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Liban - Ministères

Coopération inédite entre l’Environnement et l’Intérieur : les carrières et les déchets à la clé

Un accord peu banal a été signé hier au bureau de Raya el-Hassan avec son homologue de l’Environnement, Fady Jreissati, en vue d’une coopération sur les dossiers écologiques sensibles.

M. Jreissati et Mme Hassan lors de la signature du « plan d’action commun » au ministère de l’Intérieur, hier. Photo ANI

Ceux qui suivent les dossiers écologiques depuis assez longtemps sont bien familiers des ravages causés par les conflits d’intérêts traditionnels entre les ministères de l’Environnement et de l’Intérieur et des Municipalités, dont le dernier épisode, pour ne citer que lui, s’est traduit en un conflit sur les délais administratifs accordés aux carrières entre les anciens ministres Tarek el-Khatib (Environnement) et Nouhad Machnouk (Intérieur) en mai 2017. Ces conflits d’intérêts ont eu de graves conséquences, et pour cause : le ministère de l’Environnement n’a pas de bras exécutif et les décisions prises à son niveau, ou par un organisme tel que le Haut-Conseil des carrières (présidé par le ministre de l’Environnement), doivent être exécutées par l’entremise du ministère de l’Intérieur. Beaucoup d’irrégularités sont passées entre les mailles du filet en raison de ces conflits, comme autant de symboles des ratages dans la protection de l’environnement, sur fond de corruption et de clientélisme. Les centaines de carrières qui continuent à fonctionner sans permis, même après avoir été brièvement fermées, en sont une preuve éclatante.

L’accord de coopération signé hier entre les ministères de l’Environnement et de l’Intérieur, par les ministres Fady Jreissati et Raya el-Hassan, dans le bureau de cette dernière, pourrait dès lors représenter un tournant dans la manière dont les grands dossiers environnementaux seront traités à l’avenir, même si la prudence recommande d’en attendre la bonne exécution.

Un « plan d’action commun »

Le document signé entre les deux ministres est présenté comme « un plan d’action commun dans les domaines de l’environnement, qui vise à déterminer les domaines et les méthodes de coopération ». Le plan d’action commun porte donc sur plusieurs domaines, notamment ceux des carrières et des déchets.

Sur le plan des carrières, « les deux ministères insistent sur la nécessité de se conformer aux dispositions et lois en vigueur, qui réglementent le processus d’obtention des permis, et de s’assurer de leur bonne application », souligne le texte. Il ajoute que « les deux ministères coopéreront au niveau de la surveillance de l’application des lois et de la réglementation du secteur, ainsi que pour la réalisation d’un recensement sur les carrières existantes et l’élaboration d’une politique durable de ce secteur ».

La coopération traditionnelle des deux ministères ne se limite pas aux carrières, mais s’étend aux déchets, et l’application des plans dans les régions. Ainsi, selon le plan d’action précité, les ministères devraient coopérer pour l’application des plans de traitement des déchets dans les régions, en coopération avec les municipalités (par le biais de leur ministère de tutelle). Le contrôle de la qualité du traitement des déchets et de l’hygiène publique sont également dans la ligne de mire des deux administrations. Elles devront par ailleurs s’assurer de la bonne application du décret sur les études d’impact environnemental, ainsi que des projets de nettoyage du fleuve Litani et des autres cours d’eau, dans un but de lutte contre la pollution.


(Lire aussi : Les habitants de Aïn Dara entament un sit-in ouvert pour empêcher l’accès au terrain de Fattouche)


« Il faut nous prendre au sérieux »

Lors de la signature du document, Mme Hassan a estimé que « la protection de l’environnement n’est plus un luxe, mais une composante essentielle de l’économie, de la santé et de l’image que reflète le Liban, ainsi qu’un droit pour les générations futures ». Elle a assuré avoir « placé l’environnement parmi ses priorités, ayant compris que le ministère de l’Environnement, même s’il définit les politiques générales, ne peut les appliquer sans notre concours ».

« Il nous faut donc appliquer cette politique ensemble dans le cadre d’un travail commun, a-t-elle poursuivi. Quand j’ai pris mes fonctions, j’ai découvert plus de 100 dossiers de carrières assortis de demandes de délais administratifs leur permettant de poursuivre leur travail. J’ai estimé que ces dossiers ne sont pas du ressort du ministère de l’Intérieur et les ai renvoyés au ministère de l’Environnement, puisque l’octroi des permis est de la responsabilité du Haut-Conseil des carrières. » Et d’ajouter : « Le directeur général des Forces de sécurité intérieure, le général Imad Osman, a ainsi fermé plus de 160 carrières dont les permis ont expiré, afin que les dossiers soient examinés par le Haut-Conseil des carrières suivant le plan directeur. »

De son côté, M. Jreissati a mis en évidence la proximité naturelle dans le travail des deux ministères. « Le ministère de l’Intérieur peut contribuer à notre réussite comme à notre échec, a-t-il souligné. D’où cette initiative pour l’instauration d’une collaboration. » Le ministre a dit espérer que le nouveau plan directeur sera prêt d’ici au 21 juin, fin du délai accordé par le Conseil des ministres à cet effet. « Nous appelons tous les propriétaires de carrières à présenter leurs dossiers au ministère et à nous prendre au sérieux parce que la loi sera appliquée sans exception après le 21 juin », a-t-il insisté.

Il a par ailleurs loué l’application des lois par son homologue de l’Intérieur : « Les délais administratifs sont une invention qui n’existe pas dans la loi. Le transport des stocks (NDLR : lui aussi utilisé comme prétexte pour la poursuite de l’activité dans les carrières illégales) est traité de manière claire et transparente par la ministre de l’Intérieur, alors que c’était auparavant un moyen de chantage. »

M. Jreissati a également évoqué la collaboration avec les municipalités et les mohafez en matière d’application du traitement des déchets, qui doit être décentralisé comme le dit la loi. La collaboration servira également à combattre les entorses à la loi comme les dépotoirs sauvages et l’incinération des déchets en plein air, a-t-il précisé.

« L’équipe du ministère de l’Environnement est formée d’une centaine de fonctionnaires seulement, et son budget va décroissant, a affirmé le ministre. Voilà pourquoi la collaboration avec la ministre de l’Intérieur et son équipe sera si utile. »


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Ceux qui suivent les dossiers écologiques depuis assez longtemps sont bien familiers des ravages causés par les conflits d’intérêts traditionnels entre les ministères de l’Environnement et de l’Intérieur et des Municipalités, dont le dernier épisode, pour ne citer que lui, s’est traduit en un conflit sur les délais administratifs accordés aux carrières entre les anciens...

commentaires (5)

Excellente initiative...! En espérant que toutes les démarches qui suivront, seront traiées de façon strictement technique, en tout professionnalisme,loin des pressions politiques en général, et plus particulièrement, de celles en provenance des partis représentés par les deux ministres en question.

Salim Dahdah

11 h 17, le 22 mai 2019

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • Excellente initiative...! En espérant que toutes les démarches qui suivront, seront traiées de façon strictement technique, en tout professionnalisme,loin des pressions politiques en général, et plus particulièrement, de celles en provenance des partis représentés par les deux ministres en question.

    Salim Dahdah

    11 h 17, le 22 mai 2019

  • dans l'espoir infime de voir Mme elhassan et mr jreissati poursuivre les responsables de cet etat de salete , dechets et autres ambiant dans les rues de beyrouth et ses trottoirs .

    Gaby SIOUFI

    10 h 04, le 22 mai 2019

  • CARRIERES ET DECHETS DEUX PROBLEMES MAJEURS QUI SE RESSEMBLENT CAR ILS ENLAIDISSENT L,ENVIRONNEMENT ET QUI DOIVENT ETRE RESOLUS DE MANIERE DEFINITIVE ET DANS LE RESPECT ECOLOGIQUE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 31, le 22 mai 2019

  • Excellent. La preuve que le pire n'est pas toujours la règle!

    Marionet

    09 h 05, le 22 mai 2019

  • Un bon pas!

    NAUFAL SORAYA

    07 h 43, le 22 mai 2019

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