Rechercher
Rechercher

Économie - Pénurie de carburants

Face à la menace d’une « paralysie totale », la BDL débloque ses « derniers » crédits

Primordiale, la question de la levée des subventions semble soit avoir été vertement ignorée hier lors de la session parlementaire, soit avoir fait l’objet d’une approbation à demi-mot.

Face à la menace d’une « paralysie totale », la BDL débloque ses « derniers » crédits

Vue aérienne sur le trafic d’hier aux abords des stations-service du nord du pays. Photo Michel Hallak

Des files monstrueuses et une situation infernale : voilà à quoi se résumait l’état des routes hier au Liban, une situation inchangée depuis plusieurs jours alors que la pénurie de carburants, alimentée par une bataille politico-économique entre les autorités du pays et la Banque du Liban (BDL), a atteint son apogée. Prévenant d’une « paralysie totale » imminente, le porte-parole des stations-service, Georges Brax, a ainsi affirmé hier sur le réseau social Twitter que « la BDL campe toujours sur sa position au moment où le gouvernement refuse sa décision » de lever les subventions sur les carburants, annoncée sans détour la semaine dernière par le gouverneur de la banque centrale, Riad Salamé.


Lire aussi

Aide US au Liban pour de l’électricité : ce que l’on sait des pistes évoquées

Une décision qui devait faire l’objet hier d’une session parlementaire, convoquée sous l’impulsion d’une lettre du chef de l’État, Michel Aoun, au président du Parlement, Nabih Berry, samedi dernier. Primordiale pour apaiser en partie les souffrances des Libanais, cette question n’a pas été abordée avec l’urgence et l’engagement qu’elle requerrait. Lors de cette séance, les députés se sont contentés de convenir de la nécessité d’accélérer la mise en place de la carte d’approvisionnement pour les plus nécessiteux. Ce qui revient, à demi-mot, à valider le refus, exprimé par Riad Salamé, de ponctionner davantage dans les réserves obligatoires en devises de la BDL pour financer plus longtemps le mécanisme de subventions sur les carburants. Ce dernier avait de fait justifié sa décision de lever les subventions sur les carburants par l’épuisement des réserves en devises de la banque centrale. Ce qui ne laisse plus que l’option de puiser dans les réserves obligatoires des banques se trouvant à la banque centrale, soit les derniers deniers des déposants, le reste étant déjà perdu dans les méandres d’un système bancaire virtuellement en faillite depuis près de deux ans. Pour ce faire, et après la débandade nationale ayant suivi l’annonce de cette levée, le gouverneur avait demandé au Parlement de voter une loi à ce sujet, alors que les réglementations libanaise et internationale ne lui interdisent pas d’utiliser ces réserves. Les importations de carburants devraient alors se faire au taux du marché parallèle, oscillant ces derniers jours autour de 19 000 livres le dollar, soit près du quintuple de celui de 3 900 livres fixé depuis fin juin, et présageant d’une augmentation des tarifs pour les citoyens de plus de 300 %. Des prix qu’une majorité de Libanais ne peuvent plus se permettre de payer, alors que plus de la moitié sont tombés sous le seuil de pauvreté face à la dévaluation abyssale de la monnaie nationale depuis que la crise a commencé.

Dernière ligne de crédit

C’est dans ce contexte que la BDL a ouvert hier la « dernière » ligne de crédit pour l’importation d’un navire-citerne transportant de l’essence et du mazout au taux de 3 900 livres pour un dollar, selon des informations parues dans la presse et confirmées par L’Orient-Le Jour. La prochaine lettre de crédit qui sera approuvée par la banque centrale le sera selon « la nouvelle tarification qui n’a pas encore été précisée pour le moment », selon ces informations. Une tarification sur laquelle un flou demeure encore aujourd’hui.


Lire aussi

L’inaction des pouvoirs publics aggrave l’asphyxie

Une situation qui alarme à juste titre les distributeurs de carburants. Craignant une mise à l’arrêt complète de l’activité de la filière, comme il l’a souligné sur Twitter, Georges Brax a proposé dans un entretien à l’agence de presse privée al-Markaziya, publié hier, de continuer à fournir des devises aux importateurs de carburant au taux de 3 900 livres pour un dollar jusqu’à fin septembre, soit la date originellement prévue par l’accord entre le gouvernement sortant de Hassane Diab et la BDL fin juin, ce qui laisserait alors suffisamment de temps aux autorités pour distribuer la carte d’approvisionnement.

Dans un autre registre, Total Liban a annoncé qu’il suspendait ses livraisons dans les stations de l’ouest de la Békaa, évoquant des « risques sécuritaires ». L’importateur a récemment déploré le fait qu’un camion a été détourné dans le Nord et une station-service attaquée au lance-grenade dans la banlieue sud (de Beyrouth) mardi. Hier, c’est le chef de la municipalité de Ghobeiry, selon une source proche de Total, qui a décidé de réquisitionner les stations-service de l’enseigne situées dans sa circonscription (comme il l’a publiquement annoncé sur les réseaux sociaux, NDLR), qui n’avaient pas été livrées en carburants depuis plusieurs jours. « C’est le Far west », a ainsi déclaré la source proche de la société.

Concernant le gaz, les importateurs d’hydrocarbures ont annoncé hier dans un communiqué l’approbation de la BDL du déchargement ce lundi d’un navire contenant 5 000 tonnes de gaz. Un bateau amarré sur les côtes libanaises depuis près d’un mois, selon les importateurs qui ont déploré le fait que la BDL n’avait toujours pas approuvé d’autres demandes similaires. Les importateurs ont également précisé qu’un navire ayant déjà reçu un accord préalable se dirige vers le Liban, avec à son bord une cargaison évaluée à 1 700 tonnes de gaz qui répondront aux besoins du marché pour 48 heures.

Le point sur le terrain

En attendant, les Libanais en manque d’essence étaient toujours contraints, hier, d’attendre des heures durant dans les longues files devant des stations de gaz dans la localité de Siniq à l’entrée sud de Saïda (Liban-Sud), selon notre correspondant régional Mountasser Abdallah. Avant le déblocage de crédits de la BDL, les importateurs avaient en effet fixé à mercredi prochain, le 25 août, la date d’épuisement de leur stock.


Lire aussi

Les Libanais à deux doigts du point de rupture

Sur le front de l’essence, il fallait parfois, hier, du nord au sud du pays, plus de six heures d’attente pour espérer pourvoir remplir un tant soit peu le réservoir de sa voiture. De nouveau, les kilomètres de files d’attente ont provoqué des embouteillages monstres. Au Liban-Nord, des protestataires ont également manifesté pour dénoncer les pénuries d’essence et de mazout ainsi que la fermeture des stations-service, a rapporté l’Agence nationale d’information (ANI, officielle). Dans la région de Tyr, au Sud, l’armée a pour sa part saisi 90 000 litres d’essence stockés illégalement, a encore rapporté l’ANI.

En attendant un ajustement officiel des tarifs, le prix du bidon d’essence, sans surprise, explose sur le marché noir. Dans la Békaa, le bidon de vingt litres d’essence se vendait hier jusqu’à 450 000 livres libanaises, selon notre correspondante Sarah Abdallah, soit plus de cinq fois le prix officiel de près de 80 000 livres. Dans le Akkar (Liban-Nord), on l’achetait pour 400 000 livres, a pour sa part rapporté notre correspondant Michel Hallak. À Denniyé (Liban-Nord), des propriétaires de générateurs privés de la région ont annoncé l’arrêt de leurs groupes électrogènes d’ici à la fin de la semaine au plus tard, à la suite de l’épuisement de leurs stocks de mazout. Ils ont affirmé être incapables de se procurer du carburant du marché parallèle en raison de son prix élevé.

Ces pénuries de carburant n’ont pas épargné les boulangeries qui avaient fermé dans la région de Tripoli. C’est dans ce contexte que les services de renseignements de l’armée et la police de la municipalité de la ville ont supervisé jeudi soir la distribution de 50 000 litres de mazout à des boulangeries et des minoteries de la région, a détaillé l’ANI. La municipalité de Tripoli a toutefois noté que ces quantités ne suffisent que pour quelques jours, appelant les autorités à leur en fournir davantage prochainement.

Afin de faire face à la crise, le Conseil supérieur de défense avait chargé dimanche l’armée de surveiller le stockage et la distribution des carburants pendant un mois, après la terrible explosion d’une citerne de mazout dans le Akkar qui a fait une trentaine de morts et des dizaines de blessés. La troupe a dans ce cadre annoncé hier sur son compte Twitter avoir saisi 19 000 litres d’essence d’une station dans le village de Rmeich au Liban-Sud. L’armée avait également fait savoir mardi qu’elle avait confisqué en trois jours plus de 4 millions de litres d’essence et deux millions de litres de mazout. Enfin, dans un communiqué publié hier, la Sûreté générale a annoncé pour sa part avoir saisi 500 000 litres d’essence et de mazout et que « la lutte continuait contre le marché noir et le monopole ». 

Des files monstrueuses et une situation infernale : voilà à quoi se résumait l’état des routes hier au Liban, une situation inchangée depuis plusieurs jours alors que la pénurie de carburants, alimentée par une bataille politico-économique entre les autorités du pays et la Banque du Liban (BDL), a atteint son apogée. Prévenant d’une « paralysie totale » imminente,...

commentaires (4)

DES RESERVES SPECIALES GARANTIES PAR LA CONSTITUTION DE CE QUI RESTE DES ECONOMIES D,UNE VIE DES DEPOSANTS REDUITRS A DES MENDIANTS PAR LES MAFIEUX, TOUS LES MAFIEUX, QUI GOUVERNENT CE PAYS ET LES MERCENAIRES DONT ILS SONT LES COMPLICES ET LES PARTENAIRES DANS LES VOLS ET LES CO0NTREBANDES DE TOUTES SORTES.

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 12, le 21 août 2021

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • DES RESERVES SPECIALES GARANTIES PAR LA CONSTITUTION DE CE QUI RESTE DES ECONOMIES D,UNE VIE DES DEPOSANTS REDUITRS A DES MENDIANTS PAR LES MAFIEUX, TOUS LES MAFIEUX, QUI GOUVERNENT CE PAYS ET LES MERCENAIRES DONT ILS SONT LES COMPLICES ET LES PARTENAIRES DANS LES VOLS ET LES CO0NTREBANDES DE TOUTES SORTES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 12, le 21 août 2021

  • A T ON SEULEMENT IDEE DE CE QUE COUTE AUX IMPORTATEURS LE RETARD DU DECHARGEMENT D'UN NAVIRE , APPELE DEMURRAGE ? ET C'EST QUI QUI EN PAYENT LE COUT CROYEZ VOUS ? SUREMENT PAS LES IRRESPONSABLES AU POUVOIR & ASSOCIES.

    Gaby SIOUFI

    11 h 03, le 21 août 2021

  • "Dans la Békaa, le bidon de vingt litres d’essence se vendait hier jusqu’à 450 000 livres libanaises". Où sont les "forces de l'ordre" chargées de faire appliquer la loi?

    Yves Prevost

    08 h 16, le 21 août 2021

  • Vous devriez vraiment vous assurer que quand vous entendez ihtikar, ce n'est pas plutôt accaparement que monopole car monopole n'a aucun sens dans ce contexte de pénurie.

    M.E

    00 h 08, le 21 août 2021

Retour en haut