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La Consolidation de la paix au Liban - Mai 2019

Syndicat des enseignants : une histoire de consolidation juridique

Le Syndicat des enseignants n’est pas un nouveau venu en termes de problèmes de syndicalisme et de défense des droits. Son rôle de premier plan au sein du Comité de coordination syndicale et dans d'autres causes liées aux droits est bien établi. Je voudrais mettre en lumière deux aspects que j’ai eu à traiter en tant qu’avocat et conseiller juridique du syndicat depuis 1996 : le sort de l’échelle des salaires, et les mécanismes de la consolidation juridique dans le cadre de la revendication du droit des enseignantes et enseignants, compte tenu de l’impact de ces deux questions sur la paix sociale.

1- L'échelle des salaires :

On sait que l'adoption de l’échelle des salaires en vertu de la loi 46/2017 était le résultat d'une lutte menée durant de nombreuses années par le syndicat des enseignants et le Comité de coordination syndicale. Les élections législatives de mai 2018 ont probablement incité certaines forces politiques à voir cette question résolue à la veille du scrutin. Le texte a donc été promulgué et il est entré en vigueur conformément aux procédures législatives. Cependant, la promulgation de cette loi n’a pas été nécessairement accompagnée de sa mise en application. Certaines administrations d'écoles s'y sont opposées et ne l'ont appliquée que partiellement, d'autres ont refusé de l'appliquer complètement, tandis que d'autres encore l'ont appliquée intégralement et à la lettre. Dans un contexte de grave crise économique et sociale, les enseignants sont ainsi entrés en confrontation avec les administrations de certaines écoles, les parents se sont opposés à l'augmentation des frais de scolarité, et tous se sont malheureusement affrontés en l’absence de tout traitement officiel de cette affaire. Une situation qui a laissé les partenaires sociaux se débattre en vue de l'application d'une loi dont le suivi n’a pas été assuré par les législateurs qui l’ont promulguée. Ce qui a entraîné, entre autres, une série de problèmes auprès de la caisse d'indemnisation du personnel enseignant des écoles privées, ralentissant le règlement des indemnités de fin de service et des pensions. Tout cela a mis et continue de mettre en péril la paix sociale dans la mesure où le problème affecte de larges couches de la société, en particulier les enseignants et les parents des élèves, privant les premiers de droits qui leur sont reconnus par la loi et imposant aux seconds des charges supplémentaires. Sans oublier que certaines écoles (en particulier dans les zones rurales) souffrent déjà d'un déficit accumulé.

En l'absence de décision d’une autorité officielle compétente, l'inquiétude grandit aujourd’hui face à un éventuel réexamen des droits reconnus par une loi désormais en vigueur – droits reconnus par certaines écoles et obtenus par les personnes éligibles. La stabilité législative est la pierre angulaire de la stabilité sociale et il ne devrait pas y avoir d’improvisation dans la législation, d’autant plus qu’il existe déjà des solutions permettant une réponse durable, à condition que l’État assume une partie de sa responsabilité à l’égard notamment de l’éducation dans les classes primaires, rendue obligatoire depuis 2011.


2- Habilitation juridique :

Pendant ce temps, le syndicat des enseignants continue de rechercher la consolidation de la situation juridique des instituteurs, comme il le fait depuis le milieu des années 90. Outre le travail de son conseil d'administration et de ses branches dans les régions, le syndicat offre des conseils juridiques gratuits toutes les semaines. Il entretient également une correspondance avec les organismes officiels compétents et engage des procédures judiciaires sur les questions de principe. C'est peut-être le seul syndicat au Liban au regard de sa taille à offrir gratuitement ce type de services à ses membres. L’expérience a montré que le fait de soutenir les enseignants par la consolidation juridique de leur secteur contribue de manière significative à la protection de leurs droits et à prévenir la perte de ceux-ci par ignorance de la loi. Dans le même contexte, le bureau du conseiller juridique du syndicat a publié des brochures et des ouvrages sur :

- « Les droits des enseignants : questions et réponses », une brochure portant sur une simplification de la connaissance des droits.

- « Les droits des enseignants dans la législation », qui rassemble et compile diverses lois et réglementations relatives au personnel enseignant dans les écoles privées. Il a été publié en deux éditions à ce jour.

- « Le licenciement et les droits des enseignants », un ouvrage sur les différents aspects du licenciement, assorti de références à la jurisprudence et à des cas précis. Il a été publié en trois éditions à ce jour.

- Un certain nombre d'articles et de commentaires sur les décisions judiciaires concernant les enseignants, notamment dans la revue « Al Adl » (Justice) publiée par l’Ordre des avocats de Beyrouth.

Sur toutes ces questions précitées, le syndicat joue un rôle très important en sensibilisant et en aidant les enseignants, qui forment un groupe éduqué au sein de la société, capable de communiquer avec les administrations scolaires de manière conforme à l’espace pédagogique qu’ils partagent.

En fin de compte, il est clair que l’expérience syndicale, malgré les éclats, les affrontements, les grèves et les épisodes de colère qu’elle suscite parfois, contribue également à élever le niveau du débat et de la consolidation des droits, poussant ainsi au dialogue l’ensemble des partenaires du processus éducatif : le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, la commission parlementaire de l'Éducation, jusqu’aux syndicats dans les établissements scolaires, les administrations des écoles et les comités de parents.

Telle est la voie à suivre pour atteindre la paix sociale. Pas seulement à cause du nombre de parties prenantes dans le domaine de l'éducation, mais surtout à cause de ce que ce problème signifie pour l'avenir du Liban. Ici, les gens sont éclairés et chacun apprend le sens des droits et leur respect. Et à partir de là émergera le futur leader du pays. C’est ici que commence le vrai développement et se poursuivra de manière durable…


* Avocat à la cour d'Appel, chargé de cours à l'Université Saint-Joseph, ancien ministre de l'Intérieur, et conseiller juridique du Syndicat des enseignants au Liban


Les articles, enquêtes, entrevues et autres, rapportés dans ce supplément n’expriment pas nécessairement l’avis du Programme des Nations Unies pour le développement, ni celui de L'Orient-Le Jour, et ne reflètent pas le point de vue du Pnud ou de L'Orient-Le Jour. Les auteurs des articles assument seuls la responsabilité de la teneur de leur contribution.




Teachers Syndicate: A Story of Legal Empowerment


The Teachers Syndicate is not new on the scene in terms of issues, unionizing and fighting for its rights. Its leading role in the Union Coordination Committee and in other causes relating to rights is well established. I would like to shed light on two aspects that I have had to deal with by virtue of my position as lawyer and legal counsel to the syndicate since 1996: The fate of the salary scale and the mechanisms of legal empowerment within the framework of claiming the rights of teachers, given the impact of these two issues on social security.

1 - The salary scale:

It is known that the passing of the scale under Law 46/2017 was the result of a legal struggle led by the syndicate with the Union Coordination Committee over the years. The parliamentary elections of May 2018 may have been an incentive for certain political forces to see the scale through on the eve of the ballot. The law was enacted and became effective in accordance with legislative procedures. However, the issuing of the law was not necessarily accompanied by its implementation. Some school administrations objected and only applied it in part, while others refused to apply it altogether, and others still applied it literally and in full. In the context of a severe economic and social crisis, teachers were framed in confrontation with the administrations of some schools. The parents objected to the increase in tuition fees. Everyone unfortunately clashed and an official response was missing, leaving the partners in the educational process floundering in implementing a law enacted by legislators who failed to follow up on the process. This has led to, among many things, other problems before the Compensation Fund for private school teaching staff, which has slowed down the settling of end-of-service compensations and pensions. All this has threatened social security as it affects large segments of society, particularly teachers and parents, depriving the former of rights owed to them as recognized by the law and imposing on the latter additional burdens. Not to mention that some schools (especially in rural areas) already suffer from accumulated deficit.

In the absence of a decision by competent officials, there is growing concern today regarding potential re-examination of the rights recognized by the law already in effect—rights granted by some schools and obtained by those eligible. Legislative stability is a cornerstone of social stability. There should be no improvisation in legislation, especially since there are already available solutions that may allow for a sustainable response, provided that the State assumes some of its responsibility with regard to basic education that has been compulsory since 2011.

2 - Legal empowerment:

Meanwhile, the Teachers Syndicate continues to seek the empowerment of teachers, as it has done since the mid-1990s. In addition to the work of its executive board and its branches in the regions, the syndicate offers free legal advice on a weekly basis. It also conducts correspondence with the relevant official bodies and takes legal proceedings in matters of principle. It is perhaps the only syndicate of its size in Lebanon that offers this type of services to its members free of charge. Experience has shown that supporting teachers through legal empowerment contributes significantly to securing their rights and preventing loss of such rights due to ignorance of the law. In the same context, the office of the legal counselor of the syndicate issued booklets and books on:

- «The Rights of Teachers in Questions and Answers», a booklet that includes a simplification of knowledge about rights.

- «The Rights of Teachers in Legislation», which is a collection and compilation of various laws and regulations relating to teaching staff in private schools. It has been issued in two editions to date.

- «Dismissal from Service and the Rights of Teachers», a book on the various aspects of dismissal from service with jurisprudence references and case law. It has been issued in three editions to date.

- A number of articles and comments on judicial rulings concerning teachers, especially in the journal «Al Adl» (Justice) issued by the Beirut Bar Association.

In all of the above, the syndicate plays a very important role in raising awareness and assisting teachers, who form an educated group in society so that they are able to communicate with the school administrations in a way that lives up to the educational space they share with them.

In the end, despite the noise, confrontations, strikes and anger rounds that it brings at times, it is clear that the syndical experience also raises the level of debate and reinforcement of rights, pushing towards dialogue with partners in the educational process: from the Ministry of Education and Higher Education and the Parliamentary Education Committee to unions of educational institutions, school administrations and parent committees.

This is the way toward achieving social security. Not only because of the number of stakeholders in the educational issue, but especially because of what this issue means for the future of Lebanon. Here people are edified and here every one learns the meaning of rights and the meaning of respecting them. And from here will emerge the future leader of the country. Here real development begins and is carried on sustainably...


*Appeals lawyer, Lecturer at the University of Saint Joseph (USJ), Former Minister of Interior and Legal Counselor to the Teachers Syndicate of Lebanon


The articles, interviews and other information mentioned in this supplement do not necessarily reflect the views of the United Nations Development Programme nor of L'Orient-Le Jour. The content of the articles is the sole responsibility of the authors.

1- L'échelle des salaires :
On sait que l'adoption de l’échelle des salaires en vertu de la loi 46/2017 était le résultat d'une lutte menée durant de nombreuses années par le syndicat des enseignants et le Comité de coordination syndicale. Les élections législatives de mai 2018 ont probablement incité certaines forces politiques à voir cette question résolue à la veille du...

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