C’est en revendiquant haut et fort des élections législatives anticipées que le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, tente de reprendre l’initiative en se plaçant ainsi au cœur de l’opposition au mandat du président Michel Aoun.
En retrait de la scène politique depuis qu’il s’est retranché dans l’opposition, s’aliénant en cours de route plusieurs de ses anciens partenaires politiques, M. Geagea souhaite aujourd’hui effectuer une nouvelle percée. Alors que les contours d’un large front d’opposition commence à se préciser, aux lendemains de la réunion tenue secrète des anciens Premiers ministres en présence du chef du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt le 14 janvier, le chef des FL lance sa propre attaque. Le leader chrétien est revenu hier à la charge pour marteler sa revendication d’une consultation populaire anticipée, l’unique moyen de sortir de l’impasse selon lui.
Attaquant à boulets rouges « la majorité au pouvoir », il a accusé celle-ci de faire preuve d’apathie et d’indifférence face à la crise et de faire passer en premier ses intérêts en lieu et place de la recherche d’une solution et d’un plan de sauvegarde. Il a espéré par la même occasion que « les protagonistes finiront par être rapidement convaincus que le Liban ne pourra être sauvé de la catastrophe qu’avec des élections législatives anticipées, avant qu’il ne soit trop tard ».
Selon un responsable du parti, les FL œuvrent en ce moment en direction de la constitution d’un front, dans l’espoir de rassembler toutes les forces vives opposées au mandat actuel.
« Nous sommes en voie d’entamer des contacts en direction des Kataëb, du courant du Futur, du Parti socialiste progressiste, du Parti national libéral, du Bloc national et de personnalités d’opposition indépendantes et de groupuscules de la société civile », confie un responsable du parti. Une démarche qui viendrait faire écho à la constitution d’un autre front qu’on dit en gestation, celui du club sunnite qu’avait rejoint le chef du PSP, Walid Joumblatt, il y a quelques jours.
Pour certains observateurs, Samir Geagea chercherait ainsi à reprendre les choses en main en profitant de cette brèche qui s’est ouverte et de la crise de confiance qui s’est exacerbée entre le Premier ministre désigné, Saad Hariri, et le chef de l’État, Michel Aoun. La réunion du 14 janvier dernier chez Tammam Salam avait débouché, rappelons-le, sur une volonté de faire opposition au mandat Aoun, les participants ayant fait état de leur souhait d’une participation chrétienne à ce front, selon des informations publiées dans les colonnes de L’Orient-Le Jour. Samir Geagea aurait-il saisi l’appel au vol ? « Le timing et les motifs de notre initiative n’ont absolument rien à voir avec la réunion des anciens chefs de gouvernement », affirme un cadre du parti. « Nous voulons défricher le terrain et voir un peu ce que les autres parties ont à proposer pour tenter d’obtenir des réponses claires et envisager une sortie de crise. »
Si le rassemblement politique souhaité par les FL est placé sous le label des législatives anticipées, ce n’est toutefois pas une condition sine qua non pour la constitution de ce front, assure-t-on dans ses milieux. Et pour cause : les FL savent pertinemment que seuls les Kataëb, voire peut-être certains acteurs de la société civile, partagent avec elles l’ambition d’une consultation populaire en amont et sur la base de la loi électorale en vigueur, qui avantage le parti de Samir Geagea plus que d’autres.
M. Geagea est également conscient du fait que le courant du Futur ne souhaite pas véritablement des élections anticipées, du moins tant que le Premier ministre désigné, Saad Hariri, s’accroche coûte que coûte à la formation du gouvernement et ne veut pas irriter le tandem chiite. Idem pour le PSP qui ne veut certainement pas ternir sa relation avec le chef du Parlement, Nabih Berry, un partenaire de taille, ni se mettre à dos le Hezbollah. Or, aussi bien Saad Hariri que le PSP ou le tandem chiite souhaitent que le code électoral soit modifié, ce qui, de toute évidence, va à l’encontre des desiderata des FL. Si la question des législatives est perdue d’avance, pourquoi le parti de Geagea insisterait-il encore à créer ce front ?
« L’impasse est totale. Nous ne pouvons plus assister à l’effondrement en restant les bras croisés. Si notre appel pour des élections anticipées est rejeté, nous restons ouverts à d’autres propositions, notamment au principe d’une présidentielle anticipée », glisse le cadre FL. La perche a été tendue. Car seul un parti chrétien peut réclamer la démission du chef de l’État dans l’état actuel des choses. Walid Joumblatt l’avait d’ailleurs parfaitement noté, en rappelant que ce n’est pas à lui de formuler une telle revendication.
Dans les milieux du PSP, l’idée d’un front d’opposition proposé par le parti de Geagea ne suscite pas l’enthousiasme. Dans leur optique, un nouveau front calqué sur le modèle du 14 Mars n’est plus viable depuis le célèbre compromis présidentiel qui a chamboulé toutes les donnes et les alliances.
« Si les FL souhaitent le départ du président, qu’elles s’attellent à la tâche et commencent par l’exprimer », lance un cadre du parti joumblattiste.
Du côté des acteurs de la contestation, l’idée de rejoindre un front d’opposition anti-Aoun parrainé par les FL ne séduit pas non plus.
« Tout d’abord, nous n’avons pas été sollicités directement mais par voie de presse. Ensuite, il n’est pas question pour nous de nous engager dans des élections anticipées sans une garantie en amont que la gestion du scrutin sera complètement indépendante », commente le secrétaire général du Bloc national, Pierre Issa. Il dit par ailleurs rejeter l’idée même d’un front d’opposition constitué par des partis, selon lui, inféodés à des puissances étrangères et financées par elles.
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TOUS LES PARTIS CHRETIENS SONT LES FOSSOYEUR DE LA CHRETIENTE AU LIBAN ET LES CHAMPIONS AVEC LE CPL EN TETE DE LA MAINMISE HEZBO-IRANIENNE SUR LE PAYS.
LA LIBRE EXPRESSION
13 h 40, le 19 janvier 2021