C’est parallèlement au début de ses négociations avec le Fonds monétaire international que le Liban officiel a voulu afficher sa détermination à s’attaquer à l’épineux dossier de la lutte contre la contrebande à travers les points de passage illégaux à la frontière avec la Syrie. Une façon pour le pouvoir d’adresser un message positif à la communauté internationale qui continue d’exhorter les autorités libanaises à appliquer les réformes économiques et financières exigées, notamment la lutte contre la corruption, le gaspillage et la contrebande. C’est dans ce cadre que s’inscrit la réunion hier du Conseil supérieur de la défense au palais de Baabda sous la présidence du chef de l’État, Michel Aoun, même si une source proche de Baabda assure à L’Orient-Le Jour que le timing de la réunion n’a rien à voir avec les tractations avec le FMI. « Le président Aoun a décidé de convoquer le Conseil supérieur de la défense pour répondre favorablement aux voix qui se sont élevées récemment, appelant l’État à s’engager dans la bataille contre la contrebande et pour que les mesures adéquates soient prises dans les plus brefs délais », déclare cette source. La réunion s’est tenue en présence du chef du gouvernement Hassane Diab et des ministres Zeina Acar (Défense), Mohammad Fahmi (Intérieur), Nassif Hitti (Affaires étrangères), Ghazi Wazni (Finances), Marie-Claude Najm (Justice), Raoul Nehmé (Économie) ainsi que Raymond Ghajar (Énergie), dans la mesure où les discussions ont abordé la contrebande de carburant. Étaient également présents le procureur général Ghassan Oueidate, le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire, Peter Germanos, le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, les chefs des appareils de sécurité et les chefs des SR de la troupe et des Forces de sécurité intérieure.
Selon notre correspondante à Baabda, Hoda Chédid, Michel Aoun a insisté au cours de la réunion sur l’importance de contrôler la contrebande d’une manière ferme, même si cela exige un amendement de certains textes de loi en vigueur.
Pour sa part, le Premier ministre a exposé les pertes subies par l’État à cause de la contrebande, détaillant les obstacles entravant encore la lutte contre ce phénomène et soulignant que la situation du pays ne peut plus supporter l’évasion fiscale ou douanière qui cause des pertes en devises fortes, notant que le mazout et la farine constituent la plus grande part des produits concernés par la contrebande. De son côté, le général Aoun a exposé la situation des frontières terrestres, notamment les points de passage illégaux de l’Anti-Liban jusqu’aux fermes de Chebaa (Sud). Le commandant en chef de l’armée a proposé une série de mesures à prendre pour résoudre la crise de la contrebande. Selon notre correspondante, et bien qu’il existe quelque 130 passages illégaux, les contrebandiers utilisent surtout deux passages, l’un dans le Hermel (Est) et l’autre à Wadi Khaled (Nord).
Intensifier le contrôle
Les participants ont pris la décision de fermer tous les points de passage illégaux et d’augmenter le nombre de postes-frontières. Dans un communiqué à l’issue de la réunion, ils ont également indiqué être convenus d’intensifier le contrôle des frontières et d’appliquer des sanctions sévères à l’encontre des trafiquants et leurs complices, conformément aux lois en vigueur.
Si le pouvoir entend ainsi donner l’impression de s’engager dans la lutte contre la contrebande, ses actions ne semblent pas satisfaire l’opposition, du moins pour le moment. Le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, a ainsi estimé, sur Twitter, que « le dossier de la contrebande n’exige ni réunions ni explications. Il exige une décision claire du gouvernement à la faveur de laquelle l’armée et les services de sécurité seraient chargés de fermer tous les points de passage illégaux ».
Hawat veut remettre à la justice les noms de trafiquants
Ziad Hawat, député des Forces libanaises de Jbeil, a tenu hier une conférence de presse pour dénoncer les pratiques de contrebande avec la Syrie, annonçant qu’il allait remettre à la justice les noms de certains trafiquants et désigner les points de passage illégaux qu’ils empruntent. « La contrebande est un crime à l’encontre de l’État, sa souveraineté, son budget et son économie », a affirmé M. Hawat. Il a accusé « les forces de facto présentes dans les zones frontalières entre le Liban et la Syrie de décider quels sont les produits sujets à la contrebande », dans une claire allusion au Hezbollah. « Comment peut-on parler de souveraineté et de prestige de l’État quand cohabitent deux arsenaux et deux États ? » s’est interrogé le député FL. « Il n’y a pas de décision politique qui permette aux appareils de sécurité de prendre les mesures adéquates en matière de contrebande », a-t-il tonné, faisant savoir qu’il possède les noms de certains trafiquants et détaillant, carte à l’appui, la liste des points de passage illégaux. Affirmant qu’il remettra ces données à la justice, il l’a appelée à se saisir du dossier. « Il y a des points de passage légaux et d’autres illégaux. Et la contrebande nécessite l’implication de deux parties », a encore dit M. Hawat, avant de poursuivre : « La Syrie et l’armée syrienne sont partenaires dans la contrebande, par l’intermédiaire de certains officiers et soldats syriens. »
commentaires (7)
ENCORE CES REUNIONS, TOUJOURS CETTE LANGUE DE BOIS, ENCORE ET ENCORE CETTE MAFIA QUI TIENT A NOUS PRENDRE POUR - PLUS CONS- QUE NOUS L'AVIONS ETE/
Gaby SIOUFI
16 h 45, le 14 mai 2020