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Culture - État des lieux

Crise économique, coronavirus... les coups durs s’enchaînent pour le secteur culturel

Le 9 mars, le ministre du Tourisme décrétait la fermeture des musées, théâtres, cinémas et autres salles de spectacle sur tout le territoire pour lutter contre la propagation du coronavirus. Ne restaient que quelques rares galeries qui, à Beyrouth, demeuraient ouvertes, parfois seulement sur rendez-vous, en attendant l’annonce d’un état d’urgence sanitaire...

L’exposition de l’artiste Serwan Baran à la galerie Saleh Barakat était encore accessible avant le week-end. Le sera-t-elle toujours lundi ? Photo Paul Hennebelle

En ces temps de coronavirus, de réclusion chez soi, de peur de tout ce qui ressemble de près ou de loin à un groupement de personnes, les annulations et les annonces de fermeture pleuvent dans le secteur culturel libanais, notamment après le décret du ministère du Tourisme du 9 mars suspendant toutes les activités musicales et culturelles au Liban afin de limiter la propagation du nouveau coronavirus (SARS-CoV-2). Les rues sont presque désertes. Les centres commerciaux, restaurants et boutiques sont également fermés depuis quelque jours.

Seules quelques galeries gardaient leurs portes ouvertes, en attendant une fermeture imposée par l’État, la plupart des galeristes estimant que le nombre réduit de visiteurs ne constitue pas un facteur de risque. « Avec trois personnes qui foulent, en moyenne en cours de journée, les 500 m2 de notre espace, il n’y a pas vraiment de danger », assure Naïla Kettaneh-Kunigk. La propriétaire de Tanit à Mar Mikhaël maintenait donc (jusqu’à hier soir du moins, NDLR) ses horaires habituels d’ouverture. La galerie Cheriff Tabet (D Beirut, la Quarantaine) doit lancer à partir du mercredi 18 mars l’exposition « À travers le pin et le végétal » de l’artiste libano-française Marie Traboulsi Marinier. Idem pour 392 Rmeil 393, à Gemmayzé, qui présentait comme prévu les œuvres digitales de Ralph Hage, même si la conférence que devait y donner l’artiste il y a quelques jours a fini par se faire via les réseaux sociaux. D’autres galeries sont moins catégoriques et suivent au jour le jour l’évolution de la situation. Beaucoup ont choisi de fonctionner sur rendez-vous préalable. À l’instar de la galerie Plateforme (Fassouh) qui présente une belle sélection de peintures et photos sur le thème de la Békaa.

« J’ai toujours fait de la résistance culturelle. Cette fois, c’est contre le coronavirus que je résiste », avance, mi-figue, mi-raisin, Saleh Barakat. Le galeriste, qui présente à Beyrouth les peintures et sculptures de deux artistes irakiens, Serwan Baran dans sa galerie éponyme Saleh Barakat de Clemenceau, et Waleed R. Qaisi dans le petit espace d’Agial, rue Abdel Aziz, confesse, cependant, que le nombre de visiteurs diminue de jour en jour. Ce qui l’a poussé à fermer ses espaces durant le week-end. Il assure toutefois qu’il restera ouvert jusqu’au jour où tout, sans exception, dans le pays fermera. « À ce moment-là, j’abdiquerai. En attendant, on reçoit les visiteurs avec du gel désinfectant à la porte… »

D’autres ont préféré réduire leurs horaires. C’est le cas de la galerie Janine Rubeiz, à Raouché, qui « malgré un flux constant de visiteurs intéressés par les œuvres inspirées de la révolution d’octobre 2019 » (dixit la propriétaire Nadine Begdache) limite dorénavant ses heures d’ouverture à 11h-15h.

Et seule la galerie Sfeir-Semler (la Quarantaine), qui accroche les peintures récentes d’Etel Adnan, a pris la décision radicale « de suspendre ses activités par mesure de précaution », indique la responsable des lieux Léa Chikhani.

Une mesure de sécurité que s’est finalement résolue à prendre, un peu à contrecœur semble-t-il, Zeina Arida, la directrice du musée Sursock. « Il y a quelques jours encore, on a reçu deux importants groupes de touristes, allemands et belges, signale-t-elle d’un ton enthousiaste. Mais vu le nombre élevé de visiteurs, on a jugé préférable de fermer le musée jusqu’à nouvel ordre. »

Idem pour l’exposition à Beit Beirut de l’installation du Pavillon libanais à la Biennale de Venise 2019, curatée par Hala Younès, avant sa fermeture pour cause de coronavirus.


(Lire aussi : « Impossible de continuer, par responsabilité civique aussi »)


« On s’attendait à tout, mais sûrement pas à ça ! »
Si les galeries estiment pouvoir contrôler un tant soi peu un public déjà clairsemé hors vernissages ou artist-talks, les organisateurs des concerts ou autres festivals ne peuvent pas badiner avec une assistance qui varie entre les 300 et 5 000 personnes. Les annulations et les reports sont catégoriques.

« On s’attendait à tout, mais sûrement pas à ça ! » s’exclame, en évoquant le coronavirus, Amine Abi Yaghi, directeur de Star System, co-organisateur du festival Beirut Holidays et manager de nombreux artistes dont la star Elissa, Joseph Attiye, Aziza et Cheb Khaled au Moyen-Orient.

Le secteur des spectacles était déjà mis à rude épreuve depuis octobre 2019 avec la crise économique et financière, et les mesures de contrôle des capitaux imposées par les banques.

« Parmi les concerts qui étaient sur le calendrier de 2020, nous avions maintenu ceux de Richard Clayderman et de Chris de Burgh. Le récital de Clayderman à la Saint-Valentin a eu beaucoup de succès, nous pensions pouvoir répéter le scénario avec De Burgh. Et voilà que cette nouvelle catastrophe de pandémie de coronavirus nous tombe dessus. » Le concert du chanteur britannique est reporté à une date qui sera annoncée ultérieurement. « Le grand spectacle Mamma Mia a été remis à la fin de l’année et celui de Daniel Guichard a été annulé », regrette Abi Yaghi. Parmi les concerts de l’été que le promoteur a dû annuler : celui de Garou qui devait se tenir le 7 juillet.

« Avant le coronavirus, on avait deux raisons d’annuler : le contrôle des capitaux qui nous empêchait de transférer l’argent pour couvrir les frais des artistes à l’étranger d’une part, et la baisse du pouvoir d’achat des Libanais d’autre part, sur fond de chute de la valeur de la livre et de crise économique. La pandémie est une nouvelle raison. »

Dans ces conditions, les activités sont gelées. Actuellement, Amine Abi Yaghi affirme qu’il n’a plus rien de prévu sur son calendrier. « Zéro concert à l’horizon. Le travail qui nous occupe pour le moment, c’est la gestion des annulations. »

Et le promoteur culturel de conclure : « J’ai lu un jour un article, dans un journal économique, qui disait que le coronavirus allait faire plus de victimes économiques que de victimes humaines... Ce n’est pas faux. Au Liban, nous avons besoin d’un miracle pour surmonter cette pandémie et d’un autre pour sortir de la crise économique », soupire en conclusion Amine Abi Yaghi.


(Lire aussi : Écoutons ce que le coronavirus nous ditl'Edito d'Emilie SUEUR)



Les chaises sont vides
Le théâtre est le reflet et la voix de la cité. Comme elle, ses feux sont éteints et ses chaises sont vides. Les salles sont désertées, les acteurs se tournent les pouces et les metteurs en scène ruminent.

« Par solidarité avec les autres, on a tout arrêté. D’ailleurs les réservations avaient chuté… » reconnaît Joe Kodeih dont la dernière pièce Emm el-Kel était pourtant bien partie. Pour Betty Taoutel, toute cette affaire présente une certaine ironie, la pièce qu’elle présentait, Couloir al-Faraj, parlant justement d’un hôpital contraint de cesser de fonctionner pour défaillance de système. Le rideau là aussi est baissé. Idem pour la pièce Madame Pylinska et le secret de Chopin de Éric Emmanuel Schmitt et Nicolas Stavy (piano), reportée à une date ultérieure, indique Joëlle Naïm Zraick de Persona Production sur son fil Instagram. En ajoutant que tous les billets seront remboursés à travers la billetterie de la librairie Antoine.

Demeure « Zoukak », groupe théâtral phare et engagé. « On a tout arrêté », lâche, lapidaire, Maya Zbib.

« Nous ferons de notre mieux pour reporter quelques activités. Les dates seront, dans la mesure du possible, dévoilées ultérieurement. En attendant, nous vous prions de prendre soin de vous et de vos proches, et de respecter les règles d’hygiène préconisées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) », indiquent, quant à eux, les organisateurs du Mois de la francophonie qui avaient programmé de nombreuses activités durant le mois de mars 2020.

À part le coronavirus à l’affiche partout au Liban, circulez, y’a rien à voir !



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Comment réussir son auto-isolement ?

En ces temps de coronavirus, de réclusion chez soi, de peur de tout ce qui ressemble de près ou de loin à un groupement de personnes, les annulations et les annonces de fermeture pleuvent dans le secteur culturel libanais, notamment après le décret du ministère du Tourisme du 9 mars suspendant toutes les activités musicales et culturelles au Liban afin de limiter la propagation du nouveau...

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LES COUPS DURS PARTOUT DANS LE MONDE ET SPECIALEMENT AU LIBAN QUI SE DEBAT DANS DES CRISES POLITIQUES, ECONOMIQUES, FINANCIERES ET SANITAIRES. QUE DIEU VIENNE EN AIDE AU PAYS EN PLUS DES INSTANCES INTERNATIONALES.

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 53, le 16 mars 2020

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Commentaires (1)

  • LES COUPS DURS PARTOUT DANS LE MONDE ET SPECIALEMENT AU LIBAN QUI SE DEBAT DANS DES CRISES POLITIQUES, ECONOMIQUES, FINANCIERES ET SANITAIRES. QUE DIEU VIENNE EN AIDE AU PAYS EN PLUS DES INSTANCES INTERNATIONALES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 53, le 16 mars 2020

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