La visite du Premier ministre Saad Hariri à Paris vendredi dernier et ses rencontres avec le président français Emmanuel Macron et plusieurs responsables chargés de l’exécution des décisions prises dans le cadre de la conférence de Paris (CEDRE, avril 2018) ont été qualifiées dans les milieux politiques de positives, fructueuses et décisives.
Preuve en est, l’accueil réservé au chef du gouvernement, qui démontre que le Liban n’est pas lâché par la communauté internationale, à commencer par la France. Les échanges entre M. Hariri et ses interlocuteurs français n’étaient pas dénués cependant de reproches, le chef du gouvernement ayant entendu de nombreuses critiques sur le laxisme et les atermoiements dont fait preuve l’exécutif à un moment aussi critique pour l’économie libanaise. D’autant que le Liban ne peut plus se permettre le luxe d’hésiter dans ses engagements à enclencher les réformes et à redresser la situation économique et financière.
Selon un responsable français, la communauté internationale et la France mettent les bouchées doubles pour aider et soutenir le Liban. Ce dernier est appelé de son côté à saisir l’opportunité pour lancer le train des réformes requises. Le message des responsables français peut se résumer en ces termes : la France est toujours disposée à aider les Libanais, mais ceux-ci doivent s’aider eux-mêmes, en accélérant les mesures requises pour sortir de l’impasse.
En dépit de la fermeté du message transmis à Paris, le discours véhiculé a toutefois mis en évidence la volonté de la communauté internationale de continuer à aider le Liban, à condition que ce dernier puisse tenir les promesses formulées dans le cadre des conférences internationales organisées par les pays donateurs.
En tête de ces promesses, la politique de distanciation par rapport aux crises régionales que le Liban s’est engagé à respecter, après l’avoir entérinée dans la déclaration ministérielle. Ce rappel ferme de la part des responsables français, notamment sur la nécessité pour le gouvernement de tenir le Liban à distance des crises qui ravagent la région, est notamment justifié par les récents propos virulents du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui a insisté récemment et de manière on ne peut plus claire sur le lien intrinsèque existant entre le Liban et l’axe de la résistance conduit par l’Iran.
Le Liban devient ainsi une boîte aux lettres devant servir à envoyer des messages codés par Téhéran en direction des pays du Golfe, sommés de se retirer du Yémen. À défaut, c’est à une attaque encore plus dure que celle qui a visé les installations pétrolières d’Aramco en Arabie saoudite qu’il faudra s’attendre.
(Lire aussi : A New York, Aoun remercie Macron pour le soutien de la France au Liban)
Les responsables au sein des pays donateurs ayant pris part aux conférences de Paris, de Rome et de Bruxelles se demandent pourquoi le Hezbollah, qui est une composante d’un gouvernement placé sous le signe de l’action et du travail, ne démissionne pas, sachant qu’il ne respecte pas la déclaration ministérielle à laquelle il avait pourtant consenti. À leurs yeux, le parti chiite a failli aux engagements du gouvernement et violé les promesses faites par le Premier ministre à la communauté internationale à la veille des conférences internationales, notamment en matière de respect de la politique de distanciation.
C’est d’ailleurs sur la base de ces engagements que le président français s’est activé pour lancer la dynamique de soutien au Liban, qui s’est manifestée dans le cadre des trois conférences internationales.
Des sources diplomatiques occidentales dénoncent le fait que le Hezbollah ne s’est pas contenté de se soustraire à la politique définie par le gouvernement, mais qu’il a été bien plus loin en hypothéquant la souveraineté libanaise.
Au lendemain de l’attaque des drones qui ont visé la banlieue sud, et après la riposte du Hezbollah suivie d’une contre-attaque israélienne au Liban-Sud, Hassan Nasrallah a affirmé sans ambages que c’était lui qui détenait la décision de la guerre et de la paix. Il a également fait savoir qu’il comptait réagir à toute agression future de la part de l’État hébreu, faisant valoir son droit de riposter qui, avait-il précisé, est légitimé par le communiqué du Conseil supérieur de défense.
Se désignant comme un soldat opérant pour le compte du vilayet el-faqih et de l’agenda iranien, Hassan Nasrallah a assuré que le Hezbollah réagirait également à toute attaque visant l’Iran. Autant de menaces qui ont suscité dans les milieux diplomatiques des interrogations sur l’avenir des aides que les pays arabes s’étaient engagés à fournir au Liban et qui risquent d’être remises en cause dans un contexte d’hostilité soutenue manifestée par le parti chiite à l’égard de l’Arabie saoudite et des pays du Golfe. Cette situation de crise permanente semble toutefois profiter au Hezbollah et à l’Iran qui, face à la volonté affichée des États-Unis d’éviter une guerre dans la région, refuse toute négociation avant une annulation des sanctions américaines.
Le Hezbollah à son tour tente d’exploiter la couverture internationale dont bénéficie actuellement le Liban pour lui épargner l’effondrement, en instrumentalisant le territoire libanais pour faire pression sur les États-Unis et les amener à mettre un terme aux sanctions économiques subies par le parti chiite.
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commentaires (4)
COMME ON DIRAIT "AIDE TOI ET LE CIEL T'AIDERA " . SAUF QUE LA FRANCE C'EST VRAIMENT PAS LE CIEL .
FRIK-A-FRAK
11 h 15, le 25 septembre 2019