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Moyen Orient et Monde - Décryptage

Face à l’Iran, les trois « mauvaises options » de l’administration US

Washington semble vouloir gagner du temps alors que le Golfe vit un momentum décisif.

Joshua Roberts/Reuters

En moins de vingt-quatre heures, Washington a tempéré ses propos dans l’affaire de l’attaque contre des installations pétrolières de la compagnie nationale saoudienne Aramco. Si l’opération a été revendiquée par les rebelles houthis au Yémen, appuyés par l’Iran, la Maison-Blanche et l’Arabie saoudite n’ont pas hésité à pointer du doigt Téhéran – preuves à l’appui. Qualifiant mercredi, depuis Riyad, l’attaque d’« acte de guerre », le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a nuancé son discours jeudi, à Abou Dhabi, en assurant que l’administration américaine privilégiait une « solution pacifique ». Le président américain, Donald Trump, avait affirmé quelques jours plus tôt être « prêt à riposter ». « Je peux vous dire que c’était une très grosse attaque et notre pays pourrait très facilement y répondre par une attaque beaucoup plus grosse », avait-il insisté.

Misant un temps sur une approche quasi belliciste, un temps sur une voie diplomatique, Washington semble vouloir gagner du temps. De fait, sa réponse se fait attendre. Pris en étau dans un Moyen-Orient particulièrement inflammable ces derniers mois, la Maison-Blanche ne cache pas son souhait de ne pas entrer dans une confrontation directe avec la République islamique. Alors que le Golfe semble vivre un momentum décisif pour son avenir en matière de défense militaire, L’Orient-Le Jour décrypte les différentes options à disposition de Washington pour répondre à ce qu’il considère comme une attaque de l’Iran contre son allié saoudien.



(Lire aussi : Comment Trump s’est laissé prendre à son propre piège anti-iranien)



Ne pas répliquer militairement
Première possibilité pour les États-Unis : ne pas répondre militairement à la frappe attribuée à l’Iran. Une option en continuité avec l’intention de Washington de ne pas s’engager dans un conflit ouvert. Ce, d’autant plus que rallier des soutiens sur le plan domestique en faveur d’une opération militaire serait difficile. « L’Arabie saoudite n’a plus la cote auprès des Américains, en particulier depuis l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi », rappelle à L’Orient-Le Jour Bruce Riedel, ex-responsable au sein de la CIA et chercheur à la Brookings Institution. Conformément à sa stratégie depuis deux ans, Donald Trump semble miser pour le moment sur une guerre verbale par tweets interposés avec les officiels iraniens et une riposte limitée aux secteurs économique et financier. Le locataire de la Maison-Blanche a d’ailleurs annoncé hier que de nouvelles mesures ont été prises contre la Banque centrale iranienne et le fonds souverain de Téhéran pour « financement du terrorisme », les présentant comme les « sanctions les plus sévères jamais imposées à un pays ».

S’en tenir à cette stratégie face à une attaque lourde de symbole sur le sol d’un des alliés majeurs de Washington dans la région présenterait néanmoins le risque pour Washington de voir la crédibilité de son parapluie sécuritaire remise en question – non seulement aux yeux de ses alliés arabes, mais aussi occidentaux. « Si les États-Unis ne réagissent pas à l’attaque, y compris militairement, je pense que l’opinion publique remettra en question la détermination américaine à protéger non seulement les pays du Golfe, mais également le flux de pétrole vers le marché, ce qui constitue l’un des plus gros enjeux », explique à L’OLJ Wa’el Alzayat, ancien expert de la politique américaine au Moyen-Orient au département d’État américain. « Cela enverrait par ailleurs un message à d’autres pays, comme la Russie et la Chine, pour dire que les États-Unis ne sont pas disposés à prendre certaines mesures, qui comportent des risques, pour protéger leurs intérêts et ceux de leurs alliés », poursuit-il.



(Lire aussi : Logique de guerre)



Frapper directement l’Iran
C’est l’option la plus radicale dont dispose l’administration Trump. L’Iran n’a toutefois pas directement revendiqué l’attaque contre l’Arabie saoudite. La confusion persiste, rendant une attaque directe contre Téhéran compliquée à mettre en œuvre. Cela n’a pas empêché la presse américaine de dévoiler une liste de cibles potentielles en Iran. « Les planificateurs militaires du Pentagone et du commandement central des États-Unis (…) ont transmis une liste de cibles iraniennes pouvant constituer une réponse proportionnelle », écrivait mercredi le New York Times, évoquant le fait que « les options les plus agressives incluent des frappes contre la raffinerie de pétrole d’Abadan, en Iran, l’une des plus grandes au monde, ou l’île Kharg, la plus grande installation d’exportation de pétrole du pays, options rapportées pour la première fois par NBC News ». L’île de Kharg avait d’ailleurs été l’une des cibles du régime irakien lors de la guerre Iran-Irak (1980-1988), durant l’épisode de la « guerre des pétroliers ». Parmi les autres cibles potentielles, figurent les sites de lancement de missiles balistiques ainsi que des bases sous la direction des gardiens de la révolution, notamment dans le Sud-Ouest iranien.

Attaquer directement l’Iran pourrait entraîner une réaction immédiate de Téhéran. Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif a d’ores et déjà donné le ton jeudi en prévenant, dans une interview accordée jeudi à CNN, qu’une frappe directe américaine ou saoudienne contre l’Iran entraînerait inévitablement une « guerre totale » dans toute la région. « Si l’Iran est la cible d’une frappe américaine limitée, cela signifierait que les États-Unis ne sont pas intéressés par le fait d’élargir l’échelle et la portée de la confrontation », estime Wael Alzayat, précisant qu’il y a « toujours une chance pour que les Iraniens réagissent et (re)répondent jusqu’à conduire la situation à une escalade ».



(Lire aussi : Cette fois-ci, Trump frappera-t-il l'Iran ?)



Frapper les supplétifs iraniens au Yémen, en Syrie et en Irak
Depuis le début de l’intervention de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite au Yémen en mars 2015, les Américains n’ont jamais frappé directement les houthis. Pour Washington, s’impliquer dans le conflit yéménite maintenant semblerait contradictoire compte tenu des pressions actuellement exercée par les États-Unis pour forcer l’Arabie saoudite à s’en désengager. En Syrie, les Américains pourraient cibler une ou plusieurs positions des gardiens de la révolution (pasdaran), très actifs dans le pays. Deux éléments viennent toutefois compliquer une telle opération : le parapluie militaire russe – notamment les missiles S-300 et S-400 implantés par le Kremlin en Syrie – et la symbolique de la frappe. Celle-ci serait de bien moindre ampleur en Syrie du fait que le pays est déjà en guerre et que les lignes géopolitiques sur place sont assez floues, sans parler du fait qu’Israël mène déjà depuis plus de deux ans des frappes sur les positions des combattants iraniens ou pro-iraniens sur place. C’est donc chez le voisin irakien qu’une réponse américaine semble le plus « appropriée ». Mais une telle frappe mettrait en danger des milliers de soldats américains présents en Irak. Des frappes sur le territoire irakien pourraient par ailleurs placer Bagdad dans une situation délicate. Tiraillé entre les relations qu’il entretient avec les États-Unis d’un côté et l’Iran de l’autre, le gouvernement irakien a répété à maintes reprises vouloir rester neutre dans la confrontation Washington-Téhéran. Le gouvernement de Bagdad, et en particulier des groupes irakiens proches de l’Iran, pourraient aller jusqu’à demander le départ des troupes américaines. Ces groupes ont par ailleurs le soutien du leader chiite Moqtada al-Sadr, hostile à la présence américaine en Irak.



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En moins de vingt-quatre heures, Washington a tempéré ses propos dans l’affaire de l’attaque contre des installations pétrolières de la compagnie nationale saoudienne Aramco. Si l’opération a été revendiquée par les rebelles houthis au Yémen, appuyés par l’Iran, la Maison-Blanche et l’Arabie saoudite n’ont pas hésité à pointer du doigt Téhéran – preuves à l’appui....

commentaires (3)

4eme option: quitter la region

Chady

13 h 41, le 22 septembre 2019

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Commentaires (3)

  • 4eme option: quitter la region

    Chady

    13 h 41, le 22 septembre 2019

  • Venir nous dire que les usa n'ont jamais frappé le Yémen est une absurdité intellectuelle impardonnable. Le Yémen est frappé tous les jours par l'Amérique la France la G.B et les coalisés bensaouds et par l'usurpation . L'AMÉRIQUE NE POURRA JAMAIS GAGNER DE GUERRE CONTRE L'IRAN NPR, QUELQUE SOIT LE SCÉNARIO ENVISAGÉ . PARCE QU'APRÈS AVOIR " GAGNÉ " IL LEUR RESTERA DE RE-GAGNER ENCORE . LES YANKYS N'ONT PAS DE RELAIS FIABLES SUR LES TERRAINS DE GUERRE , ILS SONT HONNIS ET DÉTESTÉS À VIE . COMPRENEZ LE .

    FRIK-A-FRAK

    10 h 44, le 21 septembre 2019

  • LA OU EN SONT ARRIVEES LES CHOSES TOUTE GUERRE CLASSIQUE, MALGRE LES NOUVEAUTES TECHNOLOGIQUES, NE SERVIRAIT A RIEN ET RESULTERAIT EN DES DESTRUCTIONS ENORMES DANS TOUS LES PAYS DE LA REGION. LA DERNIERE OPTION SERAIT CELLE DE L,IDEE DE GWB : ARRETER LE NUCLEAIRE ET LES AGRESSIONS PAR LE NUCLEAIRE. MAIS C,EST UNE OPTION BARBARE ET CONDAMNABLE. IL NE RESTE QU,UN YALTA MOYEN ORIENTAL AVEC PARTICIPATION DES SUPER PUISSANCES POUR LA DIVISION DE LA REGION EN SECTEURS D,INFLUENCES. PEUT-ETRE LA PAIX Y REGNERA.

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 21, le 21 septembre 2019

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