Le numéro un iranien Ali Khamenei a averti lundi que son pays pourrait enrichir l'uranium à 60% si besoin, un geste de défi à l'égard de l'Occident en pleins échanges diplomatiques pour tenter de sauver un accord censé encadrer le programme nucléaire iranien.
Ces déclarations du guide, l'ultime décideur dans les principaux dossiers de la République islamique d'Iran, interviennent à la veille d'une échéance fixée par le Parlement iranien pour limiter les inspections des activités nucléaires iraniennes en raison du maintien des sanctions américaines.
Elles surviennent aussi après que l'Iran et l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ont annoncé un accord pour maintenir une surveillance des activités nucléaires, bien que réduite, le temps que des pourparlers soient engagés entre les pays parties à l'accord de 2015 pour sortir de l'impasse.
"La limite d'enrichissement de l'Iran ne sera pas de 20%. Nous agirons selon nos besoins (...) Nous pourrions augmenter l'enrichissement à 60%", a affirmé l'ayatollah Khamenei, selon un communiqué publié sur son site officiel.
Le gouvernement "n'a pas abandonné ses engagements et a réduit progressivement certains d'entre eux, qui sont encore réversibles dans le cas où (les autres pays parties à l'accord) reviendraient à leurs responsabilités", a-t-il néanmoins ajouté. "Les Occidentaux savent bien que nous ne cherchons pas (à fabriquer) des armes nucléaires."
Enrichir l'uranium est un sujet ultrasensible. L'Iran a annoncé début janvier avoir repris l'enrichissement de l'uranium à hauteur de 20%, dans ce qui a constitué le plus spectaculaire de ses désengagements vis-à-vis de l'accord nucléaire.
Ces désengagements ont été décidés à partir de 2019 après le retrait unilatéral en 2018 des Etats-Unis de Donald Trump du pacte et le rétablissement des sanctions américaines qui asphyxient l'économie iranienne.
"Résultat significatif"
L'Iran exige la levée des sanctions américaines pour revenir à ses engagements pris dans l'accord de 2015. Ce dernier fixe notamment à 3,67% le seuil maximum auquel Téhéran peut enrichir l'uranium, loin des 90% nécessaires pour une utilisation militaire. Les autorités iraniennes affirment que les mesures prises à rebours de ses engagements sont réversibles, et qu'elles sont prises dans le cadre de dispositions prévues par l'accord en cas de manquements des autres parties.
Malgré ses démentis, la République islamique est accusée de chercher à se doter de l'arme atomique par Israël, son ennemi juré. Conclu à Vienne en 2015 entre l'Iran et le groupe 5+1 (Etats-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Russie, Chine), l'accord prévoit une levée progressive de sanctions en échange de la garantie que l'Iran ne se dote pas de l'arme atomique. Depuis le retrait américain suivi des désengagements de l'Iran, les autres pays parties à l'accord tentent de jouer les médiateurs.
La déclaration du guide iranien est intervenue alors que les responsables iraniens ont salué lundi un "résultat significatif" dans les discussions menées avec l'AIEA qui ont permis la veille un accord pour maintenir une surveillance des activités nucléaires iraniennes, bien que réduite.
La loi qui doit restreindre l'accès à certaines inspections, y compris sur des sites militaires suspects, "va être appliquée" à partir de mardi, a prévenu le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, à son retour dimanche soir à Vienne, après des "consultations intenses" à Téhéran.
Inspections réduites
"L'accès sera réduit, ne nous voilons pas la face, mais nous serons en mesure de maintenir le degré nécessaire de surveillance et de vérification", a-t-il ajouté. Selon les termes de cet "accord bilatéral technique" d'une durée de trois mois mais susceptible d'être suspendu à tout moment, le nombre d'inspecteurs sur place reste inchangé et des contrôles inopinés resteront possibles.
"Une fois que tout le monde aura fait sa part et rempli ses obligations, alors il y aura (une reprise) des discussions" sur un plein retour à l'accord, a répété le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif.
Alors que la méfiance reste de mise entre les Etats-Unis et l'Iran, des pays qui n'entretiennent pas de relations diplomatiques depuis 1980, le général Kenneth McKenzie, qui commande l'ensemble des forces américaines au Moyen-Orient, a appelé l'Iran à s'abstenir de toute provocation. "Beaucoup de choses vont être déterminées dans les prochains mois", a-t-il dit alors que la nouvelle administration américaine de Joe Biden a dit vouloir relancer le dialogue.
Ces déclarations du guide, l'ultime décideur dans les principaux dossiers de la République islamique d'Iran, interviennent à...
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