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Société - Liban

"Seuls les lâches tuent les gens bien" : manifestation de colère après l'assassinat de Lokman Slim

Les manifestants ont également marqué les six mois de la tragédie du port et dénoncé les arrestations arbitraires de plusieurs protestataires. 

Une femme tenant une photo de l'intellectuel Lokman Slim. L'Etat de la terreur, explosions, rapts et assassinats peut-on lire au-dessous de la photo. Photo Matthieu Karam

Ils avaient prévu de se rassembler ce matin devant les palais de Justice de Beyrouth, Saïda, Tripoli, Jounieh et Zahlé pour marquer les six mois de la double explosion tragique au port de Beyrouth et dénoncer les arrestations arbitraires de protestataires lors des manifestations, ces derniers jours, à Tripoli, capitale du Nord. Mais l'assassinat de l'intellectuel libanais et opposant au Hezbollah, Lokman Slim, annoncé tôt le matin, s'est imposé à l'ordre du jour des mobilisations dans le cadre desquelles les manifestants ont crié leur colère et réclamé justice.

A Beyrouth, une quarantaine de manifestants étaient présents. Face à eux étaient déployés une trentaine de policiers de la brigade anti-émeute. "Nous étions venus pour réclamer justice dans l’affaire du port, mais malheureusement ce matin nous avons appris l’assassinat de Lokman Slim. Seuls les lâches tuent les gens biens. Si un jour justice est faite dans l’assassinat de (l'ancien Premier ministre) Rafic Hariri et dans l’affaire du port, il pourrait alors y avoir justice dans l’assassinat de Lokman Slim", dit Ebtissam Kehdi, la quarantaine, entourée de femmes tenant des drapeaux libanais bordés de noir.

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L'explosion, le 4 août dernier, de plus de 2700 tonnes de nitrate d'ammonium, stockées depuis plusieurs années "sans mesure de précaution" de l'aveu même des autorités, a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés, et dévasté des quartiers entiers de la capitale. Depuis, malgré près d'une trentaine d'interpellations notamment parmi les responsables de la sécurité et du port, l'enquête n'a toujours rien donné de concret.

Une femme tenant un drapeau libanais bordé de noir, couleur du deuil, devant des policiers, à Beyrouth, le 4 février 2021. Une femme tenant un drapeau libanais bordé de noir, couleur du deuil, devant des policiers, à Beyrouth, le 4 février 2021. Photo Matthieu Karam

"L’assassinat de Lokman Slim est un signal dangereux. Nous sommes entrés dans une nouvelle phase et je crains d’autres assassinats", confie le général à la retraite Georges Nader, venu soutenir les manifestants. Autour de lui, certains brandissaient des portraits de l'intellectuel et écrivain libanais.

Des tracts circulaient parmi les manifestants, sur lesquels l'on pouvait lire : "Nous sommes tous des victimes", "Vous êtes tous responsables" ou encore "Nous voulons notre droit".  Les protestataires demandaient également la libération des militants détenus arbitrairement suite aux protestations qui ont viré aux violentes échauffourées la semaine dernière à Tripoli. Ils scandaient "Liberté liberté", répétant ce slogan après le nom de chaque militant détenu.
L'armée a annoncé dimanche avoir arrêté 17 personnes soupçonnées d'implication dans des "actes de vandalisme" au cours de la semaine écoulée à Tripoli, notamment l'incendie de la municipalité.

Photo Matthieu Karam

"Nous savons que vous mentez"
Des manifestants ont également tenu un sit-in devant le palais de Justice de Saïda (Liban-Sud) pour protester contre la campagne d'arrestations arbitraires menée par les forces de sécurité intérieure et l'armée libanaise, rapporte notre correspondant Mountasser Abdallah. Ils réclamaient aussi que les responsables des explosions du 4 août soient inculpés.

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Le juge Fadi Sawan, en charge de l'enquête sur l'explosion, a déjà inculpé le Premier ministre sortant, Hassane Diab, et trois anciens ministres pour négligence. Mais l'enquête fait du surplace depuis plusieurs semaines, face aux ingérences de divers responsables politiques, au grand dam d'une large frange de la population qui réclame une enquête indépendante. Les anciens ministres et députés (Amal) Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaïter, mis en accusation, ont ainsi déposé un recours contre le juge, ce qui a forcé la suspension temporaire de l'enquête en décembre dernier. Le procureur a été autorisé, mi-janvier, à reprendre ses investigations, mais rien n'a jusque-là filtré sur d'éventuels nouveaux interrogatoires qui auraient été menés.

Un groupe baptisé "Union des places de la révolution" a résumé dans un communiqué les revendications des manifestants à travers le pays. "Nous sommes ici parce que nous n’abandonnerons nos camarades en aucune circonstance et pour quelque raison que ce soit. N'emprisonnez pas ceux qui combattent l'injustice et ceux qui combattent la corruption, mais plutôt les oppresseurs et les corrompus. Nous n'avons pas vu un corrompu en prison depuis des décennies !", peut-on lire dans le texte. A propos des explosions du port, le groupe s'adresse aux politiques en ces termes : "Nous savons que vous mentez au sujet de l'enquête. Vous perdez du temps à cacher vos responsabilités".

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Des proches de victimes du 4 août ont, plus tard dans la journée, tenu un sit-in devant l'entrée du port de Beyrouth. Ils ont brandi des photos des victimes et des pancartes sur lesquelles on pouvait lire des slogans appelant à ne pas politiser l'enquête. Au son des cloches des églises et des muezzins des mosquées environnantes, les personnes rassemblées ont marqué une minute de silence, avant que plusieurs d'entre elles prennent la parole pour réclamer que justice soit faite.

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Par ailleurs, les familles des détenus dans le cadre de l'enquête ont adressé une lettre ouverte aux responsables politiques libanais et à l'opinion publique, appelant à "rendre justice aux martyrs, à lever le voile sur le sort des détenus dans l'affaire et à laisser l'enquête suivre son cours pour mener aux véritables auteurs du crime, en allant au-delà des accusations de responsabilité administrative". "En dépit des tragédies et des crimes qui ont frappé notre société ces dernières années, (...) aucun responsable de haut rang n'a été arrêté, des barrières et des lignes rouges ont toujours été érigées pour bloquer la justice", ont-elles dénoncé. "Lors de l'enquête sur l'explosion du port, les choses ont été différentes. La justice a frappé d'une main de fer. (...) Mais ce sont nos enfants qui n'avaient rien à voir dans cette affaire qui ont été arrêtés et les responsables directes laissés", ont affirmé ces familles.

Ils avaient prévu de se rassembler ce matin devant les palais de Justice de Beyrouth, Saïda, Tripoli, Jounieh et Zahlé pour marquer les six mois de la double explosion tragique au port de Beyrouth et dénoncer les arrestations arbitraires de protestataires lors des manifestations, ces derniers jours, à Tripoli, capitale du Nord. Mais l'assassinat de l'intellectuel libanais et opposant au...

commentaires (6)

Bien sûr, les meurtriers de SLIM (qui d'autre que HIZBULLAH) blâmeront rapidement les agents israéliens pour cet assassinat. Tout vrai patriote libanais sait que le Hezbollah et ses maîtres iraniens feront taire toute dissidence par tous les moyens.

Tony BASSILA

22 h 39, le 04 février 2021

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Commentaires (6)

  • Bien sûr, les meurtriers de SLIM (qui d'autre que HIZBULLAH) blâmeront rapidement les agents israéliens pour cet assassinat. Tout vrai patriote libanais sait que le Hezbollah et ses maîtres iraniens feront taire toute dissidence par tous les moyens.

    Tony BASSILA

    22 h 39, le 04 février 2021

  • On demande des enquêtes à tout bout de champs tout en sachant qu'au Liban aucune enquête n'a donné aucun résultat bien que les commanditaires des assassinats politiques soient bien connus de tous. Même l'enquête sur l'assassinat de Rafic Harriri qui a duré 12 ans s'est terminée en queue de poisson. Les dossiers de tous les hommes politiques assassinés sont VIDES, VIERGES, personne n'ose entamer même un début d'enquête. Quelle honte! Voilà la définition de «l'état failli»! Pauvre peuple du Liban...

    Romulus Maximus

    20 h 54, le 04 février 2021

  • Probablement Hizb-Allah persist et resigne six mois après. Dieu les puniras, mais quand et comment?

    Joseph Bouchi

    18 h 57, le 04 février 2021

  • Tout le monde connaît les responsables de tous ces crimes à répétition mais rares sont qui les nomment. Il faut les désarmer et les juger pour que le Liban retrouve son visage de pays de la joie de vivre et du bonheur. Ils nous ont rendus sinistres comme leur faces qui n’inspirent aucunement la sérénité et n’invitent pas à la fête. Ce sont des anges de la mort.

    Sissi zayyat

    18 h 37, le 04 février 2021

  • Les inculpations pour négligence devraient être réservées pour un cas comme: faire tomber un vase précieux par terre et le casser par mégarde, ou pour avoir mal-classé un dossier dans un tiroir et l'oublier avec le temps. L'association du mot "négligence" avec l'acte du stockage du nitrate et son maintien au port, revient à mon avis à assassiner une 2ème fois les victimes, à bout portant, et blesser les blessés une seconde fois et rajouter à la destruction de la Capitale.

    Shou fi

    17 h 13, le 04 février 2021

  • On ne saura jamais la vérité ??????

    Eleni Caridopoulou

    16 h 37, le 04 février 2021

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