Rechercher
Rechercher

La preuve par neuf

L’escalade était prévisible et les indices précurseurs pointaient à l’horizon depuis plusieurs jours. L’alerte a été courte, comme il fallait s’y attendre – à moins d’une nouvelle flambée –, mais la réalité est là, criante : la vive tension hier après-midi entre les miliciens du Hezbollah et l’armée israélienne dans la région de Chebaa n’est en effet qu’une conséquence directe et un prolongement des opérations militaires en cours en Syrie. Un exemple de plus des retombées sur la scène locale de l’implication du parti chiite dans les conflits régionaux, et plus particulièrement dans la défense iranienne effrénée du régime de Bachar el-Assad.

Encore une fois, les Libanais ont été témoins hier de cette prise d’otage dont leur pays est victime de la part du camp iranien pour alimenter purement et simplement la guerre globale engagée au Moyen-Orient par le pouvoir des mollahs à Téhéran. La tension, accompagnée de tirs, survenue hier à la frontière avec Israël, illustre en tout état de cause, n’en déplaise à certains, le bien-fondé du projet de neutralité positive remis sur le tapis par le patriarche maronite, Béchara Raï, depuis le début du mois de juillet. Mais il n’y a de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre… Et celui aussi dont la mauvaise foi frôle l’arrogance, doublée de mépris.

La campagne de dénigrement et de critiques, au ton souvent haineux, orchestrée et télécommandée en coulisses par le directoire du Hezbollah contre l’initiative de Bkerké, est significative à plus d’un égard. Elle reflète d’abord le fossé – à caractère géostratégique – qui ne cesse de s’agrandir entre la formation pro-iranienne et un large éventail de milieux politiques et populaires transcommunautaires. Le bref épisode d’hier après-midi à Chebaa illustre, s’il en était encore besoin, à quel point deux mondes, deux visions de la vie et de la vocation du pays du Cèdre s’affrontent à plus d’un niveau.

Ce qui rend un tel clivage particulièrement préoccupant, c’est qu’il est fondé sur une base idéologique théocratique dépassant le cadre national libanais et solidement ancrée à la politique expansionniste mise en place par le tout-puissant appareil paraétatique des gardiens de la révolution iraniens.

C’est cette dimension doctrinale qui fait que l’hostilité manifestée aussi violemment par les détracteurs de la neutralité positive est en réalité l’expression d’une volonté bien réfléchie d’entraîner le pays, progressivement et de façon très pernicieuse, sur un terrain jalonné de valeurs sociétales et de principes de vie qui constituent l’antithèse des préceptes libéraux et d’ouverture sur le monde qui ont caractérisé la société libanaise depuis la proclamation du Grand Liban il y a cent ans, plus particulièrement depuis la période post-

indépendance de 1943.

La stratégie visant à arrimer ainsi le pays au projet guerrier d’exportation de la République islamique iranienne, appliquée résolument par les gardiens de la révolution (les pasdaran) dont le Hezbollah représente la tête de pont sur les bords de la Méditerranée, est par essence totalement incompatible avec la neutralité positive défendue par le patriarche maronite. La tension à Chebaa, fût-elle soigneusement dosée comme ce fut le cas hier, en est la preuve la plus éclatante.

Une telle réalité dévoile au grand jour le vrai visage des personnalités et factions qui soutiennent cyniquement que l’initiative de Bkerké doit faire l’objet d’un « dialogue national » (sic !). Une façon sournoise de reléguer aux oubliettes et de court-circuiter ce qui constitue une voie de salut pour le Liban et ce qui a été, et reste toujours, le fondement du pacte national de 1943. Les expériences passées de « dialogue » stérile avec le Hezbollah sur la stratégie de défense et sur la teneur de la déclaration de Baabda, concoctée sous l’égide du président Michel Sleiman en juin 2012, démontrent que pour la formation pro-iranienne, « dialogue » est synonyme, en la matière, de manœuvre dilatoire.

Dans un tel contexte explosif, d’aucuns s’interrogent sur le bien-fondé du timing de cette relance du principe de neutralité à l’ombre de la guerre ouverte dont la région est le théâtre. Mais il échappe à ces « neutralo-sceptiques » que c’est précisément parce que les retombées des aventures guerrières du camp iranien ont atteint aujourd’hui leur apogée sur la scène locale qu’il est maintenant grand temps de rappeler haut et fort que la neutralité positive est un passage obligé pour le rétablissement d’une stabilité pérenne et pour un redressement rapide dans le pays. Que faut-il de plus qu’un effondrement généralisé aux plans économique, financier, social, politique et institutionnel pour, enfin, revendiquer une simple vie normale, loin du conflit des axes, après des décennies marquées par la « guerre des autres » sur la scène libanaise ?

L’escalade était prévisible et les indices précurseurs pointaient à l’horizon depuis plusieurs jours. L’alerte a été courte, comme il fallait s’y attendre – à moins d’une nouvelle flambée –, mais la réalité est là, criante : la vive tension hier après-midi entre les miliciens du Hezbollah et l’armée israélienne dans la région de Chebaa n’est en effet qu’une...

commentaires (12)

Non, nous n’avons pas envie de guerres et encore moins celles des autres, qui qu’ils soient. Les libanais de ma génération (années soixante), n’auront connu que la guerre! Au début du chemin, ils ont volé notre jeunesse en mettant stupidement le pays à feu et à sang et maintenant, après avoir passé toute une vie à essayer de nous remettre sur pied, ils nous vole la retraite. Oui, l’initiative du patriarche est bien fondée mais pas suffisamment courageuse. Comment peut-on être neutre tout en restant en guerre? Le Liban a tout autant besoin de paix que de neutralité! Premièrement, nous sommes un pays commerçant et le commerce a besoin de paix pour prospérer. Ça sert à quoi donc d’être en guerre avec nos voisins? Deuxièmement, pour pouvoir construire un pays productif et soutenir le commerce, il faudrait bien avoir un jour quelques infrastructures et les nôtres sont déjà suffisamment déficientes pour ne pas vouloir les voir réduites en poussière à tout bout de champ! Pourquoi n’osons-nous jamais parler de faire la paix avec Israël? Voilà bien l’Egypte, la Jordanie, même l’Arabie... Et regardez donc Chypre qui construit tranquillement son économie tout en exploitant ses réserves. Au lieu de n’être que de la chair à canon ou de vulgaires pions toujours entrain de servir les intérêts des autres, pourquoi ne deviendrions-nous pas une source d’inspiration pour tout le Moyen-Orient en dessinant un vaste plan de paix pour toute la région?

Fady Abou Hanna

00 h 53, le 29 juillet 2020

Tous les commentaires

Commentaires (12)

  • Non, nous n’avons pas envie de guerres et encore moins celles des autres, qui qu’ils soient. Les libanais de ma génération (années soixante), n’auront connu que la guerre! Au début du chemin, ils ont volé notre jeunesse en mettant stupidement le pays à feu et à sang et maintenant, après avoir passé toute une vie à essayer de nous remettre sur pied, ils nous vole la retraite. Oui, l’initiative du patriarche est bien fondée mais pas suffisamment courageuse. Comment peut-on être neutre tout en restant en guerre? Le Liban a tout autant besoin de paix que de neutralité! Premièrement, nous sommes un pays commerçant et le commerce a besoin de paix pour prospérer. Ça sert à quoi donc d’être en guerre avec nos voisins? Deuxièmement, pour pouvoir construire un pays productif et soutenir le commerce, il faudrait bien avoir un jour quelques infrastructures et les nôtres sont déjà suffisamment déficientes pour ne pas vouloir les voir réduites en poussière à tout bout de champ! Pourquoi n’osons-nous jamais parler de faire la paix avec Israël? Voilà bien l’Egypte, la Jordanie, même l’Arabie... Et regardez donc Chypre qui construit tranquillement son économie tout en exploitant ses réserves. Au lieu de n’être que de la chair à canon ou de vulgaires pions toujours entrain de servir les intérêts des autres, pourquoi ne deviendrions-nous pas une source d’inspiration pour tout le Moyen-Orient en dessinant un vaste plan de paix pour toute la région?

    Fady Abou Hanna

    00 h 53, le 29 juillet 2020

  • Excellent.Il faut quand même se rappeler qu’avant l’arrivée des palestiniens et malgré toutes les guerres qui avaient éclaté dans La région, le Liban, puisque neutre n’a jamais fait l’objet d’attaque ni même d’agression de la part d’Israël. C’est quand les Palestiniens, syriens et maintenant iraniens ont pris possession de ses frontières que nous sommes sur le qui vive et craignons à chaque fois qu’un avion passe au dessus de notre tête que le ciel ne nous tombe dessus. Donc c’est bien la présence de ces gens là qui ont mis le Liban en danger et qui veulent absolument le détruire sous prétexte de le défendre.

    Sissi zayyat

    17 h 54, le 28 juillet 2020

  • J'ai lu avec attention cet article et meme les commentaires differents sur l'article Mon point de vu est different de tout cela sur ce sujet POUR AVOIR UNE PAIX DEFINITIF DANS CE PAYS , QU'EST CE QUI EMPECHE LES LIBANAIS A NEGOCIER AVEC ISRAEL AVEC L'AIDE DE PAYS AMIS COMME LA FRANCE PAR EXAMPLE UN ACCORD DE PAIX QUI AJUSTERAIT LES FRONTIERES TERRESTRES ET MARITIMES AVEC LE LIBAN ET FINIRAIT AVEC LE BESOIN D'UNE MILICE ILLEGALE? EL'EGYPTE ET LA JORDANIE ET MEME ARAFAT A SIGNE DES ACCORDS AVEC ISRAEL , SOMMES NOUS PLUS ROYALISTE QUE LE ROI? N'AVONS NOUS PAS PAYE ASSEZ CHER AVEC LES ACCORDS IMPOSES PAR NASSER EN 1969 JUSQU' LA GUERRE DE 1975 ( je me refuse a dire la guerre civile car elle a ete commencee par les Palestiniens contre des Libanais meme si une partie des Libanais ont rejoint les palestiniens LA VERITE UNE PAIX HONORABLE RECUPERERA TOUTES LES RAISONS DE L'EXISTENCE D'UNE MILICE QUI RUINE LE PAYS ET REMETTRA IMMEDIATEMENT A FLOT LE LIBAN SVP NE CRIER PAS A LA TRAHISON DES PALESTINIENS, C'EST EUX MEMES QUI ONT TRAHI LE LIBAN QUI LES ACCUEILLI DEPUIS 1948

    LA VERITE

    17 h 38, le 28 juillet 2020

  • Cher M.Touma l,es agressions quotidiennes d'Israël contre le le pays du CEDRE , avant même l'existence du Hezbollah , ne semblent pas vous déranger outre mesure . Nous sommes un pays bafoué et piétiné depuis belle lurette .Ne dit-on pas qu'il n'y a pire sourd que celui qui ne veut point entendre

    Hitti arlette

    16 h 40, le 28 juillet 2020

  • Cher M.Touma Les agressions quotidiennes d'israel s contre l'espace aérien libanais ne semble pasvous déranger outre mesure

    Hitti arlette

    16 h 32, le 28 juillet 2020

  • Bravo Monsieur Touma pour cerre analyse magistrale et réaliste! Jusqu'à quand le peuple libanais va continuer à cohabiter avec ses "ravisseurs" et leurs "associés" et comparses, sans même sourciller??? Au delà de tous les déboires de santé et l'effondrement financier que travers le pays,, le Patriarche Maronite Rai a offert un grand bol d'oxygène à tous les libanais sans exception, à savoir son projet de "NEUTRALITE" du pays du Cèdre. Beaucoup y ont adhéré, mais malheuresement de façon timide, alors que ceux qui prétendent avoir seuls, l'exclusivité de dispenser la guerre et la paix sur tout le territoire national, soutenu en celà par le parti au pouvoir, le CPL. ont réagi "vertement". Qu'attendent les citoyens libres de ce pays pour monter en masse encourager le Patriarche, et exprimer leur appui et leur volonté populaire en faveur de cette initiative vitale pour tous, (y inclus ses détracteurs, surtout à moyen et long terme!).??? Peuple libanais réveilles-toi et agis!!!

    Salim Dahdah

    10 h 43, le 28 juillet 2020

  • IL N,Y A QU,UNE VOIE SEULE ET UNIQUE. LA NEUTRALITE DU PAYS DOIT ETRE OPTEE DE BONGRE LOCALEMENT OU DOIT ETRE IMPOSEE DE MALGRE LOCALEMENT ET AUTREMENT AVEC TOUT CE QUE CES MOTS PEUVENT SIGNIFIER.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 42, le 28 juillet 2020

  • FAUT EN FINIR AVEC LES MILICES. DESARMEMENT AU PROFIT DE L,ARMEE NATIONALE. NEUTRALITE GENERALE DU LIBAN A LA SUISSE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 26, le 28 juillet 2020

  • Il ne reste plus rien à commenter: tout a été dit à 2h 41 ce matin, et dans un français impeccable(une fois n'est pas coutume...)!

    Georges MELKI

    09 h 44, le 28 juillet 2020

  • C'EST PRECISEMENT -les retombées des aventures guerrières du camp iranien - QUE CE DERNIER RECHERCHE. QUEL MEILLEURE FACON DE RAPPELER A LEURS OUAILLES LE BESOIN DE SON ARMEMENT , CAR AUSSI NAIVES ET CREDULES QU'ELLES SOIENT ELLES RISQUERAIENT DE FILER D'ENTRE SON FILET.

    Gaby SIOUFI

    09 h 39, le 28 juillet 2020

  • Il fallait voir et écouter les réactions des libanais hier suite à cet ( incident sécuritaire). Ils se frotter les mains en priant que cela dégénère et provoque une guerre destructrice pour qu’ils soient enfin débarrasser de ces vendus quitte à mourrir sous les décombres, c’est dire leur désarroi et leur état d’esprit actuel. Ils savent qu’ils n’ont plus rien à perdre et que les mauvais jours sont déjà derrière eux. Le pire qui puisse encore leur arriver est de subir la dictature de ce parti vendu sans pouvoir se défendre puisque le pouvoir est sous les bottes des traitres et qu’ils continueraient à collaborer avec lui jusqu’à ce que le Liban soit disparu de la carte et remplacé par un autre régit par des enturbanés vendus. Nous sommes disposé à mourir plutôt que de voir notre pays transformé en banlieue perse. ALORS QU’ATTEND ON POUR DESCENDRE DANS LA RUE POUR LES CHASSER DE LEUR FAUTEUIL? DE QUOI ONT ENCORE PEUR LES LIBANAIS? QUE HN RETOURNE SES ARMES CONTRE EUX. JAMAIS IL N’OSERA FAIRE UNE CHOSE PAREIL LES YEUX DU MONDE ENTIER SONT BARQUES SUR LUI ET N‘ATTENDENT QU’UN FAUX PAS ET IL LE SAIT PERTINEMMENT D’OÙ SON HÉSITATION A DÉCLENCHER UNE GUERRE FACTICE CONTRE QUI QUE SE SOIT. ET PUIS MOURIR POUR MOURIR AUTANT LE FAIRE DEBOUT EN DÉFENDANT NOTRE MÈRE PATRIE CAR C’EST DE CELA DONT IL S’AGIT.

    Sissi zayyat

    09 h 30, le 28 juillet 2020

  • Très bien dit Mr Touma... Mais vous ne prêchez qu’à des convertis: une certaine élite éduquée, rationnelle, scientifique qui avait fait le même constat depuis plus d’une décennie et dénoncé la mainmise totale du parti de Dieu sur la destinée du pays...et qui nous mènera à une catastrophe militaire sans pareille! Mais le hic et le plus révoltant dans l’histoire, c’est le jeu criminel du CPL et du Président qui se sont acoquinés avec cette milice de manière hypocrite pour arriver au pouvoir et soi-disant sauvegarder la présence chrétienne, qui se sont fait mener comme des enfants de chœurs et n’osent même pas critiquer où dénoncer ces comportements criminels... Juste à lire la dernière diatribe de Mr Bassil récemment, prétendant qu’il serait d’accord avec le Patriarche Rai de prôner la neutralité du pays, mais à travers un dialogue (Lequel?) national qui ne s’attaquerait pas au Hezbollah : plus hypocrite et langue de bois que ça, on n’ en fait plus! Malheureusement, Mr Touma, on a peur d’avoir atteint le point de non retour et que seulement un changement radical dans la géopolitique régionale où une guerre destructrice avec le voisin du Sud pourrait nous débarrasser de ce fléau à l’idéologie moyenâgeuse et peut-être sauver le Liban où ce qui va en rester!!.... En attendant, on peut toujours se consoler avec des vœux pieux,

    Saliba Nouhad

    02 h 41, le 28 juillet 2020

Retour en haut