Un an après les premiers cas de Covid-19 enregistrés au Liban, le lancement de la campagne de vaccination, le 14 février, a été célébré comme le premier pas vers la sortie de la pandémie, mais quelque deux semaines plus tard cette campagne est déjà éclaboussée par le scandale, victime de défaillances techniques et critiquée pour sa lenteur et son manque de transparence. Dans le premier rapport établi par la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, l’organe chargé de surveiller la campagne, des violations du plan de vaccination ont été relevées dans 40 pour cent des sites de vaccination.
Campagne lente, files d’attente pour les rendez-vous
Les critiques se sont manifestées sur les réseaux sociaux, où des dizaines d’intervenants ont mis en cause le rythme des vaccinations, se plaignant que leurs parents âgés attendent depuis plusieurs semaines pour être informés s’ils peuvent prendre rendez-vous après s’être inscrits sur la plateforme Impact du Bureau central d’inspection.
« Le problème principal est que le rythme des rendez-vous est lent », déclare à L’Orient Today la directrice du centre de vaccination de l’hôpital universitaire Rafic Hariri et spécialiste des maladies infectieuses, Oussaima el-Dbouni. « Beaucoup de patients ont indiqué qu’ils n’avaient pas reçu de nouvelles du ministère de la Santé deux semaines après s’être enregistrés », ajoute-t-elle.
Alors que les rendez-vous sont fixés via la plateforme Impact, L’Orient Today a pu constater que le nombre et le lieu des rendez-vous disponibles, selon le flux opérationnel du plan de vaccination, sont contrôlés par le ministère de la Santé.
De nombreux hôpitaux fonctionnent bien en deçà de leur capacité maximale d’administration des vaccins. À l’hôpital Hariri, qui peut vacciner 500 personnes par jour, le nombre quotidien moyen de doses administrées est de 244. La situation est similaire au Centre médical de l’Université américaine de Beyrouth, selon Oumayya Musharrafieh, médecin de famille qui dirige la campagne de vaccination. Le centre peut vacciner plus de 1 200 personnes par jour mais, jusqu’à présent, la moyenne n’est que de 544. Au Centre médical de l’Université libano-américaine-Hôpital Rizk (LAUMC-Rizk Hospital), seulement près de 120 doses sont administrées par jour, alors que sa capacité s’élève à 600. « C’est une perte de temps et de ressources », affirme le directeur médical du LAUMC-RH, Georges Ghanem.
Pas assez de vaccins
Le chef du Comité national des vaccins Covid-19, Abdel Rahman Bizri, estime, quant à lui, que la raison principale de la lenteur de la campagne de vaccination est qu’il n’y a tout simplement pas assez de vaccins pour tout le monde. « Pour les premières semaines, nous recevons un nombre relativement limité de doses », ajoute-t-il.
À ce jour, un peu plus de 100 000 doses du vaccin Pfizer-BioNTech Covid-19 ont été livrées au Liban, sur un total de 2,1 millions attendues avant la fin de 2021. Ces doses sont destinées en priorité au personnel soignant de première ligne et aux personnes âgées de plus de 75 ans. Quelque 87 000 personnes appartenant à cette catégorie d’âge s’étaient inscrites, au 26 février, pour être vaccinées.
M. Bizri ajoute qu’environ 15 pour cent des doses livrées jusqu’à présent sont réservées pour la deuxième injection, nécessaire après 21 jours pour garantir l’efficacité du vaccin. « Pour le moment, les gens doivent juste faire preuve de patience », déclare le conseiller médical du ministre sortant de la Santé Hamad Hassan, Mohammad Haidar, ajoutant qu’à la mi-mars, environ 500 000 doses du vaccin AstraZeneca devraient arriver au Liban, « ce qui peut vraiment changer la donne ».
Données manquantes
Toutes les données de la campagne de vaccination doivent être théoriquement enregistrées sur la plateforme Impact, pour permettre aux autorités sanitaires et au grand public d’en suivre la progression. Cependant, des milliers de vaccinations ne sont pas enregistrées et beaucoup de ces données sont manquantes.
À la fin de la première semaine de la campagne, seules quelque 50 pour cent des doses avaient été administrées via la plateforme. Selon un document divulgué par le Bureau central d’inspection, certains hôpitaux ont administré jusqu’à 92 pour cent de leurs doses allouées en dehors de la plateforme. « Lorsque la campagne a démarré, Impact a eu des problèmes de connexion avec les systèmes informatiques de nombreux centres de vaccination, ce qui a conduit à la vaccination des plus de 75 ans sans rendez-vous officiel », indique M. Bizri.
Plusieurs hôpitaux ont tenté d’augmenter le nombre de vaccinations et de s’assurer que les doses ne soient pas gaspillées, en invitant les personnes de plus de 75 ans qui s’étaient inscrites sur la plateforme, mais qui n’avaient pas encore été contactées, à appeler directement pour réserver un créneau. D’autres ont utilisé leurs propres systèmes internes pour identifier les personnes appartenant au premier groupe prioritaire.
Dans un effort visant à freiner une telle dérive, le ministère de la Santé a publié, le 18 février, un communiqué indiquant que seuls les rendez-vous réservés via la plateforme Impact sont autorisés. Ce communiqué a été rapidement contredit lorsqu’il est apparu que des députés et des membres du personnel du Parlement, dont certains ont moins de 75 ans, ont été vaccinés. Selon le ministre sortant de la Santé, la clinique mobile du ministère a été envoyée au Parlement pour vacciner les députés en « signe de reconnaissance des efforts » qu’ils ont déployés pour adopter la loi autorisant l’utilisation d’urgence des vaccins Covid-19.
Les vaccins administrés aux parlementaires, au personnel du Parlement, au président Michel Aoun, à son entourage et à la Première dame via la clinique mobile du ministère de la Santé n’ont pas été enregistrés sur la plateforme officielle de vaccination. En effet, la clinique mobile n’apparaît plus comme site de vaccination sur la plateforme.
Selon le conseiller du ministre Mohammad Haidar, les données de la clinique mobile seront enregistrées sur la plateforme dans les prochains jours, ainsi que toutes les autres données sur les vaccinations qui ont été effectuées en dehors de la plateforme au cours des deux dernières semaines.
De son côté, le député Fadi Alame (Amal/Baabda), membre de la commission parlementaire de la Santé, déclare à L’Orient Today qu’il a envoyé une lettre au ministère de la Santé pour réclamer une transparence totale sur la campagne de vaccination. « J’essaie de promouvoir un rapport quotidien, comme celui du nombre de cas de Covid-19, qui comprendrait les rendez-vous réservés, le stock de vaccins actuel et les vaccins administrés chaque jour dans chaque centre », poursuit-il.
Le chef du Bureau central d’inspection, Georges Attieh, précise, pour sa part, avoir également appelé le ministère à être plus transparent et à partager les données collectées auprès des centres de vaccination, ce qui serait une « obligation minimale ». « C’est tout ce que nous demandons pour pouvoir faire notre travail de surveillance (…) Nous sommes le service d’audit de l’État », souligne-t-il.
Selon M. Bizri, le comité des vaccins travaille à resserrer la surveillance des centres de vaccination et à résoudre les problèmes avant l’arrivée de doses supplémentaires. « Nous recueillons maintenant toutes les données des centres pour examiner de près le déroulement de la campagne », dit-il. « Les centres qui ne se conforment pas seront sévèrement sanctionnés. » Le ministère de la Santé a déjà suspendu l’accréditation de trois hôpitaux en tant que centres de vaccination pour violation des termes du plan de vaccination.
Décalage entre les hôpitaux
En examinant les données de la plateforme Impact, un écart important ressort entre le nombre de doses administrées dans chaque hôpital, les hôpitaux privés de la capitale devançant de loin les gouvernementaux.
« Un énorme décalage existe dans la distribution des vaccins et l’attribution des rendez-vous », déclare M. Ghanem, en soulignant que « la campagne de vaccination a souffert d’un manque de transparence dès le premier jour. » Selon M. Bizri, cela s’explique par la capacité des hôpitaux, les doses et les rendez-vous étant justement répartis selon la capacité.
La directrice du centre de vaccination de l’hôpital Hariri, Oussaima el-Dbouni suggère toutefois que l’emplacement de chaque hôpital et la communauté qu’il dessert peuvent également jouer un rôle dans le nombre de rendez-vous réservés. « Autour du RHUH, beaucoup de gens peuvent ne pas avoir de téléphone portable ou ne pas être familiers avec l’application » utilisée pour s’inscrire, dit-elle, ajoutant que ceux qui ont un revenu élevé sont plus susceptibles de se rendre dans les hôpitaux privés, histoire d’avoir le choix. M. Haidar concède qu’« au Liban, nous avons un système de santé hautement privatisé et les gens ne croient pas au secteur public, c’est la réalité ». « Si une personne à Beyrouth a le choix entre l’AUBMC ou le RHUH, il choisira l’AUBMC », d’après lui.
Néanmoins, les décalages ne sont pas aussi dramatiques qu’on peut le penser de prime abord, les données manquantes sur les vaccinations administrées en dehors de la plateforme pouvant également fausser les chiffres. Par exemple, selon les chiffres d’Impact, l’AUBMC a vacciné 3 989 personnes, tandis que le RHUH en a vacciné 836 en date du 25 février. Cependant, selon les chiffres fournis par M. Musharrafieh et Mme Dbouni, l’AUBMC a vacciné quelque 5 440 personnes, tandis que le RHUH en a vacciné 2 442.
M. Bizri admet toutefois qu’il reste encore du travail à faire pour améliorer la distribution des doses et l’attribution des rendez-vous. « Nous cherchons à consolider les systèmes, afin de mieux comprendre la capacité réelle de chaque hôpital (…) Nous devons nous préparer à l’arrivée de doses supplémentaires », dit-il.
Le fait que la campagne de vaccination repose presque entièrement sur des systèmes numériques entraîne par ailleurs des erreurs qui, au début, étaient presque inévitables, ajoute M. Haidar. « C’est la première fois, au Liban, que nous faisons quelque chose de complètement numérique. Cela va prendre un certain temps. »
(Cet article a été originellement publié en anglais sur le site de L’Orient Today le 26 février)
A qui vous voulez faire croire que Hassan Nasrallah et ses conseillers et chefs de milice n'ont pas ete vaccinnes deja par des services mobiles aussi non repertories par ordre du ministre de la sante pour les remercier d'avoir libere il y a 21 ans le Liban et d'avoir mis le pays en faillitte avec leur allier 20 ans apres
15 h 14, le 03 mars 2021