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Nos Lecteurs ont la Parole - par Joumana EL-HAYEK

Le silence des agneaux ou le cri du juste !

Il est venu le temps de briser le silence des agneaux qui se laissaient si docilement sucer le sang et dévorer la chair par un État cannibale, proche du cannibalisme vindicatif du Dr Hannibal Lecter qui relève de l’envie de posséder l’autre, en se nourrissant de sa chair pour l’avoir à jamais ! À la question qui me tracasse depuis le début de cette révolte libanaise, celle de savoir « pourquoi diable ce peuple ne s’est-il pas révolté plus tôt contre ses bourreaux corrompus qui le consumaient à petit feu depuis plus de trente ans ? », une seule réponse : Le silence des agneaux qui n’osaient pas encore briser leurs chaînes ancestrales ! Un silence qui en dit long aussi sur l’état de leur santé mentale, à savoir une amnésie collective des esprits d’après-guerre ! Une amnésie qui se rapproche du déni et de la mauvaise foi et qui occultait de l’esprit du peuple, toutes confessions confondues, le souvenir atroce de la guerre et qui restait en même temps prisonnière d’un instant précis : celui de la grande discorde entre les communautés, laquelle a conduit à la grande hubris de la guerre !

Pour n’avoir pas eu le courage de faire son propre procès, pour n’avoir pas eu le cran de se dévoiler pour dénoncer les forces du mal, pour n’avoir pas eu la force de se réconcilier avec son passé, le peuple libanais a préféré s’enfuir en avant, tête baissée et yeux cachés telle une autruche ! Une fuite masquée derrière un masque de fête digne des plus grands carnavals, le carnaval ininterrompu de la fiesta des nuits libanaises, tout cela avec un sens de l’humour à toute épreuve ! Faute de pleurer d’être déplumé, d’être écorché vif, d’être enculé et asphyxié, le peuple libanais riait aux éclats de tout : de la corruption des politiciens, de la pollution de leur pays, des fleuves de déchets, des plages confisquées et, quand la maladie du cancer le frappait, il n’en était pas moins de mauvaise foi à vouloir étouffer sa peine derrière une illusoire apparence festive et héroïque ! Il se faisait même un point d’honneur de montrer sa fausse bravoure en se proclamant le fêtard de tous les temps !

Participait-il à cette grande comédie politique qu’il critiquait pourtant et ridiculisait dans ses satires sur les réseaux sociaux ? Était-il devenu complice de cette grande débauche publique qu’il dénonçait ouvertement? Pourquoi sinon se laissait-il faire encore et encore ? Même si une poignée profitait de cette grande surenchère de la corruption, le désespoir du citoyen libanais lambda était parvenu au stade de renoncement et de délassement de la chose publique qu’il se disait vaincu d’avance ! Par où commencer et par qui pour démasquer cette grande mascarade ? Le silence des agneaux se retournait contre eux en faisant d’eux les complices de ce grand cannibalisme de la classe politique ; les agneaux ont fini par devenir eux aussi des cannibales !

Alors, espérons que cette révolution du peuple, que ce grand cri qui s’est enfin échappé, que cette souffrance qui a fini par gémir conduise à un autre festin gargantuesque où les agneaux dévoreront enfin leurs bourreaux sans faire d’eux de nouveaux Dr Lecter, des Hannibal endurcis à la haine et à l’injustice, des cannibales qui se dévoreront eux-mêmes un jour !

Que ce silence brisé soit la voix venue du désert du juste, du sage et du bien et non le cri sauvage et vindicatif du mal !


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

Il est venu le temps de briser le silence des agneaux qui se laissaient si docilement sucer le sang et dévorer la chair par un État cannibale, proche du cannibalisme vindicatif du Dr Hannibal Lecter qui relève de l’envie de posséder l’autre, en se nourrissant de sa chair pour l’avoir à jamais ! À la question qui me tracasse depuis le début de cette révolte libanaise, celle de savoir...

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