Standard & Poor’s a annoncé dans un communiqué publié jeudi avoir placé le Liban sous surveillance « avec implication négative », ce qui augure la possibilité d’une dégradation de la note du pays, actuellement à « B- » avec perspective négative, dans les trois mois.
L’une des trois principales agences de notation financière américaine avec Moody’s et Fitch a justifié sa décision en faisant valoir le fait que « la baisse des flux de devises vers le pays pourrait aggraver la situation budgétaire et monétaire du pays » tout en limitant la marge de manœuvre du gouvernement face à des « revendications sociales pressantes. »
Le Liban vit depuis une semaine au rythme de manifestations massives qui mobilisent une importante partie de la population contre la classe politique, que les protestataires accusent de corruption et à qui ils reprochent notamment de tenter de leur faire porter le poids des réformes douloureuses que le pays doit mener pour assainir ses finances publiques et restructurer son économie.
S&P ajoute que « l’incertitude entourant (les mesures de politique publique de l’État) à court terme » pourrait mettre un peu plus à l’épreuve les déposants et peser sur les réserves de devises du pays. »
L’agence estime néanmoins que les réserves de devises disponibles de la Banque du Liban restent suffisantes pour assurer le service de la dette publique à court terme, mais rappelle que la notation du pays reflète le risque que font peser les déficits publics et commerciaux sur le niveau d’endettement du pays.
Elle ajoute que les deux objectifs poursuivis par les autorités, à savoir répondre aux revendications de la population tout en tentant de maintenir son objectif de réduction du déficit, seront difficiles à concilier. Une référence aux objectifs du projet de budget pour 2020 adopté lundi par le Conseil des ministres, qui vise un ratio déficit/PIB de 0,6 % pour cet exercice, principalement à travers une réduction de 50 % du service de la dette assumée par la BDL et une taxation exceptionnelle des bénéfices des banques, dont les détails n'ont pas été communiqués par le gouvernement. Selon S&P, celle-ci prendrait finalement la forme d'une taxe de 2 % sur le chiffre d'affaires des banques.
S&P table, pour sa part, sur un ratio déficit/PIB qui atteindra 9, 5% en moyenne sur la période 2019/2022 pour un ratio dette/PIB qui devrait passer de 140 % en 2018 à 157 % en 2022.
La décision de S&P survient moins de 48 heures après que Moody’s ait estimé, dans une note, que les réformes budgétaires approuvées lundi par le gouvernement de Saad Hariri « mettent en exergue l’énorme défi que doivent relever l’exécutif et la Banque du Liban pour parvenir simultanément à assainir les finances publiques visant à préserver la soutenabilité de la dette publique, à maintenir la stabilité du secteur financier et la stabilité du taux de change et à apaiser la contestation de la population ».
Début octobre, Moody’s avait décidé de maintenir la notation souveraine du Liban à « Caa1 », tout en avertissant qu’en cas d’absence de progrès décisifs dans le processus d’élaboration du budget pour 2020, cette note serait revue à la baisse « dans trois mois ». L’agence avait été la première à dégrader la perspective du pays, puis sa note entre décembre 2018 et janvier dernier, avant que Fitch (CCC) ne lui emboîte le pas. S&P s'était contenté de son côté de dégrader la perspective du pays de stable à négative, en maintenant toutefois sa note à B-.
Nous ne sommes pas au bord du précipice mais bel et bien dans le gouffre. Ce gouvernement doit tomber. Les Bailleurs de fonds internationaux aideront, sans conditions, tout nouveau gouvernement issus de gens honnêtes.
12 h 09, le 25 octobre 2019