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Moyen Orient et Monde - Analyse

L’héritage racial de l’Amérique au cœur de la campagne de Trump comme des démocrates

Le président américain Donald Trump s'est défendu hier des accusations de racisme à son encontre après ses attaques répétées des derniers jours contre un élu noir et sa circonscription de Baltimore. « Je suis la personne la moins raciste du monde », a-t-il déclaré à des journalistes depuis la Maison-Blanche. Leah Millis/Reuters

L’élection en 2008 de Barack Obama, premier président noir des États-Unis, semblait marquer un tournant dans l’histoire d’un pays portant encore les blessures de l’esclavage.

À peine plus d’une décennie plus tard, la campagne pour le scrutin de 2020 est tout juste lancée que la question, hautement sensible, du rapport entre les communautés occupe les débats et les esprits. Du côté du président sortant Donald Trump, mais aussi chez ses adversaires démocrates.

Pour Andrea Gillespie, professeure associée de sciences politiques à l’université Emory, ces premiers actes de campagne montrent qu’élire un président noir n’était « pas la panacée pour résoudre les problèmes de l’Amérique sur la question raciale ». « Ce sont des questions systémiques et de long terme qui sont vieilles comme le pays », a-t-elle confié à l’AFP.

Le républicain Donald Trump, lancé dans la conquête d’un second mandat, multiplie les attaques et les polémiques avec des personnalités noires et des élus issus des minorités. Après avoir sonné la charge contre quatre élues de la Chambre des représentants, qu’il avait sommées de « retourner » dans les pays « d’où elles viennent », il s’est attaqué coup sur coup ces derniers jours dans un langage extrêmement violent à un député noir de la ville de Baltimore, Elijah Cummings, et à un défenseur reconnu des droits civiques, Al Sharpton.

Accusations de racisme

Pour beaucoup de démocrates, dont leur chef de file à la Chambre Nancy Pelosi, le président se livre à des remarques « racistes ». Pour beaucoup d’observateurs, il cherche avec un discours de division à galvaniser sa base électorale, très majoritairement blanche, une stratégie qui lui avait réussi en 2016.

Donald Trump, qui se défend d’avoir en lui « une once de racisme », était entré en politique en promouvant des théories niant que Barack Obama était né aux États-Unis et remettant ainsi en question sa légitimité constitutionnelle à présider le pays.

Les controverses n’ont guère cessé depuis son arrivée à la Maison-Blanche. Durant la première partie de son mandat, elles avaient culminé à l’été 2017 avec l’épisode de Charlottesville. Après des incidents entre des néonazis et des contre-manifestants dans cette petite ville de Virginie, le président avait estimé qu’il y avait « des gens très bien » des deux côtés.

M. Trump est un « symptôme d’un mal plus large qui est celui de l’inégalité raciale dans lequel nous ne cessons de nous débattre », estime Vincent Southerland, directeur exécutif du Centre sur les races, les inégalités et le droit, à la New York University.

« Le mouvement des droits civiques a créé des normes qui en principe doivent prévenir toute utilisation de paroles manifestement racistes », relève Celeste Montoya, professeure associée à l’université du Colorado. « Donald Trump a d’une certaine manière transgressé ces normes », ajoute-t-elle.

Inciter des Noirs à voter

Mais la question raciale est aussi omniprésente dans la campagne des démocrates, où les héritiers politiques de Barack Obama se disputent le vote de la communauté noire. La sénatrice Kamala Harris, l’une des deux candidats noirs de la primaire démocrate, a créé la sensation lors des premiers débats de la primaire en attaquant frontalement le favori des sondages Joe Biden sur ses décisions passées en matière d’égalité raciale.

Pete Buttigieg, jeune maire de South Bend (Indiana) et révélation du début de campagne, cherche à asseoir sa crédibilité dans ce domaine, alors que son action et celle de sa police sont contestées par ses administrés.

C’est en partie une réponse à la rhétorique de Donald Trump. Mais c’est aussi la prise de conscience qu’une mobilisation des Noirs sera déterminante pour l’emporter. La faible participation parmi les Afro-Américains est fréquemment citée comme une des raisons de la défaite de Hillary Clinton en 2016.

« Il faut susciter l’enthousiasme et faire voter les gens de couleur, et les candidats doivent leur montrer qu’ils sont attentifs aux inégalités et à ce qu’ils vivent », relève Andrea Gillespie. Plusieurs candidats démocrates disent ainsi envisager le principe de réparations financières pour les descendants des esclaves noirs.

Malgré l’élection de Barack Obama, beaucoup d’observateurs étaient « plutôt sceptiques sur l’idée d’une société postraciale », analyse Jake Neiheisel, de l’université de Buffalo. Et pour lui, même si elle était difficile à prévoir, l’accession au pouvoir de Donald Trump adossée à un discours populiste et facteur de divisions « n’est pas si surprenante dans une perspective historique ». « On bouge dans une direction et puis il y a un contre-mouvement », dit-il. La guerre de Sécession de 1861 à 1865 avait conduit à l’émancipation des esclaves. Mais lui avait succédé le temps de la ségrégation, qui ne s’était finalement achevée de manière officielle que dans les années 1960 avec la conquête des droits civiques.

Chris LEFKOW/AFP

L’élection en 2008 de Barack Obama, premier président noir des États-Unis, semblait marquer un tournant dans l’histoire d’un pays portant encore les blessures de l’esclavage. À peine plus d’une décennie plus tard, la campagne pour le scrutin de 2020 est tout juste lancée que la question, hautement sensible, du rapport entre les communautés occupe les débats et les esprits. Du...

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