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Culture - Anniversaire

Tomaso Albinoni : 350 ans de fausse gloire ?

Tomaso Albinoni : 350 ans de fausse gloire ?

Portrait anonyme de Tomaso Albinoni. Photo Wikicommons

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », aurait dit Lavoisier sur la conservation des masses lors du changement d’état de la matière. Ce principe chimique s’applique parfaitement à la musique savante, car celle-ci ne se crée pas par mutation fortuite, elle évolue avec le temps par une incessante transmission de flambeau. Ainsi, nul ne peut prétendre que Debussy l’ait inventée, elle était déjà à l’honneur dans les enchantements nocturnes de Chopin. Elle brillait pourtant de mille feux dans les cathédrales musicales de Beethoven, qui aurait reçu des mains de Haydn l’esprit de Mozart, puisant lui-même son génie dans l’univers céleste contrapuntique de Jean-Sébastien Bach. Ce « pétrarque de l’harmonie » n’aurait, cependant, pu porter le raffinement de l’art baroque à son paroxysme, s’il ne s’était imprégné de la tradition musicale germanique de Buxtehude, mais aussi des influences vénitiennes de Vivaldi et d’Albinoni dont on célèbre aujourd’hui le 350e anniversaire de la naissance.

Venise la Sérénissime, joyau de l’Italie et perle culturelle et artistique de l’Europe du milieu du XVIIe siècle, où l’art se frotte d’histoire et l’histoire s’imbibe d’art, fut témoin, le 8 juin 1671, de la naissance d’un Vénitien dilettante prolifique, mais dont cette même histoire ne retiendra de toute son œuvre qu’une seule et unique pièce : le célébrissime Adagio en sol mineur. Ce monument musical présumé néobaroque, paradoxalement marqué d’une sensibilité mélodico-harmonique sui generis fertile en langueurs mélancoliques, n’a cependant jamais été composé par Albinoni. La basse continue serait probablement de lui (aucune trace d’un tel manuscrit n’existe toutefois), mais l’élaboration est certainement due au musicologue Remo Giazotto, grand spécialiste du compositeur (1910-1998), qui aurait, selon ses dires, reconstitué en 1945 ce faux adagio, qui sent quand même fortement le romantisme, en se basant sur cette basse et un extrait d’une sonate d’église de l’opus 4 du compositeur.

À cheval entre Arcangelo Corelli et Antonio Vivaldi, Tomaso Albinoni a toutefois été un novateur de la forme concerto qui aurait contribué à l’évolution du concerto grosso vers le concerto de solistes, notamment pour hautbois ou violon. Il a aussi été le compositeur d’une panoplie d’œuvres vocales (dont plus de 80 opéras et 30 cantates) et instrumentales dont la majorité des partitions manuscrites, jamais publiées, a été réduite en cendres, en février 1945, durant les bombardements britanniques de Dresde, alors qu’elles étaient archivées dans la bibliothèque de la cité allemande. Cela dit, Albinoni demeure aujourd’hui, pour certains, une figure marginale dans l’histoire de la musique savante, alors que pour d’autres il incarne l’une des figures majeures de l’époque baroque qui aurait remarquablement influencé le cantor de Leipzig, et le compositeur à l’origine de l’adagio le plus applaudi de nos jours. Cette musique, tout d’abord utilisée comme indicatif de radio dans l’émission du producteur des « grands musiciens » Jean Witold, a été, par la suite, mise à toutes les sauces avec la complicité d’Herbert von Karajan. Elle a également été arrangée et réarrangée maintes fois et reprise pour plusieurs musiques de films (dont Le fantôme de l’opéra de Dwight Little en 1989) et adaptée tant bien que mal en chansons, notamment interprétées par la Canadienne Lara Fabian et la Libanaise Majida el-Roumi.

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », aurait dit Lavoisier sur la conservation des masses lors du changement d’état de la matière. Ce principe chimique s’applique parfaitement à la musique savante, car celle-ci ne se crée pas par mutation fortuite, elle évolue avec le temps par une incessante transmission de flambeau. Ainsi, nul ne peut prétendre que...

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