Le juge dirigeant l'enquête libanaise sur l'explosion meurtrière du 4 août dans le port de Beyrouth veut que des investigations soient menées à l'encontre de trois ministres pour leur possible responsabilité dans cette catastrophe, a annoncé mardi une source judiciaire à l'AFP. Le juge Fadi Sawan a réclamé dans une lettre au Parlement -dont un organe (la Haute Cour de justice, NDLR) est habilité à poursuivre les membres du gouvernement- l'ouverture d'une enquête sur le ministre des Travaux publics et des Transports Michel Najjar ainsi que sur ceux des Finances Ghazi Wazni et de la Justice Marie-Claude Najm, selon la même source. Il lui a aussi demandé de se pencher sur le rôle de plusieurs autres personnes ayant occupé les mêmes fonctions ministérielles dans les trois précédents gouvernements, ajoute l'agence.
"Certains soupçons"
Les investigations que le juge Sawan a lui-même effectuées ont fait naître "certains soupçons quant à la responsabilité de ces ministres et à leurs défaillances face à la gestion de la présence dans le port de nitrate d'ammonium" dont l'explosion de centaines de tonnes a fait plus de 200 morts et des milliers de blessés et ravagé une grande partie de la capitale, a ajouté cette source à l'AFP.
Contacté par L'Orient-Le Jour, le secrétaire général du Parlement, Adnane Daher, a assuré qu'il n'avait reçu aucune demande de la part du juge Sawan. Il a ensuite dit ne "pas avoir de commentaire supplémentaire" à faire à ce sujet.
Les responsables libanais ont refusé l'idée d'une enquête internationale sur cette affaire, malgré les appels au Liban et à l'étranger à des investigations indépendantes. Le gouvernement a démissionné après le drame, mais continue d'expédier les affaires courantes, un nouveau n'ayant toujours pas pu être constitué. Dans le cadre de l'enquête en cours, 25 personnes ont pour le moment été arrêtées.
Mardi encore, l’avocat général près la Cour de cassation, Ghassan Khoury, a engagé des poursuites à l'encontre de deux responsables des douanes dans le cadre de l'enquête. Il s'agit de Hani Hajj Chéhadé, membre du Conseil supérieur des douanes, et Moussa Hazimé, ancien directeur par intérim de la région de Beyrouth aux douanes. Ils seront entendus par le juge Sawan.
"Justice corrompue"
Sur le terrain, un groupe de proches des victimes a organisé un sit-in mercredi matin près du siège du Parlement, place de l'Etoile à Beyrouth. L'un des manifestants a dénoncé "une justice corrompue et politisée". "Nous voulons savoir qui nous ment", a-t-il encore ajouté aux micros des chaînes télévisées sur place. Menaçant d'"entrer au Parlement" malgré les accès barricadés, ce porte-parole a accordé aux autorités un délai d"une demi-heure" pour le vote d'une loi qui assimile les victimes de l'explosion aux "martyrs de l'armée" afin de bénéficier des indemnités prévues par ce statut aux proches des militaires tués dans l'exercice de leurs fonctions. Le groupe parlementaire affilié au mouvement Amal du président du Parlement, Nabih Berry, ont finalement proposé mercredi un texte de loi à caractère de double urgence allant dans ce sens.
Les autorités ont reconnu que l’immense déflagration du 4 août a été causée par l’explosion de 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium qui ont pris feu dans un hangar du port où elles étaient stockées depuis 2014, sans mesures de sécurité.
commentaires (10)
Quelle honte , une comédie tragique .ce pays est dorénavant voué à un échec cuisant et ce à tous les niveaux et dans tous les domaines .Time to say goodbye Car réformes il n y aura point ....
Robert Moumdjian
03 h 36, le 26 novembre 2020