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Liban - Gouvernement

Face au clivage CPL-Amal, priorité au maintien du compromis

Pragmatique, Saad Hariri cherche à éviter un blocage (aouniste) du cabinet, souligne le Futur.

Saad Hariri présidant le Conseil des ministres, hier. Photo Dalati et Nohra

Le clivage entre le mouvement Amal du président de la Chambre Nabih Berry et le Courant patriotique libre du ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil est toujours réel, quoique la plupart du temps bien géré de façon à ce qu’il n’explose pas, comme ce fut le cas l’année dernière à la suite d’une vidéo fuitée dans laquelle M. Bassil traitait M. Berry de baltagi (sorte de voyou). Ce clivage est revenu en force à l’occasion des discussions houleuses en Conseil des ministres autour de l’examen de l’avant-projet du budget 2019, présenté par le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil. À tel point qu’on a eu le sentiment que le débat se résumait au face-à-face Amal-CPL, les autres composantes gouvernementales se contentant de rester en retrait, quoique à des degrés différents. Cette situation pousse les observateurs à se poser la question de savoir pourquoi l’écrasante majorité des protagonistes, à commencer par le Premier ministre Saad Hariri, s’est-elle confinée à ce rôle secondaire au moment où MM. Bassil et Khalil donnaient amplement de la voix. Et partant, de savoir aussi si, ultérieurement, sur d’autres dossiers, la même configuration sera de mise au sein du gouvernement. Dans les milieux politiques, on renvoie souvent les raisons de cet état de fait à l’appui qu’accorde le président de la République, Michel Aoun, à son gendre, le chef du CPL, et, surtout, à la nécessité de préserver le compromis présidentiel de 2016, aucun protagoniste n’ayant intérêt à voir cette entente s’effondrer, du moins à l’heure actuelle.



(Lire aussi : Budget 2019 : un compromis gouvernemental, mais sur quoi ?)



Le tiers de blocage
C’est en tout cas cet argument que présente le courant du Futur pour expliquer l’attitude de Saad Hariri lors du débat autour du budget 2019 en Conseil des ministres. Interrogé par L’OLJ, Moustapha Allouche, membre du directoire du parti haririen, souligne que « l’important reste le maintien du compromis présidentiel, dans la mesure où cela est à même d’assurer la productivité du cabinet et de préserver la stabilité ». Mais l’ancien député de Tripoli ajoute un élément important : « Saad Hariri est conscient que Gebran Bassil et son parti détiennent avec le chef de l’État quasiment onze ministres, soit le tiers de blocage. Il est donc en mesure de bloquer l’action du gouvernement s’il juge cela conforme à ses intérêts », déclare M. Allouche, faisant valoir que le Premier ministre tente d’éviter le pire, à savoir une paralysie gouvernementale inopportune. Selon lui, « le Premier ministre continuera probablement à observer la même attitude dans les prochains dossiers qu’évoquera le Conseil des ministres ».

Même son de cloche du côté de Moukhtara. En dépit de sa complicité avec le président de la Chambre et ses profondes divergences avec la formation de Gebran Bassil, le Parti socialiste progressiste a préféré se tenir à l’écart des querelles entre Amal et le CPL. Et, à l’instar du courant du Futur, le PSP tente ainsi d’assurer la pérennité de l’entente politique élargie de 2016. « Nous faisons partie des groupes parlementaires ayant voté Michel Aoun lors de la présidentielle (contrairement au groupe berryste). Et l’entente conclue à cet effet est toujours en vigueur. Elle se manifeste dans plusieurs domaines, notamment durant les séances gouvernementales », déclare à L’OLJ Rami Rayès, responsable média au sein du PSP. Il reconnaît cependant que son parti et celui de Gebran Bassil peuvent diverger sur les grosses thématiques et ne manque pas de décocher une flèche en direction du ministre des Affaires étrangères. « En discutant des questions sérieuses et scientifiques, nous ne cherchons pas à atteindre le statut de star, mais présentons des données chiffrées », lance Rami Rayès.



(Lire aussi : Déficit, dites-vous ?, L'éditorial de Issa GORAIEB)



L’appui de Aoun à Bassil
À leur tour, les Forces libanaises, dont les relations sont souvent à vif avec leurs partenaires de l’accord de Meerab (janvier 2016), semblent tout aussi déterminées pour le moment à ne pas alimenter leurs polémiques avec le courant aouniste. Si des désaccords clairs sont apparus entre les ministres FL et le chef du CPL au cours de l’examen du budget, Richard Kouyoumjian, ministre des Affaires sociales (FL), préfère les réduire à des « positions politiques différentes », tout en insistant sur l’attachement de son parti à la réconciliation interchrétienne, et en dépit des « infractions » commises selon lui au volet politique de cet accord. « Mais il ne faut pas perdre de vue le fait que le CPL est appuyé par le président de la République », note M. Kouyoumjian. Mais un cadre FL joint par L’OLJ tient cependant à préciser que cela ne signifie pas que son parti ne mène pas les batailles « opportunes » en Conseil des ministres. « Nous avons tenu tête au CPL dans l’affaire du plan de production de l’électricité (approuvé par le gouvernement le 8 avril dernier) », rappelle-t-il à titre d’exemple.



(Pour mémoire : Gouvernement à majorités variables, le décryptage de Scarlett HADDAD)



Le silence du Hezbollah
Mais c’est surtout le Hezbollah qui a créé la surprise en se tenant nettement en retrait dans les débats. Dans des milieux politiques proches de la formation de Hassan Nasrallah, on estime d’abord que la querelle entre Amal et le CPL n’a pas dépassé les limites habituelles. Elle ne nécessitait donc pas l’intervention du Hezbollah. « Il y a aussi le fait que nul n’est en mesure d’empêcher un grand parti politique comme le CPL, dont relève le chef de l’État, d’exercer en quelque sorte sa prédominance », souligne une source proche du Hezb, dans ce qui sonne comme un constat d’impuissance face à l’hégémonie supposée de Gebran Bassil.

Le CPL, quant à lui, préfère minimiser la dernière querelle avec le bras droit de Nabih Berry. Selon Alain Aoun, député de Baabda, cette mésentente est « strictement technique » et « liée au budget ». « Il n’y a pas de règlement de comptes avec le président de la Chambre », assure-t-il à L’OLJ… En attendant peut-être la prochaine bataille, celle de la future loi électorale, que M. Berry a lancée très tôt et sur laquelle le CPL temporise… jusqu’à nouvel ordre.


Pour mémoire
Budget : le face-à-face Gebran Bassil-Ali Hassan Khalil

De vives tensions menacent la finalisation du projet de budget


Le clivage entre le mouvement Amal du président de la Chambre Nabih Berry et le Courant patriotique libre du ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil est toujours réel, quoique la plupart du temps bien géré de façon à ce qu’il n’explose pas, comme ce fut le cas l’année dernière à la suite d’une vidéo fuitée dans laquelle M. Bassil traitait M. Berry de baltagi (sorte de...

commentaires (3)

appeler les choses par leurs noms voudra s'avouer vaincus devant l'autel des COMPROMISSIONS . de la a ce que nos honorables- tous, nous convainquent de leur justesse il y a tres tres tres loin.

Gaby SIOUFI

16 h 51, le 25 mai 2019

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Commentaires (3)

  • appeler les choses par leurs noms voudra s'avouer vaincus devant l'autel des COMPROMISSIONS . de la a ce que nos honorables- tous, nous convainquent de leur justesse il y a tres tres tres loin.

    Gaby SIOUFI

    16 h 51, le 25 mai 2019

  • "...il (Gebran Bassil) est donc en mesure de bloquer l'action du gouvernement s'il juge cela conforme à ses intérêts..." donc, clairement: ses intérêts, et tant pis pour ceux du Liban ! Et que vivent les compromis faciles et lâches qui détruisent notre patrie... Irène Saïd

    Irene Said

    11 h 17, le 25 mai 2019

  • PROJET DE BUDGET NATIONAL ET ON NOUS PARLE DE COMPROMIS. JUSQU,A QUAND CE BORDEL SERA GERE PAR COMPROMIS ? LE CONSENSUEL COMME PRATIQUE AU LIBAN C,EST L,ANARCHIE... LE BORDEL !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 56, le 25 mai 2019

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