Plusieurs dizaines de personnes ont bloqué mardi matin, à l'aide de pneus brûlés la route principale de Furn el-Chebbak, devant le supermarché Fahed sous le pont menant à Aïn el-Remmaneh, selon notre journaliste sur place, Nada Merhi. Une action de protestation qui s'inscrit dans le cadre de la "semaine de la colère", lancée au 90ème jour d'un mouvement de contestation sans précédent, face à l'inertie du pouvoir, à l'aggravation de la crise économique et alors que la formation du gouvernement, par le Premier ministre désigné Hassane Diab, semble être dans l'impasse. Un mouvement qui se traduit notamment par la coupure de routes à travers tout le pays.
Dans le quartier, le blocage de la route, doublé d'un blocage parallèle de l'autoroute, au même niveau, a provoqué des embouteillages monstres. Mais les protestataires étaient déterminés à ne rien lâcher. Régulièrement, ils jetaient de l'essence sur les pneus afin de raviver les flammes, alors qu'une large colonne de fumée noire montait dans le ciel. Les policiers présents sur place n’intervenaient pas.
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"La corruption a atteint un point totalement inacceptable. Cela fait trente ans que (les dirigeants libanais, ndlr) nous volent. Ça suffit !" lance à L'Orient-Le Jour Dany, un homme d'une quarantaine d'années au chômage depuis deux mois. "Nous voulons une justice indépendante et un gouvernement indépendant. Nous voulons des élections législatives anticipées sur la base d'une loi selon laquelle le Liban serait une circonscription unique", ajoute-t-il, une cigarette à la main. Lorsqu'on lui demande de quelle région il vient, il répond : "Du Liban". "Il faut aussi une élection anticipée pour un nouveau président de la République. Nous leur avons donné trois mois et ils n'ont rien fait", poursuit Dany, en référence au début du mouvement de contestation, le 17 octobre dernier. "Nous allons de nouveau réinvestir les rues et couper les routes", assure-t-il.
"Je suis étudiante, mais je n’ai pas d’avenir au Liban alors que je ne veux ni émigrer ni laisser ma famille, à cause d'une classe politique qui nous vole. Ils doivent être jugés ! Le pays est à nous, pas à eux !" affirme de son côté Jennifer Nakhlé, étudiante en droit à l’Université la Sagesse. "Nous ne voulons plus vivre cette humiliation. Le Liban est un pays qui a des capacités, mais la classe politique est en train de ternir son image à l’étranger. S’ils avaient de la dignité ils seraient déjà partis, surtout que personne ne veut d’eux", poursuit la jeune fille de 18 ans.
Le Liban est sans gouvernement depuis la démission fin octobre du Premier ministre Saad Hariri sous la pression de la rue, tandis qu'un nouveau cabinet peine à voir le jour depuis la désignation le 19 décembre du nouveau Premier ministre Hassane Diab. Et la situation économique et financière, déjà largement précaire avant le début du mouvement de protestation, n'a eu de cesse de se dégrader ces dernières semaines, sur fond de restrictions draconiennes sur les retraits bancaires et d'une dévaluation d'environ 40% de la monnaie nationale sur le marché parallèle ayant provoqué un bond des prix.
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commentaires (9)
Brûler les pneus c'est de la pollution, ça ne manque que ça, mon cher Dany un nouveau président à ce moment là le Liban est fini parceque à sa place il y aura un Ayattollah
Eleni Caridopoulou
17 h 39, le 15 janvier 2020