Le pétrolier iranien Adrian Darya 1, soupçonné de transporter 2,1 millions de barils de brut vers la Syrie, pays sous sanctions, a disparu des radars lundi après-midi, après avoir passé 24 heures au large des côtes libanaises et syriennes, selon des sites de surveillance du trafic maritime.
Consulté mardi matin, le site de suivi des navires MarineTraffic montre que la position du pétrolier iranien, face aux côtes du nord du Liban et du sud de la Syrie, n'a plus été mise à jour depuis la veille à 15h50.
Capture d'écran du site MarineTraffic.com prise le 3 septembre 2019. Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
Les Etats-Unis, qui souhaitaient un nouvel arraisonnement du navire, ont dit avoir des "informations fiables" selon lesquelles sa destination est Tartous, en Syrie.
Avant sa disparition des radars, le navire errait en Méditerranée depuis qu'il a quitté Gibraltar le 18 août, après six semaines d'immobilisation. Le flou le plus total règne sur sa destination et le sort de sa cargaison. Lundi, il était dans les eaux internationales, à environ 80 kilomètres au large de Tripoli, dans le nord du Liban, selon le site de suivi TankerTrackers. La veille, il se trouvait plus au Nord, au large du port syrien de Tartous, selon le site de suivi MarineTraffic.
Vendredi dernier, le ministre turc des Affaires étrangères avait laissé entendre que le navire se rendait au Liban, ce que les autorités libanaises avaient nié. "Il n'y a aucune demande d'entrée au Liban du pétrolier Adrian Darya 1", avait indiqué, le même jour, sur son compte Twitter la ministre de l’Énergie Nada Boustani. Un peu plus tard, le chef de la diplomatie turque avait précisé que le navire se trouvait au large des côtes libanaises, et qu'il ne voulait pas dire qu'il se rendait au Liban.
(Pour mémoire : Pétrolier à Gibraltar : Téhéran dément avoir donné des garanties sur sa destination)
"Probablement en Syrie"
Selon des experts, l'Adrian Darya 1 doit se décharger de tout ou partie de sa cargaison, afin d'être en mesure d'emprunter le canal de Suez pour regagner l'Iran. Pour eux l'hypothèse la plus plausible est un transfert sur un autre navire dans les eaux syriennes. L'Iran a affirmé avoir vendu le pétrole à bord du navire. Selon TankerTrackers, le navire doit décharger une partie de sa cargaison s'il souhaite traverser le canal de Suez et rentrer en Iran. Deux scénarios sont envisageables, juge Samir Madani, cofondateur de TankerTrackers. Le premier est un transfert de cargaison vers le navire "Sandro", détenu par un riche homme d'affaires syrien. Dans ce cas "le pétrole ira probablement en Syrie", dit-il, alors que le régime syrien, soutenu par l'Iran, fait l'objet de sanctions économiques américaines. Mais si le pétrole est déchargé sur d'autres navires iraniens, il finira probablement en Iran, d'après M. Madani.
Adrian Darya 1, alors nommé Grace 1, avait été saisi le 4 juillet au large de Gibraltar, soupçonné de transporter du pétrole vers la Syrie en violation de sanctions européennes contre ce pays. Selon les autorités britanniques de Gibraltar, il a été libéré car Téhéran s'était engagé à ne pas envoyer sa cargaison en Syrie. D'après Washington, la vente du pétrole de ce navire contribuerait à financer les forces iraniennes. Le Trésor américain a sanctionné vendredi le pétrolier et son capitaine. L'Iran a affirmé avoir vendu le pétrole à bord de l'Adrian Darya 1, sans dévoiler l'identité de l'acheteur, assurant ne pas pouvoir être "transparent" concernant la destination de son pétrole quand Washington essaye "d'intimider" les acheteurs potentiels.
Cette affaire a cristallisé les tensions entre Téhéran et Washington, qui montent depuis le retrait américain unilatéral en 2018 d'un accord conclu en 2015 pour encadrer le nucléaire iranien, suivi du rétablissement de sanctions draconiennes contre Téhéran.
Pour mémoire
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commentaires (11)
Finalement, Trump avait raison, le pétrole aura bien été livré à la Syrie, en violation de l'embargo.
Yves Prevost
07 h 48, le 04 septembre 2019