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Moyen Orient et Monde - Éclairage

L’État islamique, l’autre vainqueur potentiel de l’opération turque en Syrie

Depuis la chute de son califat territorial, le groupe jihadiste continue de représenter une menace.

Vue générale du camp d’al-Hol dans le nord-est de la Syrie. AFP/Getty Images

L’État islamique n’aime que le chaos. L’opération « Source de paix » lancée mercredi 9 octobre par la Turquie contre la coalition arabo-kurde des FDS (Forces démocratiques syriennes), dominées par les YPG (Unités de protection du peuple), dans le nord de la Syrie, pourrait représenter une opportunité en or pour le groupe État islamique (EI) de se requinquer. Les Kurdes syriens avaient, avec le soutien des Occidentaux, reconquis les territoires du nord et de l’est de la Syrie, dans le cadre de la lutte contre le groupe jihadiste. Mais l’annonce du départ des Américains a changé la donne. La mobilisation des forces armées kurdes contre les Turcs menace en premier lieu la sécurité des prisons – où sont enfermés quelque 12 000 jihadistes dont 2 500 à 3 000 étrangers – et des camps dans lesquels des familles de combattants sont détenues et qui représentent près de 80 000 personnes.


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Les Kurdes avaient, avant le début de l’offensive, mis en garde contre le fait que le désordre créé par les combats contre les Turcs et ses supplétifs rebelles syriens pourrait bien donner l’occasion aux membres de l’EI emprisonnés et aux familles des camps de s’évader. « L’État islamique continue de vouloir augmenter ses capacités à mener des attaques dans le nord et l’est de la Syrie », explique Nicholas Heras, spécialiste des questions sécuritaires au Moyen-Orient au sein du think tank Center for a New American Security (CNAS), contacté par L’Orient-Le Jour, ajoutant que l’opération turque est « une excellente occasion (pour l’EI) de se reconstituer et d’attaquer pendant que les FDS sont distraites ». Parler d’une « résurgence » de l’EI serait cependant une erreur. Et pour cause, il n’a jamais disparu. Certes son « califat » territorial est rayé de la carte – depuis mars dernier avec la prise de la ville syrienne de Baghouz –, il n’en demeure pas moins un acteur important dans la zone syro-irakienne. Tous les analystes s’accordent pour dire que le groupe terroriste est loin d’être éradiqué et qu’il continue, dans l’ombre, ses activités, notamment par le biais de ses nombreuses cellules dormantes. Il est revenu à un état « insurrectionnel », tant en Irak qu’en Syrie, exactement comme il l’avait fait après avoir été donné pour vaincu en 2007-2008.

Celui-ci comprend, outre les meurtres et les assassinats ciblés, des extorsions, des taxes aux populations, des enlèvements contre rançon, des braquages, des vols, du trafic d’antiquités… tout cela en restant « caché ». En Syrie, l’EI conserve des combattants dans « la zone tenue par les FDS, mais maintient également des cellules dans l’enclave d’Idleb, et opère aussi dans le secteur tenu par le régime », estime pour L’OLJ Mateo Puxton, agrégé d’histoire et spécialiste du groupe État islamique, ajoutant que « depuis le printemps, il mène des opérations dans la province de Deraa et celle de Soueida dans le sud du pays. Il est très actif dans la Badiya entre Homs et Deir ez-Zor/Mayadin/Boukamal, où il attaque en particulier les convois du régime circulant sur les routes principales ». Les activités insurrectionnelles de l’EI sont retransmises par le biais d’une communication qui, bien qu’ébranlée par la disparition du califat, reste toujours active, surtout sur les réseaux sociaux comme Telegram.


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Académie de l’EI

« Depuis la chute de Baghouz en mars, l’EI a diffusé 23 vidéos longues de propagande, parmi lesquelles 15 font partie d’une série où les combattants renouvellent, partout à travers la planète, leur serment d’allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi », poursuit Mateo Puxton.

Dans les prisons et les camps aussi, la communication de l’EI est très présente. Les lois et préceptes de l’EI y sont parfois appliqués à la lettre. C’est par exemple le cas du camp d’al-Hol, situé à la frontière syro-irakienne, où les femmes les plus radicales contrôlent l’allégeance des autres au groupe terroriste, veillent au respect des codes vestimentaires et punissent celles soupçonnées de ne pas soutenir le groupe extrémiste. Des exécutions y seraient même recensées. Les responsables du camp décrivaient en août dernier al-Hol comme une « académie de l’EI ».

Des tentatives de mutinerie et d’évasion ont également eu lieu, et ce avant même le lancement de l’opération turque dans le Nord syrien. L’une des plus connues est celle de la prison de Derik, près de la ville d’al-Malikia, dans l’extrême nord-est de la Syrie, le 5 avril dernier, jugulée par les forces de sécurité locales et l’armée américaine. D’autres ont néanmoins su profiter du désordre créé par l’intervention turque pour s’enfuir.

Vendredi, au troisième jour de guerre, les forces kurdes ont fait état de l’évasion de cinq jihadistes étrangers depuis une prison située dans la périphérie de la ville de Qamichli, dans le nord-est de la Syrie, où une explosion, revendiquée par le groupe terroriste, a également eu lieu, le même jour, provoquant la mort de six personnes. Les forces kurdes ont également annoncé, dimanche, la fuite de familles de membres de l’EI du camp de déplacés de Aïn Issa, dans le nord de la Syrie. Selon elles, 785 personnes sont concernées, alors que le camp, situé à proximité des combats entre forces kurdes et turques, est désormais « sans gardes ». Pour les présidents américain et turc, Donald Trump et Recep Tayyip Erdogan, ces fuites ont été volontairement organisées par les Kurdes, même si les raisons divergent. Pour le chef de la Maison-Blanche, les Kurdes font du chantage afin de forcer les États-Unis « à s’impliquer » face à l’offensive turque. Pour le reïs, ces fuites ont pour seul et unique but de « créer le chaos ».

Une seule question persiste : qui va administrer ces camps une fois l’opération terminée ? Il y a deux possibilités. Le président turc a laissé entendre que la Turquie pouvait prendre le relais. De l’autre côté, selon l’accord conclu dimanche entre Damas et les Kurdes, ce sont ces derniers qui en garderaient le contrôle pour l’instant.

Dans le cas du retour de l’autorité du régime dans les zones kurdes, Damas pourrait utiliser les jihadistes de l’EI comme une « arme de pression » contre les Occidentaux. Cela obligerait ces derniers à coopérer avec Bachar el-Assad. « Que Damas réinstalle son pouvoir dans le nord-est de la Syrie, ou que les FDS y conservent une certaine influence et autonomie, l’EI continuera d’essayer de se reconstruire et de lancer des attaques contre l’autorité présente », note Nicholas Heras. Un retour de l’autorité de Damas dans la région pourrait recréer les conditions qui ont permis l’émergence de l’EI en Syrie, notamment le risque de marginalisation des sunnites ou encore le manque de justice d’un régime ultrarépressif.


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commentaires (4)

ER-DOG-ANE L,OTTOMAN A REUSSI PAR SA BETE INVASION DE LA SYRIE A REUNIR TOUS LES ETATS DU MONDE CONTRE LUI. QUAND LES BAUDETS SE PRENNENT POUR DES CHEVAUX ILS RISQUENT DE TOMBER ET DE SE CASSER LA TETE.

LA LIBRE EXPRESSION

10 h 17, le 15 octobre 2019

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Commentaires (4)

  • ER-DOG-ANE L,OTTOMAN A REUSSI PAR SA BETE INVASION DE LA SYRIE A REUNIR TOUS LES ETATS DU MONDE CONTRE LUI. QUAND LES BAUDETS SE PRENNENT POUR DES CHEVAUX ILS RISQUENT DE TOMBER ET DE SE CASSER LA TETE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 17, le 15 octobre 2019

  • À la question de savoir où iraient ces soldats wahabites MANIPULÉS par israel, et à qui ils donnent le plus de cauchemars, vous aurez la réponse de qui les a envoyé en Irak et en Syrie du héros BASHAR. Mais au fait , est il possible que l'état usurpateur puisse être aussi blanc que neige dans cette histoire ? Ils ont pourtant fait des promesses aux kurdes et se sont installés dans l'ensemble du Kurdistan, ils ont même abreuvé de films hollywoodiens par l'entremise du sulfureux bhl et de caroline fourest actuellelent tout l'occident, vous pensez qu'ils l'ont fait comme ça pour rien ? C'est pas dans leurs habitudes ça. On nous parle des sunnites , des chiites , des chrétiens etc..., mais les feujs n'apparaissent nulle part, est ce normal?

    FRIK-A-FRAK

    10 h 12, le 15 octobre 2019

  • Poutine ,là encore , contrôlera la situation , et vous n'aurez pas à vous faire de mauvais sang : Les autorités syriennes ne feront rien sans le consulter . Donc , soyons rassurés , et faisons confiance à Saint Vladimir .

    Chucri Abboud

    09 h 41, le 15 octobre 2019

  • On peut etre sur que si les prisonniers de DAESH tombent sous le controle du regime,le boucher ASSAD va les couver pour pouvoir s en servir dans le futur...ils ne souffriront aucune tortures comme les pauvres martyrs qui seulement revaient de vivre dans un pays democratique ( comme la Tunisie par exemple).

    HABIBI FRANCAIS

    03 h 35, le 15 octobre 2019

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