » L’essentiel, pour le parlementaire, qui affirme que ces réunions se tiendront hebdomadairement, « est de ne pas laisser les gens s’entre-dévorer. L’organisation est chose positive et nécessaire, surtout en temps de pénurie ».Selon le journaliste Jean Aziz, la réunion au siège de la fédération des municipalités du Kesrouan a servi à établir une liste de priorités, et d’abord celle des services publics indispensables à toute vie sociale comme l’alimentation en courant des stations de filtrage d’eau, des hôpitaux, des usines pharmaceutiques et des centrales de télécoms. Même la sécurité n’échappe pas au souci, et « il est question d’accorder plus de pouvoirs à la police municipale », précise le journaliste.
commentaires (5)
Chamel Roukoz est sympatique et peut au moins se vanter d’avoir fait une carriere sans pistons. Cependant, il ne peut en aucun cas pretendre etre independant. j’espere qu’il ne se presentera pas aux elections et qu’il nommera des candidats reelement independants.
Nadim Audi
18 h 35, le 24 août 2021