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Liban - Partis

Hariri-Bassil : duel à rebondissements et partenariat obligé

Ayant atteint un niveau record, la tension entre le Premier ministre et le chef du CPL ne devrait pourtant pas remettre en cause le compromis présidentiel.

Gebran Bassil... Photo d’archives ANI

Survenue au milieu d’une crise politique aiguë qui opposait depuis un certain temps le courant du Futur au Courant patriotique libre, l’attaque terroriste perpétrée lundi soir à Tripoli est venue rajouter de l’huile sur le feu, remettant en cause les fondements de la relation qu’entretiennent les deux parties, mais non le compromis présidentiel dont elles constituent les principaux piliers.

Condamnés à une cohabitation forcée, les deux partis, qui ont peu d’atomes crochus sur le plan politique, continuent de souffler le chaud et le froid en faisant monter les enchères dans un jeu de démarcation respective des zones de pouvoir et des prérogatives.


(Lire aussi : Les forces de l’ordre recherchent activement des complices éventuels de Mabsout)


Déjà tendues après les récentes critiques attribuées au chef du CPL, Gebran Bassil, à l’encontre du « sunnisme politique » dans son ensemble, incarné par le Premier ministre Saad Hariri, les relations entre les deux hommes se sont nettement détériorées depuis l’attaque terroriste dont Tripoli a été la cible.

Exécuté par Abdel Rahmane Mabsout, un jihadiste qui a combattu dans les rangs de l’État islamique en Syrie avant de faire un an et demi de prison à son retour au Liban, l’attentat a été servi sur un plateau d’argent au CPL qui en a profité pour relancer des attaques ciblées contre l’institution des Forces de sécurité intérieure (FSI), réputée proche du courant du Futur et implicitement accusée par les aounistes d’avoir couvert la libération du terroriste. Une accusation d’autant plus injustifiée aux yeux des haririens que le jihadiste avait purgé une peine prononcée par le tribunal militaire et avait été libéré sans l’intervention de qui que ce soit.

La discorde entre haririens et aounistes, qui a atteint son paroxysme au cours de ce nouveau round d’accusations mutuelles, est encore montée d’un cran après qu’un ancien député aouniste, Nabil Nicolas, a fait circuler il y a quelques jours une photo vraisemblablement truquée de l’ancien directeur des FSI, Achraf Rifi, posant aux côtés de Abdel Rahmane Mabsout. Pour un responsable du Futur, il s’agit d’une « stigmatisation confessionnelle inacceptable dans la mesure où l’on n’est pas censé faire des amalgames du fait que 2 ou 3 % des habitants de Tripoli sont barbus ». « Cherche-t-on à s’abriter sous le couvert du sexennat pour diaboliser une composante politique du paysage libanais ? » s’est interrogé pour sa part M. Rifi en pointant du doigt M. Bassil.


(Reportage : Saber Mrad, le héros méconnu de l’attentat de Tripoli)


Récemment, le chef du CPL s’en était violemment pris au directeur général des FSI, le général Imad Osman (proche du courant du Futur), l’accusant d’abus de pouvoir. À la même occasion, lors d’une tournée dans la Békaa, M. Bassil avait également estimé que « le sunnisme politique est né sur le cadavre du maronitisme politique ». « Nous voulons recouvrer ces privilèges intégralement », a-t-il ajouté.

Ces propos, suivis des insinuations autour de l’incident de Tripoli, ont poussé trois anciens chefs de gouvernement, Tammam Salam, Fouad Siniora et Nagib Mikati, à se réunir lundi pour mettre les points sur les i et faire barrage aux tentatives de porter atteinte aux prérogatives de la présidence du Conseil. Les trois pôles sunnites ont exprimé leurs craintes d’une tentative visant à ramener le pays à la période de l’avant-Taëf.

Une accumulation

La tension qui couvait depuis un certain temps s’était exacerbée une première fois à l’issue de l’acquittement, il y a une semaine, de l’ancienne directrice du bureau de lutte contre la cybercriminalité au sein des Forces de sécurité intérieure, Suzanne el-Hajj, accusée de « fabrication de fausses preuves » contre le dramaturge Ziad Itani, une décision qui, d’après les milieux haririens, a été impulsée par le ministre de la Défense, Élias Bou Saab, qui serait intervenu en faveur de sa libération.

Fustigeant les ambitions présidentielles de Gebran Bassil, Moustapha Allouche, membre du bureau politique du courant du Futur, estime que le chef du CPL « est pressé de moissonner argent et pouvoir avant de se voir couronner président ». Dans les milieux haririens, on impute également à M. Bassil la volonté de chercher à saper l’autorité du chef du gouvernement ainsi que son pouvoir décisionnel au sein du Conseil des ministres.


(Lire aussi : Attaque de Tripoli : l’unité interne contre le terrorisme)


Le courant du Futur a riposté mardi dernier. « Saad Hariri est le chef du gouvernement et préside l’ensemble des ministères. Il n’a besoin de leçons de qui que ce soit en matière de procédure ou de responsabilités à assumer », indique un communiqué publié par le bureau de presse du Futur. Le texte, qui déplore au passage les attaques dont les FSI ont été récemment la cible et « la discrimination faite entre cette institution sécuritaire et l’armée », était également une réaction aux propos du ministre de la Défense. Dans un entretien accordé mardi à une radio locale, ce dernier avait indiqué que Saad Hariri n’était pas entré en contact avec lui depuis l’incident sécuritaire de Tripoli, « probablement parce qu’il se sent plus concerné par les FSI » que par l’armée.

Pour M. Allouche, le CPL « tente de jouer subtilement sur le conflit qui oppose le sunnisme politique au chiisme politique pour s’assurer une place sûre dans l’équation. Ne pouvant miser sur une confrontation avec les chiites, il préfère toutefois s’attaquer aux sunnites qui lui semblent être le maillon faible ».

« La relation entre MM. Hariri et Bassil ressemble au mariage de la carpe et du lapin », commente pour L’OLJ une source diplomatique, selon laquelle les deux hommes ne sont pas faits pour être alliés.

Cependant, une fois de plus, la détérioration des relations entre le chef du CPL et le chef du courant du Futur ne risque pas de compromettre le partenariat qui les lie. C’est en tous les cas l’avis de M. Allouche qui, répercutant la volonté des haririens de ne pas recourir à l’escalade à condition que « les provocations cessent », ne semble pas inquiet quant à l’avenir du compromis présidentiel, rejoignant ainsi le climat distillé hier soir dans les milieux du CPL.


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commentaires (8)

En fait la marginalisation de Mr/ Hariri est complete. Il n'y a plus de Premier Ministre au Liban.

IMB a SPO

14 h 47, le 07 juin 2019

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Commentaires (8)

  • En fait la marginalisation de Mr/ Hariri est complete. Il n'y a plus de Premier Ministre au Liban.

    IMB a SPO

    14 h 47, le 07 juin 2019

  • AH SI LE MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES FAISAIT UNIQUEMENT SON TRAVAIL AU LIEU DE S'OCCUPPER D'ENVOYER A TOUT VA DES VACHERIES A TOUT LE MONDE L'AUTEUR DU BALTAJI FAMEUX QUI NE LUI A MEME PAS COUTE UNE CONVOCATION AUPRES DE LA JUSTICE REMET CELA LES CHETIENS DU LIBAN N'ONT PAS BESOIN DE LUI COMME PRESIDENT , QUAND IL LE COMPRENDRA IL SERA PLUS RAISONNABLE A MOINS QU'IL PENSE REEDITE LE COUP DE SON BEAU PERE EN BLOQUANT LA PRESIDENCE JUSQU'A SA NOMINATION COMME PRESIDENT UNE HONTE DE PLUS POUR LE CPL

    LA VERITE

    12 h 33, le 07 juin 2019

  • ""partenariat obligé"" POUR NOTRE MALHEUR ! SANS PARTI PRIS, YA REIT NOUS SAVIONS AU MOINS LE POURQUOI DU COMMENT DE LA CHOSE !

    Gaby SIOUFI

    12 h 33, le 07 juin 2019

  • Avec quelques amis français nous sommes de plus en plus consternés par la rivalité qui emporte Bassil et le pousse à détruire toutes formes d'unité politique!

    Beauchard Jacques

    12 h 26, le 07 juin 2019

  • ON EN A MARRE DES BOUDERIES DU GENDRE. MEME SI SUR CERTAINS SUJETS IL A RAISON CE N,EST PAS LE TEMPS D,INJECTER DU VENIN DANS LA VIE POLITIQUE DU PAYS CAR D,AUTRES URGENCES SONT PRIMORDIALES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 51, le 07 juin 2019

  • MM. Hariri et Bassil méritent l’oscar des meilleurs comédiens et des plus fidèles compères. Ils amusent la galerie, donnent chacun à ses ouailles de quoi penser sur un ventre creux, ressasser sa vindicte contre le camp opposé alors qu’eux sont en parfait accord. M. Hariri désargenté ne peut que s’accrocher au Sérail jouant les punching balls pour M. Bassil qui saute sur l’aubaine, faisant attention toutefois à ne pas dépasser certaines limites, M. Hariri n’ayant pas pour le moment de cascadeur pour le doubler. Georges Tyan

    Lecteurs OLJ 3 / BLF

    09 h 18, le 07 juin 2019

  • Qui nous délivrera de cette calamité protégée mais nuisible à la Nation Libanaise ? Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 04, le 07 juin 2019

  • Sunnisme politique, maronitisme politique, slogans idiots pour désigner l'autre alors que tout le monde fonde sa cuisine sur le communautarisme le plus stupide. Ça coûte combien au pays d'avoir un président chrétien? Et tant qu'on y est, dans ce système immonde, aux chrétiens? Et ce n'est pas Bassil qui a décidé qu'il fallait que les députés chrétiens soient élus par des chrétiens? Ça c'est quel "isme" politique? L'étroitisme peut-être ?

    M.E

    07 h 17, le 07 juin 2019

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