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Politique - Hémicycle

Pourquoi la loi sur l’amnistie générale ne fait pas l’unanimité

Une manifestante en route hier pour le palais de l’Unesco, afin de protester contre la loi sur l’amnistie générale. Aziz Taher/Reuters

La loi sur l’amnistie générale n’aura finalement pas été votée hier, en raison de l’absence d’un consensus politique à cet égard et après des débats houleux à l’hémicycle (lire par ailleurs). La rue a également manifesté son désaccord, au moyen de plusieurs sit-in organisés dans la journée un peu partout dans le pays. Il n’en demeure pas moins que cette loi reviendra sans doute très prochainement sur le tapis, à l’heure où de nombreux militants de la société civile continuent de dénoncer son contenu qui, selon eux, bafoue l’État de droit.

« Soit il y a une justice, soit il n’y en a pas. Que la justice émette des sentences dans toutes ces affaires (qui sont concernées par l’amnistie générale) », souligne à L’Orient-Le Jour le général à la retraite Khalil Hélou. « Pourquoi amnistier une personne qui a déjà été condamnée ? Quant à ceux qui ont purgé leur peine, il faut les faire sortir de prison et juger ceux qui ne l’ont pas encore été », ajoute le général Hélou.

Deux textes de loi relatifs à l’amnistie générale avaient été présentés au Parlement le mois dernier, mais n’avaient pu être examinés, leur caractère de double urgence n’ayant pas été retenu. Dans leur version d’origine, les projets de loi présentés péchaient par leur caractère général, puisqu’ils ne précisaient pas quels étaient les crimes qui bénéficieraient de l’amnistie, à l’exception de tout autre. Renvoyés à une sous-commission parlementaire, les textes ont été travaillés pendant un mois pour parvenir à une mouture à même de satisfaire les différentes composantes, excluant notamment les agressions contre l’armée, le trafic de drogue et les infractions liées à la dilapidation des fonds publics, et incluant les membres de groupes n’ayant pas commis d’attaques terroristes, les cultivateurs et consommateurs de drogue ainsi que les civils libanais ayant fui en Israël lors du retrait israélien du Liban-Sud, en mai 2000. Parvenu il y a 15 jours en commissions mixtes, le texte final remanié s’est heurté à la volte-face de députés proches du Hezbollah, qui sont revenus sur leur acceptation d’inclure dans la loi d’amnistie les Libanais passés en Israël.

« Il y a certes injustice à l’encontre de certains islamistes qui croupissent en prison depuis des années, en attendant d’être jugés», précise le général Hélou. «Depuis que quatre juges ont été abattus à Saïda (en plein prétoire, le 8 juin 1999 par des membres du groupuscule islamique Esbat el-Ansar), aucun juge n’ose prendre en charge le dossier des islamistes, ajoute l’ancien militaire. Quant aux Libanais qui ont fui en Israël, il s’agit d’un dossier politique et non pas judiciaire. »

Pour Nizar Saghiyé, directeur de l’ONG Legal Agenda, « tout vote d’une amnistie générale doit s’accompagner de réformes pour éviter de reproduire les mêmes schémas ». « Il s’agit d’une amnistie politisée et confessionnalisée jusqu’à l’obsession. Le Hezbollah ne va pas accepter la clause concernant les collaborateurs d’Israël ; les chrétiens ne vont pas accepter les clauses concernant les islamistes. Pour ce qui est des trafiquants de drogue, il y a des règles internationales à respecter », estime encore M. Saghiyé. L’expert dénonce en outre « l’importance accordée à la loi sur l’amnistie, à un moment où tout le monde évoque la responsabilité et la lutte conte la corruption ».

Manifestations diverses

En matinée, sur la voie express du Ring à Beyrouth, une poignée de manifestants, drapeaux libanais en main, se sont regroupés à pied ou en voiture afin de protester contre la tenue de la séance plénière du Parlement. Leur objectif était d’exprimer leur hostilité envers la classe dirigeante, de réclamer une justice indépendante, sans pour autant se focaliser sur la loi d’amnistie. Ces manifestants voulaient poursuivre leur sit-in devant le palais de l’Unesco, mais les forces de l’ordre avaient déjà bouclé le quartier, ce qui a conduit à quelques tensions sur place.

Selon notre correspondant au Liban-Sud, Mountasser Abdallah, une trentaine de protestataires, issus de l’Organisation populaire nassérienne d’Oussama Saad, se sont aussi rassemblés à Saïda, pour s’opposer à cette amnistie. Un rassemblement similaire a eu lieu à Nabatiyé. Des drapeaux israéliens ont été brûlés par des manifestants venus exprimer leur colère.

A contrario, à Beddaoui au Liban-Nord, des familles de détenus islamistes, qui devraient bénéficier de cette loi d’amnistie, se sont rassemblées pour exprimer leur soutien au vote du texte en question.


La loi sur l’amnistie générale n’aura finalement pas été votée hier, en raison de l’absence d’un consensus politique à cet égard et après des débats houleux à l’hémicycle (lire par ailleurs). La rue a également manifesté son désaccord, au moyen de plusieurs sit-in organisés dans la journée un peu partout dans le pays. Il n’en demeure pas moins que cette loi reviendra...

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