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Culture - Musique

Omar Rahbany, cette « Libancolie » qui le/nous taraude...

Le jeune musicien venait de composer un petit air mélancolique pour piano quand a eu lieu la double explosion du port de Beyrouth. Il l’a aussitôt dédié aux victimes de cette terrible tragédie.

Omar Rahbany, cette « Libancolie » qui le/nous taraude...

Omar Rahbany au piano dans les jardins du palais Sursock le 20 septembre lors de la cérémonie mémorielle Recollect Beirut. Photo DR

Parmi les hommages musicaux qui ont été rendus aux victimes de ce funeste 4 août, Libancolie, un solo au piano pour main gauche interprété par Omar Rahbany dans le cadre de l’événement Recollect Beirut. Un petit air qui a résonné, dans les jardins du palais Sursock-Cochrane comme une prière, une douce pavane pour ce pays meurtri, qui fut en d’autres temps un jardin des délices.

Ce poétique petit morceau, de deux minutes, en do mineur, le talentueux représentant de la nouvelle génération des Rahbani l’a composé deux jours avant le cataclysme qui a frappé Beyrouth. Et c’est, en effet, uniquement avec la main gauche, la droite étant plâtrée au niveau du poignet, qu’il l’a joué pour la première fois en public lors de la soirée commémorative du 20 septembre. Une double performance pour le jeune pianiste-auteur-compositeur et producteur qui a non seulement signé une musique aussi élaborée qu’inspirée, mais a également réussi à en traduire d’une seule main ses riches harmonies et contrepoints.

« En la composant, je ne pensais absolument pas que j’allais dédicacer cette pièce aux 200 morts, 6 000 blessés, 300 000 déplacés qu’allait engendrer en quelques secondes la terrible déflagration qui s’est produite au port de Beyrouth due à l’incurie, la négligence et la corruption qui prévaut dans ce pays », confie le musicien. Et de poursuivre : « Cela faisait plus d’un mois que, plongé en pleine déprime ambiante, je n’arrivais pas à travailler. Je souffrais d’un manque total d’inspiration. Et puis, le 2 août, je m’installe devant mon piano pour laisser jaillir, spontanément, ce thème très mélancolique. » Une composition, qu’il intitule Libancolie, comme une intuition de cette nappe de tristesse qui enveloppera désormais le pays du Cèdre… Et en particulier sa capitale, qui à peine deux jours plus tard, subira le pire…

Omar Rahbany : « C’est au Liban des Rahbani que j’appartiens. » Photo DR

Jouer d’une seule main…

Ce funeste 4 août, Omar Rahbany se trouvait chez lui, dans son appartement de la banlieue nord de Beyrouth, en train, justement, de répéter son morceau. « J’étais en pleine recherche de la note juste lorsque la double explosion a eu lieu », se souvient-il. Si du fait de la distance, il en sort épargné, il en subira, d’une certaine façon, les conséquences. Car le surlendemain, à cause d’une étonnante et brusque averse – si peu commune en été au Liban et que certains imputent à la déflagration chimique –, sa voiture dérape dans une descente et va se planter droit dans un poteau électrique. Il en sortira avec une fracture au niveau du poignet droit, un plâtre et une invalidité postopératoire de cinq semaines. Ce qui dans le cas d’un pianiste est plus qu’embêtant. « Pour autant, je me suis dit que j’allais continuer à jouer. Car une main valide, ça reste cinq doigts auxquels on ajoute la pédale du piano », dit-il, dans une pirouette. En fait, cette situation va pousser ce trentenaire qui « aime les challenges » à se lancer le défi de jouer avec une seule main tout ce qu’il jouait des deux. D’autant qu’il est sollicité par le producteur Élie Rizk pour participer à Recollect Beirut en y interprétant en direct sa dernière composition. « Je me suis souvenu que Ravel avait composé un concerto pour piano à la main gauche pour un pianiste qui s’était cassé la main droite. Je me suis dit que j’allais faire de Libancolie, une pièce pour main gauche. Ça m’a encouragé à chercher des solutions techniques pour arriver à remplir au piano une large plage dynamique de notes musicales basses et hautes tout en préservant l’harmonie, la mélodie et le rythme. Le plus dur était de marquer les contrepoints avec une seule main. Pour pouvoir créer cette polyphonie, j’ai assigné une fonction précise à chaque doigt et groupe de doigts de ma main gauche », indique-t-il.

Autant de difficultés que le jeune homme a tenu à dépasser pour offrir lui-même son hommage aux victimes de la double explosion de Beyrouth. Comme un symbole de son irréductible attachement à « cette ville tiraillée entre différentes cultures, communautés et langues, qui a forgé mon identité », dit-il. « Et même si j’ai toujours répété que je me sens un citoyen du monde, je ne renie pas que le Liban m’a tout donné, notamment au niveau musical et des valeurs. Car le Liban auquel j’appartiens est celui des Rahbani, un pays de beauté, de culture, d’ouverture au monde… » affirme en conclusion Omar Rahbany. Des mots « Libancoliques » qui s’accordent avec sa petite musique en do mineur, qui se termine cependant sur un ton majeur, comme une note d’espoir…

Parmi les hommages musicaux qui ont été rendus aux victimes de ce funeste 4 août, Libancolie, un solo au piano pour main gauche interprété par Omar Rahbany dans le cadre de l’événement Recollect Beirut. Un petit air qui a résonné, dans les jardins du palais Sursock-Cochrane comme une prière, une douce pavane pour ce pays meurtri, qui fut en d’autres temps un jardin des délices. Ce...

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