Rechercher
Rechercher

Économie - Réformes

Le déclenchement de l’audit juricomptable n’est plus pour demain

La ministre sortante de la Justice, Marie-Claude Najm, a indiqué hier que la BDL devait fournir à Alvarez & Marsal la documentation requise dans les délais et que Riad Salamé se devait d’appliquer la décision de l’exécutif ou de justifier son refus de le faire.

Le déclenchement de l’audit juricomptable n’est plus pour demain

Le président libanais, Michel Aoun (au c.), s’entretenant le 5 novembre au palais de Baabda avec le directeur du cabinet Alvarez & Marsal.Photo Twitter/Présidence libanaise

Les tractations autour du déclenchement de l’audit juricomptable de la Banque du Liban (BDL) lancées cette semaine entre les responsables libanais et le cabinet Alvarez & Marsal, mandaté pour mener cette opération à bien, ont finalement débouché sur un compromis « à la libanaise », à savoir son ajournement pur et simple pour au moins trois mois.

La nouvelle a été annoncée dans un communiqué de la présidence libanaise à l’issue d’une réunion au palais de Baabda entre le président Michel Aoun, le ministre des Finances, Ghazi Wazni, le gouverneur de la banque centrale, Riad Salamé, et le directeur du cabinet d’audit, James Daniell, en visite à Beyrouth depuis le début de la semaine pour tenter de débloquer la situation. « Les participants se sont mis d’accord pour faire le nécessaire afin de prolonger (de trois mois) le délai imposé pour présenter les documents demandés à Alvarez & Marsal (…) après l’expiration du délai initial, le 3 novembre », a précisé le communiqué.

Selon une source au ministère des Finances, ce report n’affectera pas les missions des deux autres auditeurs, KPMG et Oliver Wyman, chargés d’aspects différents de l’opération et à qui la BDL a assuré avoir envoyé les documents demandés.

Risque d’enlisement

Contacté, un expert juge cette décision peu surprenante compte tenu du contexte. « En prolongeant le délai, le ministère des Finances (qui représente le gouvernement dans ce dossier) se protège du risque que l’exécution du contrat soit interrompue vu que le processus prévu par le contrat pour permettre à l’auditeur d’obtenir suffisamment d’informations pour démarrer le volet juricomptable de l’audit n’a pas abouti à l’échéance fixée », estime-t-il avant d’ajouter : « Mais le fait de le prolonger pour une durée aussi longue est en contradiction avec le caractère d’urgence de la procédure et il y a évidemment un risque d’enlisement discret du processus dans son ensemble, sans parler du fait que l’attention des observateurs va également s’émousser. »

Pour mémoire

Audit : la BDL communique sans évoquer Alvarez & Marsal

De fait, le lancement de cet audit, qui doit permettre à Alvarez & Marsal de décortiquer l’historique des transactions enregistrées à la banque centrale pour repérer de possibles fraudes, ne semble pas avoir beaucoup de partisans au sein de la classe politique libanaise en dehors du Courant patriotique libre fondé par le président Aoun, et actuellement dirigé par le député Gebran Bassil. Le mouvement avait d’ailleurs prévu de manifester cette semaine à Baabda pour réclamer le déclenchement de l’audit, mais il a finalement dû reporter sa mobilisation en raison des conditions météorologiques.

Un autre observateur estime que le gouvernement sortant a accordé un délai aussi long pour ne pas avoir à renégocier avec la BDL une date butoir pour obtenir les documents demandés par le cabinet, alors que le pays doit encore se doter d’un nouvel exécutif, près de trois mois après la démission de celui dirigé par Hassane Diab, dans le sillage de la tragédie qui a frappé Beyrouth et son port le 4 août dernier.

Choisi par le gouvernement de Hassane Diab en juillet, Alvarez & Marsal a été mandaté le 1er septembre en même temps que les deux autres cabinets recrutés pour les autres aspects de l’audit : KMPG pour le volet comptable et Oliver Wyman pour son expertise dans le domaine des banques centrales. Il s’agit d’une des réformes majeures réclamées par les soutiens du pays, qui traverse une crise économique et financière sans précédent, tandis que la banque centrale affiche, elle, d’importantes pertes à son bilan – largement supérieures au montant de ses réserves de devises qui ont littéralement fondu ces dernières années – à l’exception de celles en or.

Comme le prévoit son contrat, Alvarez & Marsal a adressé, via le ministère des Finances, deux demandes préliminaires d’informations : une initiale avec une échéance qui avait été repoussée au 13 octobre et une complémentaire qui est arrivée à terme ce mardi. Mais la BDL n’a répondu favorablement qu’à moins de la moitié de ces requêtes, bloquant ainsi le déclenchement de l’audit.

Si rien dans le contrat n’indique noir sur blanc que l’auditeur peut se prévaloir de cette situation pour mettre fin au contrat (empochant au passage 150 000 dollars sur les 2,1 millions convenus), l’absence de solution peut de facto compromettre le succès de l’opération – à savoir l’élaboration d’un audit complet et fiable. Le contrat accorde un délai de 12 semaines à l’auditeur pour lui permettre de finaliser son rapport (10 pour la version préliminaire et deux de plus pour la définitive). Mais ce délai ne court qu’à partir du moment où Alvarez & Marsal considère qu’il dispose d’assez d’informations pour démarrer sa mission, ce qu’il n’a donc pas pu faire pour l’instant.

Jusqu’à présent, la BDL a invoqué la loi sur le secret bancaire en vigueur au Liban pour refuser de répondre à une partie des requêtes qui lui ont été adressées et a appelé l’État à lui demander explicitement des extraits de ses comptes afin qu’ils puissent être transmis à l’auditeur. Des arguments jugés irrecevables cette semaine par le Premier ministre sortant, Hassane Diab, et la ministre sortante de la Justice, Marie-Claude Najm, qui ont souligné que le secret bancaire ne s’appliquait pas aux comptes publics, que les informations relatives aux comptes privés enregistrés à la BDL pouvaient être transmises avec des références codées et que le gouvernement avait déjà donné son accord pour que les comptes de l’État à la BDL soient audités à travers ses décisions prises en Conseil des ministres commandant justement cet audit et mandatant Alvarez & Marsal pour le volet juricomptable. La ministre Najm a d’ailleurs martelé, en marge d’une réunion consacrée au dossier organisée hier soir au Grand Sérail, que la BDL devait fournir à Alvarez & Marsal toute la documentation requise dans les délais prévus par le contrat et que Riad Salamé se devait d’appliquer la décision du cabinet ou justifier son refus de le faire. Elle a également souligné le refus du gouverneur de la BDL de répondre aux demandes de l’auditeur engageant sa responsabilité vis-à-vis du Conseil des ministres et de l’opinion publique.

Les tractations autour du déclenchement de l’audit juricomptable de la Banque du Liban (BDL) lancées cette semaine entre les responsables libanais et le cabinet Alvarez & Marsal, mandaté pour mener cette opération à bien, ont finalement débouché sur un compromis « à la libanaise », à savoir son ajournement pur et simple pour au moins trois mois.La nouvelle a été...

commentaires (2)

Si ce que l’ex juge prétend est vrai, à savoir que Aoun et le Gendron veulent que l’audit fasse son travail, pourquoi Aoun n’a toujours pas exercé son pouvoir de chef d’état et ordonné la levée du secret bancaire pour leur faciliter le travail? Depuis quand un gouverneur d’une banque a le pouvoir absolu sans avoir à rendre compte auprès de son hiérarchie? Du pipeau. Ils veulent tous se protéger du scandale qui les éclabousserait si une chose pareil aura lieu et se cachent derrière des phrases toutes faites en accordant un délai mortifère pour le pays comme si on avait le luxe du temps et l’éternité devant nous. Le peuple seul peut mettre fin à cette mascarade en donnant un coup de pied à cette fourmilière avant qu’ils n’arrivent à nous imposer un énième gouvernement concocté par les mêmes pourris pour les blanchir et que le pillage continue.

Sissi zayyat

12 h 19, le 06 novembre 2020

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • Si ce que l’ex juge prétend est vrai, à savoir que Aoun et le Gendron veulent que l’audit fasse son travail, pourquoi Aoun n’a toujours pas exercé son pouvoir de chef d’état et ordonné la levée du secret bancaire pour leur faciliter le travail? Depuis quand un gouverneur d’une banque a le pouvoir absolu sans avoir à rendre compte auprès de son hiérarchie? Du pipeau. Ils veulent tous se protéger du scandale qui les éclabousserait si une chose pareil aura lieu et se cachent derrière des phrases toutes faites en accordant un délai mortifère pour le pays comme si on avait le luxe du temps et l’éternité devant nous. Le peuple seul peut mettre fin à cette mascarade en donnant un coup de pied à cette fourmilière avant qu’ils n’arrivent à nous imposer un énième gouvernement concocté par les mêmes pourris pour les blanchir et que le pillage continue.

    Sissi zayyat

    12 h 19, le 06 novembre 2020

  • entant donne la propension aux mensonges generalisee, etant donne le peu de confiance evidente qu'ont les citoyens envers les gens du pouvoir ET entre ceux-ci eux memes, pourquoi ceux-la - encore eux malheureusement-pourquoi le gouv ne demande OFFICIELLEMENT A LA BDL de remettre TOUS LES DOCUMENTS EN SA POSSESSION,eliminant ainsi tout pretexte legal ou autre de riad salame ? POURQUOI DONC n'etait ce le desir de vengeance de voir capituler salame, pt't meme poursuivi pour ....... je laisse le soin a raspoutine et sa nouvelle eleve de trouver.... avant meme les preuves l'incriminant dequoi que ce soit a part les media et gens du pouvoir ???

    Gaby SIOUFI

    11 h 05, le 06 novembre 2020

Retour en haut