
Emmanuel Macron à Beyrouth, le 6 août 2020. Thibault Camus/Pool/AFP
Au lendemain du tout premier entretien téléphonique entre le nouveau président américain, Joe Biden, et son homologue français, Emmanuel Macron, Paris a tendu la main à Washington sur le dossier libanais, pour essayer de dépasser les divergences observées entre les deux pays autour de la question du Hezbollah. La France considère que la question des armes du parti chiite doit pour l’instant être mise au second plan, l’urgence étant de sortir le Liban de la faillite économique, tandis que Washington en fait l’axe principal de sa politique au pays du Cèdre. Alors que le processus de formation du gouvernement fait du surplace depuis des mois, la France s’impatiente. Elle appelle donc les États-Unis à faciliter cette tâche, en pariant sur le fait que la nouvelle administration devrait opter pour une approche plus souple du dossier iranien et de ses ramifications régionales. L’administration Trump voyait d’un mauvais œil le fait que le Premier ministre désigné, Saad Hariri, puisse former un gouvernement auquel prendrait part le Hezbollah, principal allié local de Téhéran, ce qui exacerbait le climat général de défiance dans les tractations déjà bloquées en raison de considérations locales. C’est ce qui ressort des propos tenus par un responsable au sein de la présidence française cité par l’agence Reuters. « Il y a urgence au Liban, et nous pensons qu’il y a des priorités que nous (la France et les États-Unis) pouvons poursuivre ensemble », a indiqué le responsable français, qui a requis l’anonymat, s’adressant à des journalistes mardi. Il s’est empressé de préciser que Paris ne s’attend pas à un changement radical de la position américaine concernant le parti de Hassan Nasrallah. « Nous ne nous attendons pas à un changement dans l’attitude américaine à l’égard du Hezbollah, mais à plus de réalisme de la part des États-Unis sur ce qui est possible ou non compte tenu des circonstances au Liban », a-t-il ajouté, sans plus de précisions.
Cette position de la part de la France intervient alors que MM. Biden et Macron avaient constaté leur volonté « d’agir ensemble pour la paix et la sécurité au Proche et Moyen-Orient, en particulier sur le dossier nucléaire iranien et la situation au Liban (…) », comme on peut lire dans un communiqué publié par l’Élysée en début de semaine. Contactée par L’Orient-Le Jour, une source diplomatique française se contente d’affirmer que la France ne lâchera jamais la question libanaise, et que celle-ci fait partie des préoccupations communes entre Paris et Washington.
L’appel français à un réalisme américain concernant le Hezbollah traduit une volonté de remettre sur le tapis l’initiative française parrainée par Emmanuel Macron. Ce projet principalement axé sur la formation d’un cabinet de mission a été mis en échec pour des raisons aussi bien locales que régionales. Contrairement à la volonté de Saad Hariri, le tandem Baabda-Courant patriotique libre continue de presser pour donner une coloration politique à la future équipe, et surtout pour obtenir le tiers de blocage. Outre ces obstacles locaux, les sanctions américaines infligées à des personnalités proches du Hezbollah, peu avant le départ de Donald Trump, notamment Ali Hassan Khalil, bras droit du président de la Chambre, Nabih Berry, Youssef Fenianos, ex-ministre des Travaux publics (Marada), et surtout le leader du CPL, Gebran Bassil, ont fortement pesé sur les négociations gouvernementales, remettant les compteurs à zéro.
Le Liban et les priorités américaines
Pour le moment, rien ne prête toutefois à penser que Washington modifiera, sous Joe Biden, sa position concernant le Hezbollah. Une source diplomatique américaine souligne que les États-Unis continueront de considérer le Hezbollah comme une organisation terroriste, ce qui réduit les chances d’une éventuelle évolution sur ce dossier. Cela dit, Washington pourrait adopter un ton plus diplomatique, sans pour autant modifier sa politique, ce qui permettrait une meilleure coordination avec la France au sujet du Liban. La source diplomatique américaine appelle à attendre d’y voir un peu plus clair concernant la perception du nouveau locataire de la Maison-Blanche concernant ce dossier. La source ajoute que les rencontres de l’ambassadrice Dorothee Shea avec le chef de l’État, Michel Aoun, et le président de la Chambre, mardi, ne sont que des réunions routinières et ne visent pas à redynamiser les tractations gouvernementales. La diplomate américaine s’est pourtant entretenue hier en plus avec le leader du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, ce qui laisse à penser que les États-Unis cherchent, au moins, à tâter le terrain. Selon un communiqué du PSP, la discussion a porté aussi bien sur les négociations du tracé des frontières avec Israël que sur le dossier gouvernemental, sachant que le chef druze avait multiplié les appels à Saad Hariri à jeter l’éponge et « laisser le camp adverse (mené par le Hezbollah) gouverner le pays ».
Pour Sami Nader, analyste politique, « la France est consciente du rôle du Hezbollah et de son envergure au Liban. Elle appelle les Américains à une position plus souple sur ce plan en contrepartie d’un éventuel rôle de médiateur qu’elle pourrait jouer entre Téhéran et Washington ». « Les Français chercheraient à remettre leur initiative sur le tapis », dit-il, mais veulent éviter les obstacles américains. M. Nader est rejoint sur ce point par Joseph Bahout, directeur de l’Institut Issam Farès au sein de l’Université américaine de Beyrouth. « La conclusion que l’on peut tirer de l’entretien Biden-Macron est la suivante : le Liban ne semble pas être à la tête des priorités américaines (le communiqué américain ne mentionnait pas explicitement le Liban, contrairement à celui de l’Élysée). Washington ne compte vraisemblablement pas entraver les efforts français de relance politique au Liban. Il s’agit aussi d’un message aux Libanais pour accélérer la formation du gouvernement. »
Au lendemain du tout premier entretien téléphonique entre le nouveau président américain, Joe Biden, et son homologue français, Emmanuel Macron, Paris a tendu la main à Washington sur le dossier libanais, pour essayer de dépasser les divergences observées entre les deux pays autour de la question du Hezbollah. La France considère que la question des armes du parti chiite doit pour...
commentaires (10)
Vous êtes bien naïf Monsieur Macron, je ne doute point que vous vouliez aider le Liban, mais on n’arrête jamais le terrorisme en contentant les ravisseurs. On en peut plus, ça fait 53 ans que ca dure on nous jette tantôt à l’OLP puis la Syrie et enfin à , que ces rapaces n’ont fait que nous dépecer sans jamais donner rien en retour. Il faut que vous gardiez la pression, le Liban a toute sa place dans le nouveau Moyen Orient de paix, de prospérité, de commerce et d’avancées technologiques qui se dessine dont nous sommes hélas pour le moment les dindons de la farce car toujours arrimés malgré nous à l’axe qui a fait la faillite de ce pays. Vous avez bien écouté les Libanais quand vous êtes venu, la majorité écrasante veut que l’état et lui seul soit garant de guerre ou de paix.
Liban Libre
01 h 43, le 29 janvier 2021