Rechercher
Rechercher

Culture - Initiative

« Pour aider les artistes à revenir à leurs studios, centres, écoles, musées et théâtres »

Alors que la ville de Beyrouth et ses habitants essayent de reconstruire des repères, l’association, présidée par Walid Raad, a lancé le projet Fund the Arts in Beirut pour mettre en place des programmes flexibles et innovants destinés à la communauté artistique libanaise.

« Pour aider les artistes à revenir à leurs studios, centres, écoles, musées et théâtres »

Le programme Accomplices de Mophradat consiste en une retraite d’artistes qui a eu lieu en 2019 à Delphes. Photo Joe Namy.

« Nous ferons tout ce que nous pouvons pour que nos communautés artistiques reviennent dans les studios et les espaces de travail, dans leurs lieux de rassemblement, et dans leurs centres, leurs écoles, leurs musées et leurs théâtres. » Tel est l’engagement qu’ont pris d’une seule voix Walid Raad et Mai Abu Eldahab, respectivement président et directrice de l’association Mophradat, basée à Bruxelles, lors de la présentation de l’initiative Fund the Arts in Beirut, qui tend à « rassembler des ressources pour la suite car nous savons que nos pairs, collègues et amis du monde entier veulent participer ». « Nous nous adressons à ceux qui nous connaissent bien et qui font confiance à notre engagement à distribuer les fonds d’une manière transparente et flexible (en gardant à l’esprit l’effondrement du système financier et bancaire du Liban). Comme d’habitude, nous ferons des choix qui peuvent avoir des conséquences durables, tout en donnant la priorité à ceux qui sont déjà désavantagés et à ceux qui influencent de manière réfléchie la communauté qui les entoure », ont poursuivi ceux qui annonceront dans les prochaines semaines les programmes qu’ils vont mener en priorité au Liban, à l’issue de leurs échanges avec les différentes communautés artistiques sur le terrain.

Lire aussi

Le « I Love Beirut » tonitruant de Mika

L’idée est de verser la totalité des dons, qui sont communiqués sur le site de l’association et régulièrement actualisés, vers des individus et des institutions artistiques, tout en respectant l’esprit de Mophradat, qui soutient entre autres les artistes, les penseurs, ou les initiatives féministes et queer. Il s’agit davantage de fournir des outils pour encourager des pratiques collectives que de se concentrer sur des projets individuels.

« Créer des espaces pour de nouveaux discours artistiques et progressistes »

Au cœur du projet Fund the Arts in Beirut, différents acteurs sont impliqués, dont Krystel Khoury, chargée de coordonner les subventions. Engagée dans l’association depuis 2016, celle qui est également professeure titulaire de l’Institut supérieur des arts et des chorégraphies à l’Académie royale des beaux-arts de Bruxelles présente l’organisme avec ferveur. « C’est Mai Abu Aldahab qui a lancé Mophradat (le vocabulaire) en 2015, avec l’objectif de créer des espaces d’expression pour de nouveaux discours artistiques et progressistes, notamment pour ceux qui sont marginalisés. L’idée est de proposer des opportunités de travail et de mettre en place des outils pour que les artistes puissent développer leurs projets. Il ne s’agit pas de constituer un fonds que l’on distribue, on met en place différents programmes pour les artistes arabes, qu’ils soient dans leurs pays d’origine ou qu’ils aient émigré », explique avec enthousiasme la coordonnatrice, qui a grandi au Liban avant de poursuivre ses études en France où elle a intégré une école doctorale en anthropologie des dynamiques interculturelles.

Lire aussi

A Beyrouth, les galeristes entre colère, tristesse et (dés)espoir

Les programmes mis en place sont multiples et originaux. Le plus conventionnel, Grants for Artists, propose des bourses de production pour subventionner des projets. « Nous œuvrons également pour recommander les artistes du monde arabe auprès de grande institutions de renom dans le cadre du programme Consortium afin de les intégrer dans leur programmation. Arts Fellows propose aux jeunes artistes qui viennent d’arriver en Europe différents stages au sein de musées, théâtres, ou centre culturels afin de les intégrer dans des espaces souvent difficiles d’accès. Nous collaborons aussi avec différents lieux de résidence qui accueillent certains de nos artistes dans les arts visuels, mais aussi des musiciens, des écrivains... » explique Krystel Khoury.

Mophradat encourage les espaces de dialogue, comme celui d’Accomplices qui a eu lieu en 2019 à Delphes. Photo Jasmine Metwaly.

« Une communauté génératrice de discours pour faire évoluer les sociétés »

Les programmes menés par Mophradat donnent une idée de ceux qui seront menés à Beyrouth prochainement. « Accomplices consiste en une retraite de quelques jours qui invite des artistes, et plutôt ceux qui partagent les ambitions progressistes des révolutions arabes. On leur propose des questions auxquelles ils doivent répondre, selon le thème choisi, devant les autres participants. L’année passée, nous étions à Delphes et avons traité la question du temps : l’idée est de créer des espaces de dialogue car nous croyons que la communauté artistique est génératrice de discours qui peuvent faire avancer les sociétés. Self Organization est un format qui pourrait particulièrement convenir à la situation actuelle des artistes libanais : il s’agit pour eux de s’entendre sur des besoins communs autour de ressources qu’ils seraient plusieurs à utiliser, comme un studio de musique ou du matériel spécifique. Dans cet esprit, des “topical assemblies” peuvent être créées, regroupant des artistes intéressés par un même thème au sujet duquel ils souhaitent inviter un spécialiste en présentiel ou par zoom. Enfin, nous souhaitons développer des systèmes d’audience de voisinage rapproché et nous les encourageons à proposer eux-mêmes des formes alternatives de rencontres ou d’expositions, comme par exemple un appartement où le voisinage serait convié à voir un film, tout en respectant les consignes sanitaires actuelles », précise celle qui souligne le formidable élan de générosité qu’a suscité Fund the Arts of Beirut.

Lire aussi

Les mille éclats de la vitrine de Beyrouth

« Littéralement, l’intitulé du projet signifie “soutenir les arts de Beyrouth”. On ne met pas en valeur la notion de fonds, mais l’idée d’une situation proactive qui consiste à faire des propositions selon le contexte pour aider les artistes à continuer de travailler dans leur cadre. Nous sommes dans l’urgence, mais nous prenons le temps de la réflexion. Il y aura bien sûr des fonds pour la reconstruction des structures, tout en assurant leur continuité », termine l’enseignante-chercheuse qui s’investit depuis plusieurs années dans des projets de développement artistique, essentiellement au Liban, en Égypte et en Jordanie.

Dans la lignée d’une association qui se rassemble autour de valeurs communes, Walid Raad a précisé que toute forme de soutien était la bienvenue, « des mots, des pensées, de l’argent ou autres ».

« Nous ferons tout ce que nous pouvons pour que nos communautés artistiques reviennent dans les studios et les espaces de travail, dans leurs lieux de rassemblement, et dans leurs centres, leurs écoles, leurs musées et leurs théâtres. » Tel est l’engagement qu’ont pris d’une seule voix Walid Raad et Mai Abu Eldahab, respectivement président et directrice de l’association...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut