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Lifestyle - Coolitude

« Voir » les œuvres d’art du bout des doigts

Au « prière de ne pas toucher » affiché dans tous les musées répond aujourd’hui la mention « prière de toucher » sur des œuvres dédiées aux non-voyants.

Un jeune non-voyant expérimente le toucher d'une peinture, comme pour mieux la voir. Le tableau revisité, conçu par 3DPhotoWork, a de la profondeur, de la largeur et une texture. Photo John Olson, 3DPhotoWork

Il y a presque 200 ans, Louis Braille révolutionnait la vie des aveugles et des malvoyants en leur ouvrant les portes de la lecture par la création de l’écriture tactile. Aujourd’hui, une invention similaire vise à leur rendre accessible un domaine qui ne l’était pas jusqu’à présent : celui des arts visuels.

Jusqu’à aujourd’hui, les aveugles et malvoyants n’avaient accès aux arts visuels que via des livres, en braille, au sujet des œuvres, ou par le biais d’une visite avec guide ou audioguide dans un musée. Aujourd’hui, c’est à une découverte tactile des œuvres qu’on les invite.C’est pour relever ce défi qu’un processus high tech a été mis au point qui permet de convertir une peinture, une photo ou encore un dessin en une version tridimensionnelle axée sur la texture. Le tracé initial de l’œuvre est restitué par un jeu de relief et d’épaisseur du matériau. Chacune de ces compositions, ainsi repensées, est munie d’un capteur sonore complétant le parcours des doigts, notamment en fournissant des détails sur la palette des couleurs choisies par l’artiste.

Cette innovation a été rendue possible grâce à la compagnie américaine 3DPhotoWorks.com, fondée par John Olson, 68 ans, un ancien photographe du magazine Life, lauréat du prestigieux Robert Capa Award for Superlative Photography. Il lui a fallu plus de sept ans pour perfectionner une imprimante 3D capable de reproduire, pour une large diffusion, les trésors des musées.

Changer la manière de voir

« Notre but est de tenter de changer la manière de “voir” l’art pour les 285 millions d’aveugles à travers le monde. Pour la première fois, ils auront des informations de qualité tactiles très proches du visu », explique-t-il à L’Orient-Le Jour, par mail. « La photographie m’a fait sillonner le monde et, plus tard, j’ai réalisé combien ces clichés étaient importants pour moi. Alors je me suis demandé ce que pouvait être la vie des aveugles sans l’expérience de la représentation artistique. Je ne connaissais pas de personne aveugle mais j’ai voulu qu’ils découvrent à leur tour la joie que les images m’ont procurée », ajoute-t-il.

Il entreprend alors ses travaux avec le soutien de la National Federation of the Blind. Actuellement sa collection inclut les portraits de Mona Lisa par Léonard de Vinci (admirée au musée du Louvre par 6 millions de personnes par an), du docteur Gachet par Vincent van Gogh, du roi George III par Allan Ramsay ainsi qu’une fresque intitulée Washington traversant le Delaware par Emanuel Leutze. L’innovation de John Olson est destinée à être diffusée partout dans le monde, alors qu’auparavant, le musée du Prado en Espagne avait utilisé ce procédé uniquement pour une sélection de ses propres toiles. Le Musée canadien pour les droits de la personne (MCDP) a également eu recours à cette technologie, toujours pour sa propre collection.


Création d’une image mentale

John Olson a été inspiré par les recherches entreprises par le neuroscientifique le Dr Paul Bach-y-Rita de l’Université du Wisconsin car l’impression tactile tridimensionnelle repose sur le concept de neuroplasticité. Selon le Dr Bach-y-Rita, « le cerveau est capable d’utiliser une information transmise par le bout des doigts, comme si elle provenait des yeux. Cela parce que l’on ne voit pas avec les yeux et que l’on n’entend pas avec les oreilles, ils sont juste des récepteurs : voir et entendre passent par le cerveau ». Dans ce contexte, pour aider à la création d’une « image mentale », un capteur sonore intégré dans le tirage de l’impression, une fois actionné, décrit le segment touché.Pour le photographe, la différence entre voir une œuvre avec les yeux et la « voir » avec les doigts, est équivalent à « la différence entre découvrir une rose par la lecture et la sentir », assure-t-il. Aujourd’hui, l’objectif de John Olson est de déplacer, partout dans le monde, son accrochage si insolite et nouveau, en particulier dans les 35 000 musées que comptent les États-unis, ce pays où, selon les statistiques, toutes les 11 minutes, une personne est sur le point de perdre la vue.


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