Le gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, a réaffirmé mardi que le Liban n'était pas à proprement parler "en faillite", mais que la situation financière actuelle était due aux répercussions de nombreux facteurs, notamment des crises régionales, alors que le pays traverse depuis plus d'un an la pire crise économique et financière de son histoire moderne.
"Malgré les défaillances et la stagnation dues à la pandémie de coronavirus, et le fait que l'Etat n'a pas pu honorer le remboursement de ses dettes extérieures, ce qui a eu un impact direct sur les flux de capitaux étrangers, la Banque centrale a montré qu'elle avait travaillé de manière professionnelle", a déclaré M. Salamé lors d'une réunion avec des représentants de l'association des déposants. Cette association - différente de la ligue des déposants qui s'appelle à présent union - s'est créée en avril, mois durant lequel la BDL a publié plusieurs circulaires qui ont modifié le régime de change libanais.
"Le Liban n'est pas un pays en faillite, mais le secteur financier souffre des répercussions de la crise régionale ainsi que du fait que le pays a été la cible, ces trois dernières années, de campagnes de diffamation, utilisées comme moyens de pression dans le cadre des divisions régionales, et des pertes financières dues à l'accumulation du déficit budgétaire pendant les cinq dernières années", a souligné le responsable. Et d'affirmer que tous ces facteurs avaient eu un impact sur "le taux de change de la monnaie nationale", en chute libre depuis l'été dernier et qui tournait aujourd'hui sur le marché noir aux alentours de 7.500 livres pour un dollar.
Les déclarations du gouverneur restent alignées sur une position qu’il maintient depuis le début de la crise, et que tous les indicateurs semblent contredire : le PIB du pays devrait se contracter de 20 à 25 % en 2020, selon les différentes estimations mises à jour ; les réserves en devises de la BDL ont atteint un niveau critique qui ne lui permet plus de maintenir longtemps ses différents mécanismes de subventions sur les importations mis en place depuis le début de la crise ; et l’État a fait défaut en mars sur ses obligations en devises (les eurobonds) sans qu’un accord n’ait été trouvé avec ses créanciers, entre autres marqueurs. Les déposants vivent en outre depuis plus d’un an avec d’importantes restrictions bancaires affectant leurs avoirs en devises qui n’ont toujours pas été légalisées, alors que les négociations lancées en mai par le gouvernement de Hassane Diab avec le Fonds monétaire international pour décrocher une assistance financière n’ont pas abouti. Enfin, la classe politique n’a toujours pas formé de nouveau gouvernement, près de trois mois après la démission du précédent dans le sillage de la double explosion – non élucidée – qui a ravagé le port et plusieurs quartiers de Beyrouth, pour des dégâts chiffrés en milliards de dollars.
Concernant les blocages des dépôts dans les banques du pays, le gouverneur de la BDL a souligné que cette dernière avait "depuis le début de la crise, octroyé des prêts en dollars et en livres libanaises aux banques afin de leur permettre de répondre aux demandes en liquidités". "Pour pouvoir permettre à leurs clients de bénéficier de leurs dépôts, les banques doivent appliquer les différentes circulaires publiées par la Banque centrale", a exhorté dans ce contexte M. Salamé, qui a déclaré qu'il était temps "pour les banques et leurs actionnaires de prendre leurs responsabilités". Et de rappeler une série de mesures préconisées par la BDL à ces fins, comme l'augmentation de capital de 20 % et la récupération de 15 à 30 % de versements de plus de 500.000 dollar effectués à l'étranger, entre juillet 2017 et août 2020. Riad Salamé a par ailleurs indiqué que 10 milliards de dollars étaient actuellement "stockés" chez les Libanais, ce qui nécessitait la mise en place de nouveaux systèmes d'organisation des banques afin de rétablir la confiance des déposants.
commentaires (6)
Ca ne saurai tarder, hélas.
Desperados
22 h 18, le 10 novembre 2020