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Environnement - Environnement

Le bras de fer se poursuit pour sauver la « forêt des moines » de Baabda

Vendredi dernier, l’entrepreneur qui planifie la construction d’une station-service dans une parcelle du bois a repris les travaux avant d’être stoppé par la police municipale.

Le bras de fer se poursuit pour sauver la « forêt des moines » de Baabda

Une vue aérienne de la parcelle creusée par l’entrepreneur pour construire une station-service et des dégâts occasionnés à la forêt. Photo Terre Liban

Elle a beau avoir été classée en 2016 comme un lieu important pour la biodiversité au Liban par Bird Life International et Critical Ecosystem Partnership Fund (CEPF), la forêt de Baabda ne semble toujours pas tirée d’affaire. Cette oasis de verdure connue sous le nom de « forêt des moines » est le dernier espace vert naturel proche de la capitale. Elle continue pourtant de faire l’objet de plusieurs menaces majeures, dont la construction d’une station-service à l’une de ses entrées, malgré le rejet du chantier par la municipalité de la ville, les habitants et les écologistes. Vendredi dernier, l’entrepreneur à l’origine du projet de la station-service a entrepris des travaux pendant une heure, avant que la police municipale et des habitants de la ville ne l’obligent à s’arrêter.

« Plusieurs personnes m’ont contacté, vendredi matin, et m’ont envoyé des photos d’une pelleteuse qui arrachait des arbres, raconte à L’Orient-Le Jour Paul Abi Rached, directeur de l’ONG environnementale Terre Liban, dont les locaux sont basés à Baabda et qui a fait de la forêt des moines son cheval de bataille. J’ai tout de suite notifié le ministre de l’Agriculture Abbas Mortada, étant donné qu’il avait gelé en décembre dernier le permis d’abattage obtenu par l’entrepreneur », poursuit le militant. « La police a refusé d’intervenir et a expliqué qu’elle avait besoin d’une décision juridique. C’est finalement la police municipale qui a arrêté les travaux », indique M. Abi Rached.

En décembre dernier, quelques jours avant le gel de son permis d’abattage, Chadi el-Sabeh, l’homme d’affaires qui loue une parcelle de la forêt au couvent des pères antonins, avait arraché de nombreux arbres, avant que la population locale et les écologistes n’interviennent. La poursuite des travaux vendredi dernier pendant une heure a laissé un trou béant au milieu de la verdure. Des photos aériennes diffusées par Terre Liban montrent l’étendue des dégâts et font craindre le pire si la station-service venait à être construite.

Dans un rapport publié lundi dernier, Georges Tohmé, président du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS) et un grand expert en biodiversité, rappelle que la forêt de Baabda abrite 425 espèces de plantes et 201 espèces d’animaux, dont 7 espèces d’oiseaux menacés d’extinction et 5 espèces de plantes qui n’existent qu’au Liban.

Les antonins impuissants

Contacté par L’OLJ, le père Nader Nader, directeur du couvent Saint-Antoine de Hadeth qui est propriétaire de la forêt, se dit impuissant face à cette situation. « S’il y a des solutions, je suis preneur, mais je ne peux pas annuler les décisions qui ont été prises avant ma prise de fonctions », explique le père Nader qui rappelle qu’il n’a été nommé père supérieur qu’il y a quelques mois. Or, l’affaire de la location du terrain par le couvent à l’entrepreneur remonte, elle, à 2017. « Nous sommes pour la préservation de l’environnement et sommes en phase avec les habitants, mais nous ne savons pas quoi faire », ajoute le religieux.

« Si le projet est annulé, nous serons obligés de rembourser l’entrepreneur, avance le père supérieur. Par les temps qui courent, nous n’avons pas les moyens de le faire. Nous arrivons à peine à couvrir nos frais et à payer nos enseignants. »

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De plus, si elle est construite, la station sera située sur un virage particulièrement dangereux. Le père supérieur confie avoir soulevé ce point avec Chadi el-Sabeh. « Il m’a dit qu’il comptait sur les clients montant vers Baabda (et non ceux qui en descendent et qui seraient obligés de tourner vers la gauche pour entrer dans la station) », confie le père Nader. Un des reproches faits par les détracteurs du projet est que les automobilistes devraient pouvoir apercevoir les voitures rentrer et sortir de la station-service à une distance minimale de 100 mètres, ce qui ne pourrait pas être le cas, étant donné la nature du virage. Sans parler de la pollution qu’une station-service pourrait entraîner pour la forêt et les immeubles résidentiels. « Je reçois des commentaires d’habitants de Baabda, de Betchay et Wadi Chahrour, ils traversent ce virage plusieurs fois par jour et savent qu’il est dangereux », assure Paul Abi Rached. Ce militant de la première heure assure par ailleurs avoir été notifié par le ministère de l’Environnement que l’entrepreneur n’a jamais signé l’Examen environnemental initial (EEI) requis, un document garantissant son respect de l’environnement du lieu. Le ministre de l’Environnement de l’époque, Damien Kattar, n’était pas disponible hier pour un commentaire.

Une location de la forêt par la municipalité ?

Interrogé sur les solutions possibles pour mettre fin à ce litige, le président du conseil municipal de Baabda, Antoine Hélou, révèle envisager de louer la forêt auprès du couvent pour empêcher la construction de la station d’essence et protéger l’espace. « Le conseil municipal a approuvé ce projet. Je vais essayer de prendre rendez-vous au plus vite avec la direction du couvent », indique M. Hélou à L’OLJ.Le président de la municipalité assure par ailleurs qu’il mettra toutes ses prérogatives au service de la préservation de ce « poumon de la région et de Beyrouth ». « Je suis au service de la loi, mais je suis également au service de la communauté. Les habitants ont exprimé le souhait que cet espace vert soit préservé », explique-t-il. « Pas besoin d’être un expert pour comprendre à quel point il est dangereux de construire une station sur un tel virage », souligne le président de la municipalité. Il assure toutefois qu’il « n’a rien contre l’entrepreneur » et propose de transférer ses droits d’exploitation vers un autre terrain, selon le concept des « droits transférables de développement ». Ce concept juridique consiste à effectuer un échange de propriétés dans le but d’assurer une gestion plus efficace de la croissance urbaine. « Terre Liban a avancé cette solution il y a deux semaines. Nous proposons que les droits de construction soient échangés de la parcelle située dans la forêt vers un autre terrain qui appartienne également au couvent, mais qui ne soit pas situé dans les bois », conclut Paul Abi Rached.

Elle a beau avoir été classée en 2016 comme un lieu important pour la biodiversité au Liban par Bird Life International et Critical Ecosystem Partnership Fund (CEPF), la forêt de Baabda ne semble toujours pas tirée d’affaire. Cette oasis de verdure connue sous le nom de « forêt des moines » est le dernier espace vert naturel proche de la capitale. Elle continue pourtant de...

commentaires (4)

Le seul a blamer est le cure ! Par les temps qui courent ose t il dire … La mauvaise foi est évidente !

Cadige William

06 h 41, le 23 juin 2021

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Commentaires (4)

  • Le seul a blamer est le cure ! Par les temps qui courent ose t il dire … La mauvaise foi est évidente !

    Cadige William

    06 h 41, le 23 juin 2021

  • Bravo les pères du couvent vous n'êtes pas mieux que les autres , honte honte honte

    Eleni Caridopoulou

    17 h 27, le 10 mai 2021

  • IL EST INTERDIT - INTERDIT - DE CONSTRUIRE UNE STATION D"ESSENCE A UN TOURNANT .Si le propriétaire du terrain a une autorisation c'est que ou le MOUHAFEZ ou LA BALADIYE ce sont remplis les poches .

    aliosha

    11 h 05, le 10 mai 2021

  • Le Liban jadis couvert d’arbres, va devenir un amas de pierres et tout cela uniquement pour l’argent.

    mokpo

    07 h 38, le 10 mai 2021

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