La Banque du Liban a fixé le taux livre/dollar à 2 600 livres cette semaine, un taux qui sera appliqué aux "petits déposants" concerné par le dispositif institué vendredi dernier par les circulaires n°148 et n°149 pour leur permettre, s’ils le souhaitent, de retirer leurs économies en livres ou en dollars aux taux du marché, donc à des conditions en principe plus avantageuses pour eux.
L’information a été confirmée à L’Orient-Le Jour par plusieurs sources bancaires ainsi qu’une source à la Banque centrale. Selon le premier des deux textes, les déposants concernés sont ceux dont le total cumulé de l’ensemble des comptes dans une même banque ne dépasserait pas 5 millions de livres ou 3 000 dollars (au taux officiel de 1 507,5 livres pour un dollar). Selon ce dispositif, ces déposants pourront donc retirer en espèces leurs dépôts en réalisant une plus-value équivalente à la différence entre les deux taux de change, une possibilité qui leur est ouverte pendant trois mois uniquement et à condition qu’il soldent les éventuels prêts qu’ils auraient en cours.
Les importateurs de produits stratégiques (blé, carburant, produits pharmaceutiques, matières premières pour les fabricants de médicaments et équipements médicaux) qui peuvent acheter des dollars au taux de 1 515 livres via les mécanismes prévus par les circulaires n°530 n°535, publiées en octobre et novembre, ne sont pas concernés.
Le nouveau taux va ainsi coexister avec la parité officielle toujours en vigueur pour les autres transactions bancaire (1 515 livres, soit le taux officiel plus la marge tolérée des banques) et celui pratiqué par les changeurs, qui gravite autour de 2 900 livres. Il a été unilatéralement fixé par la BDL en attendant la formation de l’unité qu’elle a prévu de former avec des changeurs « de catégorie A », conformément à la circulaire n°149, et qui sera chargée de mettre régulièrement à jour ce taux pendant six mois. Cette unité contribuera en outre à la mise en place d’une plateforme électronique, opérée avec les banques du pays, qui publiera de manière régulière et transparente les évolutions des taux de change appliqués sur le territoire pendant cette période.
Dimanche soir, l’Association des banques du Liban a salué dans un communiqué la mise en place de ce dispositif qui entame un changement du régime de change livre/dollar qui était stabilisé par la BDL depuis 1997, vers un système transitoire, tout en faisant un geste envers les petits déposants en plein contexte de crise économique et financière, dont les effets ont été aggravés par le confinement décrété le 15 mars suite à l’épidémie de Covid-19.
Pour rappel, la crise de liquidités que traverse le pays, renforcée par les restrictions mises en place par les banques, a contribué à doper le taux livre/dollar sur le marché secondaire depuis fin août dernier. En fin de semaine dernière, les changeurs demandaient près de 2 900 livres pour un dollar. Plusieurs banquiers contactés par L’Orient-Le Jour la semaine dernière ont toutefois indiqué que la mise en place du mécanisme institué par les circulaires n°148 et n°149 devait être complétée par d’autres mesures d’assouplissement, notamment sur les transferts vers l’étranger, pour ne pas davantage gonfler le taux de change et l’inflation - l’une des finalités étant de dispenser les banques de devoir donner des dollars en espèces. D’autres ont souligné les problèmes légaux soulevés par le texte qui crée notamment une inégalité de fait entre déposants.
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17 h 24, le 06 avril 2020