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Politique - Explosions au port de Beyrouth

Hariri propose une levée des immunités de tous les responsables

"Celui qui a réclamé dès le premier jour une enquête internationale afin que les immunités tombent ne peut pas être accusé en fin de compte de protéger les coupables", se défend l'ex-Premier ministre.

Hariri propose une levée des immunités de tous les responsables

L'ex-Premier ministre libanais Saad Hariri. Photo d'archives AFP via Getty Images

L'ex-Premier ministre libanais Saad Hariri, qui s'est récusé le 15 juillet de sa mission de former le nouveau gouvernement pavant la voie à la nomination lundi du député Nagib Mikati, a annoncé mardi que la formation parlementaire qu'il dirige allait présenter une proposition de loi pour la levée de l'immunité du chef de l'État, du Premier ministre, des ministres, des députés des juges, et de tous les autres responsables politiques et administratifs afin que ceux-ci puissent être éventuellement jugés dans le cadre de l'enquête sur la double explosion du 4 août 2020 au port de Beyrouth. Cette proposition intervient à quelques jours du premier anniversaire du drame funeste, dans un Liban plongé dans une grave crise socio-économique. Une telle démarche, si elle est adoptée, requiert un amendement de la Constitution qui nécessite le vote des deux tiers des membres du Parlement.

Décision exceptionnelle

Au cours d'une conférence de presse, le chef du Courant du Futur a annoncé que sa formation allait présenter un texte visant à suspendre les immunités des responsables et élus du pays. "La décision exceptionnelle qu'il faut prendre est la suivante : une proposition (de loi) pour suspendre tous les articles constitutionnels et légaux accordant une immunité ou des procédures spéciales de jugement pour le chef de l'État, le Premier ministre, les ministres, les députés, les juges, les fonctionnaires et même les avocats", a annoncé M. Hariri, sur un ton ferme, à l'issue de la réunion de son groupe parlementaire à la Maison du Centre. "Que ceux qui veulent la vérité nous rejoignent et cessent la surenchère", a martelé le leader sunnite.

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Encore une embûche sur le chemin de Tarek Bitar...

Une pétition visant à contourner la levée des immunités parlementaires réclamée par le juge d'instruction près la cour de justice Tarek Bitar, chargé de l'enquête sur le drame qui a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés, a été dernièrement signée par une vingtaine de députés. Cette pétition a provoqué un tollé au sein de la population et les proches des victimes qui réclament justice depuis bientôt un an. Une campagne a ensuite été lancée sur les réseaux sociaux contre les députés signataires, sous les hashtag #députés_du_nitrate et #députés_de_la_honte. Les noms et photos de ces parlementaires étaient largement diffusées à côté d'une représentation de la déflagration, tandis que de nombreux journalistes et activistes ont dénoncé leur tentative de contourner la justice. La déflagration au port s'était produite à la suite d'un incendie dans le hangar n°12 du port de Beyrouth, où étaient stockées depuis des années 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium, sans mesures de sécurité.

La semaine dernière, plusieurs députés, notamment affiliés à la formation parlementaire de l'ex-Premier ministre Saad Hariri, ont finalement retiré leur signature de cette pétition. Mais selon la chaîne LBCI, plusieurs autres députés ont dernièrement signé cette pétition en enclenchant la procédure de mise en accusation, par la Chambre cette fois, des trois députés et anciens ministres, Nouhad Machnouk, Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaïter, ainsi que de l'ex-ministre Youssef Fenianos. Une procédure qui manque d'impartialité selon les détracteurs de la classe au pouvoir.

Le juge Tarek Bitar avait demandé la levée de l'immunité pour inculper ces responsables et élus et engager des poursuites pour "éventuelle intention d'homicide" et "négligence et manquements". Il est depuis confronté à des tentatives d'obstruction de la part de la classe politique. Les députés, réunis le 10 juillet en commissions, n’avaient pas statué sur la requête du juge Bitar, et avaient requis davantage de documents, ce que ce dernier avait refusé, arguant du secret de l'instruction. Jeudi dernier, la Chambre a demandé à la justice de mettre un terme aux critiques dont elle est l'objet. Dernier signe des entraves auxquelles fait face le juge Bitar : le procureur Ghassan Khoury a entériné la décision du ministre sortant de l’Intérieur, Mohammad Fahmi, de refuser les poursuites contre le patron de la Sûreté générale Abbas Ibrahim.

Trois tribunaux

Commentant l'état actuel de l'enquête, Saad Hariri a mis en garde contre une multitude de procédures qui seraient mises en place si les immunités ne sont pas levées.  "Ce dossier, s'il poursuit sa trajectoire actuelle, en vertu de la Constitution et des lois, se retrouvera devant trois instances : la Haute cour chargée de juger les présidents et les ministres, la Cour de justice et la cour de cassation. Est-ce acceptable ?", s'est indigné le chef du Courant du Futur. "Celui qui a réclamé dès le premier jour une enquête internationale afin que les immunités tombent ne peut pas être accusé en fin de compte de protéger les coupables", s'est défendu le leader sunnite. Le président de la République Michel Aoun avait clairement exclu une enquête internationale après le drame, estimant qu'une telle enquête "diluerait la vérité". Mais au vu de l'impasse actuelle, les critiques à l'encontre de la classe au pouvoir sont loin de se calmer.

Au début de sa conférence de presse, Saad Hariri a ainsi rejeté les accusations contre sa formation. "Que personne ne fasse de la surenchère à nos dépens au sujet de l’explosion du 4 août. Nous savons ce que c’est que de perdre des proches. Nous sommes fils et frères de martyrs", a-t-il lancé, en faisant référence à son père Rafic Hariri, tué dans un attentat à la bombe en 2005. "Certains disent que le Courant du Futur a signé une pétition contre la levée des immunités parlementaires, mais cela est le summum du mensonge. Il y a des lois et des règlements au Liban, et ce n’est pas Saad Hariri ni le Courant du Futur qui les ont mises. Lorsque la Constitution dit que le président de la République bénéficie de l'immunité (…), ce n’est pas Saad Hariri qui a édicté cela. De même pour l’immunité du Premier ministre et des députés", s'est-il défendu. "Nous sommes face à des textes de loi que nous sommes obligés d’appliquer. Mais cela ne veut pas dire que nous ne voulons pas la vérité. Les martyrs tués dans l’explosion sont tous mes proches", a insisté l'ex-Premier ministre.

L'ex-Premier ministre libanais Saad Hariri, qui s'est récusé le 15 juillet de sa mission de former le nouveau gouvernement pavant la voie à la nomination lundi du député Nagib Mikati, a annoncé mardi que la formation parlementaire qu'il dirige allait présenter une proposition de loi pour la levée de l'immunité du chef de l'État, du Premier ministre, des ministres, des députés des...

commentaires (7)

Et quand on lèvera les immunités de tous et pour tout… et pas que pour le dossier de l’explosion ?

JiJii

00 h 01, le 28 juillet 2021

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Commentaires (7)

  • Et quand on lèvera les immunités de tous et pour tout… et pas que pour le dossier de l’explosion ?

    JiJii

    00 h 01, le 28 juillet 2021

  • Ils se sont passés le mot? On massacre on trahi et on crie au scandale en faisant de la surenchère sur l’autre, celui qui a eu le culot de défier la  loi ouvertement en s’appuyant sur les politiques qui le protègent. Si ce n’est pas du foutage de gueule je ne sais pas ce que sait. Les citoyens sont plus qu’exténués d’entendre ces baragouinages creux et nuisibles. Assez vous payez la tête des citoyens, ça s’appelle un crime, vu l’état dans lequel vous les avez mis en les humiliant au delà de l’acceptable vous êtes tous coupables de la situation pitoyable dans laquelle se trouve notre pays. PAYS, NATION, HOME, REFUGE.Et puis souveraineté, dignité patriotisme, ça vous parle? Apparemment ça vous est complètement étranger. Bande de nases.

    Sissi zayyat

    22 h 53, le 27 juillet 2021

  • c est etrange ,pendant votre conference de presse aucun journaliste n a pense vous poser la question suivante :pourquoi vous avez demande ou conseille au president Hassan Diab de ne pas aller se presenter devant le juge d'instruction ? maintenant que vous etes en dehors du pouvoir , vous vous presentez en defenseur des opprimes

    Jimmy Barakat

    20 h 16, le 27 juillet 2021

  • C'est une manigance de plus pour rejeter la faute sur "kellon". Pourquoi ne pas simplement laisser le juge Bitar mener son enquête ? Lui il a désigné des noms bien précis en demandant la levée de leur immunité, pas "kellon". L'initiative Hariri ressemble beaucoup à celle de Berri et les deux ont pour objectif commun de diluer la vérité. D'ailleurs ça ne serait pas étonnant que Berri appuie la manœuvre Hariri, tout comme ce dernier a appuyé la manœuvre du premier, et ainsi ils se retournent l'ascenseur.

    Citoyen libanais

    19 h 59, le 27 juillet 2021

  • POUR LA ÉNIÈME FOIS M.HARIRI : Les victimes de l’explosion SEMI ATOMIQUE ne sont PAS des martyrs. Ce sont des VICTIMES d’un assassinat, crime voire limite génocide. En parlant de « martyrs, vous minimisez la gravité du crime et du coup, c’est comme si vous demandiez un allègement quant à l’éventuel jugement qui serait prononcé par le tribunal. Les libanais ne sont pas dupes: ARRETEZ de parler de martyrs. DITES la vérité : c’est un CRIME en masse perpétré par toute la classe au pouvoir qui a su et savait , à un moment ou un autre , toutes les années précédentes, donc connaissait l’existence de ces produits mais a préféré ne rien dire pour ne pas fâcher les vrais tenants du pouvoir au liban

    LE FRANCOPHONE

    18 h 16, le 27 juillet 2021

  • Celui qui n'a pas voulu quand il pouvait, ne pourra pas quand il voudra.. malheureusement cette citation prend tout son sens avec ces déclarations, probablement, trop tardives, même si elles ont le mérite d'exister. En faisant une coalition, contre nature avec le CPL qui ne cesse de réclamer ( officieusement) la vérité et les FL , ils pourront présenter une proposition de loi pour la levée d'immunité de tous ces élus...

    C…

    17 h 36, le 27 juillet 2021

  • Le Futur, le CPL, l s Forces Libanaises et PS sont tous pour la levée de l’immunité. Il ne reste que le Rossignol du Perchoir à agir.

    Georges S.

    17 h 36, le 27 juillet 2021

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